Barcelone - Sagrada Familia - Parc

Barcelone – Sagrada Familia – Parc

Barcelone

Métropole d’exception, Barcelone a renoué au cours de ces vingt dernières années avec un dynamisme comparable à celui qui fut déjà le sien dans le passé. Les Jeux olympiques de 1992 furent le moteur de cette nouvelle impulsion qui imposa de repenser la ville. Le grand chantier ouvert dans les années 1980 a bouleversé la capitale catalane et surpris les Barcelonais eux-mêmes ! Animée d’un insatiable appétit de nouveauté, Barcelone poursuit sans relâche sa modernisation.

La ville nouvelle
Au cœur de la ville, la place de Catalunya fait le lien entre le centre historique et les nouveaux quartiers. Elle a été créée à la suite de la démolition de l’enceinte du XIVe siècle et de la création des Rondas. Au-delà, le Passeig de Grácia est l’artère principale du quartier de l’Eixample de Cerda qui, en 1860, donne à Barcelone les directions de son expansion. Parallèle au Passeig de Gracià, la Rambla de Catalunya est une des artères les plus fréquentées de l’Eixample. Plantée de tilleuls et bordée de terrasses de café, c’est un lieu de vie culturelle et commerciale, réunissant boutiques de mode, galeries d’art, librairies et cinémas. Au-delà de l’Eixample, la ville a rejoint depuis la fin du XIXe siècle la colline de Pelada, aux pieds de laquelle s’était développé le faubourg de Grácia. Plus loin encore, elle rejoint la colline du Tibidabo, célèbre pour son parc d’attractions et sa vue spectaculaire sur la ville. La tour de télécommunications de Norman Foster (1988-92) qui la coiffe réserve du haut de ses 258 m un panorama vertigineux ! Au sud, le tissu urbain rattrape la colline de Montjuïc ; au nord, il s’étend au-delà du Parc de la Ciutadella, du nom de l’ancienne forteresse qui depuis le XVIIIe siècle protégeait son port.

Le centre historique
Place de Catalunya s’ouvre la Rambla qui partage le centre historique avec, d’un côté le quartier del Raval, de l’autre le quartier gothique. Elle formait la limite méridionale de la ville fortifiée du XIIIe siècle et conduit jusqu’au port. La réconciliation de la ville avec ses horizons méditerranéens revient aux grands aménagements de 1992 qui ont réhabilité les quais. Le quartier del Raval, baptisé aussi Barrio Chino, encore populaire et très authentique, fait l’objet d’une importante rénovation. Il est aussi un centre culturel avec le Musée d’art contemporain, la Bibliothèque des musées, face à lui, et la Bibliothèque de Catalunya, dans l’ancien hôpital Sant Creu. Le quartier gothique, Barrio Gotico, est le vieux centre politique et religieux de la cité. Protégé d’une première fortification à l’époque romaine, sa parure gothique est le signe de l’apogée de Barcelone aux XIIIe et XIVe siècles. La grande voie de Laietana le sépare du vieux quartier de la Ribera. Jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, il était le quartier privilégié des affaires et de la haute bourgeoisie.

Barcelone - Rambla

Barcelone – Rambla

De la Rambla vers le port
Depuis la place de Catalunya, la Rambla s’étire jusqu’à la Plaça del Portal de la Pau sur le port, dominée par la statue de Christophe Colomb. Son nom lui est donné par le cours d’eau (ram’la en arabe) contre lequel fut construite la muraille du XIIIe siècle. Dans le dernier tiers du XVIIIe siècle, la promenade est aménagée, puis, en 1859, plantée de platanes qui protègent toujours les promeneurs d’un soleil insolent. Avant d’entreprendre son long parcours, animé et jalonné de marchés aux fleurs et aux oiseaux, les passionnés d’art contemporain feront un détour par le musée du quartier mitoyen del Raval. Le Musée d’art contemporain, œuvre de l’américain Richard Meier (1992), abrite entre autres des œuvres de Klee, Miró, Torres-Garcia, Millares, Fontanes, Solano, Tapiès… Sa haute façade de verre fait face à la Bibliothèque des musées d’art. Sur la Rambla, après l’église jésuite de Betlem au n°107 (1681-1722) et l’Académie des sciences, à la façade 1880, le marché de la Boqueria s’annonce aux N°85-89. Il est couvert d’une immense charpente métallique (1870) et cache quelques comptoirs aux appétissantes tapas au milieu d’étals de fruits, d’épices, de charcuterie ou de fromages. Tout à côté, au N°83, la pâtisserie Antigua Casa Figueras témoigne par sa devanture, due à Antoni Ros i Güell (1902), de l’engouement des Barcelonais pour le modernisme. En face, sur la petite place de la Boqueria qui donne sur le quartier gothique, la Casa Bruno Cuadros (XVIIIe siècle) projette à son angle un dragon impétueux, preuve du goût orientaliste de Josep Vilaseca qui la transforme dans les années 1880. La rue de la Boqueria invite à un détour vers l’église gothique Santa Maria d’El Pi cernée de trois petites places irrégulières qui précipitent le visiteur dans l’ambiance de la vieille ville. Elevée au XIVe siècle, Sainte-Marie-du-Pin est un des exemples typiques de l’âge gothique catalan par ses hauts murs continus et sa nef unique, terminée par une abside à sept pans. La place d’El Pi est un lieu convivial qui s’anime en fin de journée autour de quelques terrasses de café. Au N°61-65, le théâtre del Liceu, ou Opéra de Barcelone, fut construit au milieu du XIXe siècle. Son histoire, qui compte deux incendies récents (1994 et 1997), fait figure d’épopée malheureuse. Malgré cela, avec une capacité de 4 000 spectateurs et une programmation de choix, il est l’un des plus grands théâtres d’Europe. Un peu plus bas, il faut quitter la Rambla pour découvrir d’un côté la Plaça Reial, de l’autre le Palais Güell. La Place royale, due à Francesc D. Molinai Casamajó au milieu du XIXe siècle, est le seul exemple d’une place néoclassique. Son exotisme est renforcé par la présence des palmiers, plantés en 1883, selon une nouvelle mode importée des colonies d’Amérique. Le Palais Güell (1886-90) dans la petite rue Nou de la Rambla est la seconde œuvre que l’industriel et mécène Eusebi Güell (1846-1918) confie à Gaudí. L’architecte agence les espaces depuis le sous-sol, en maçonnerie de brique, jusqu’aux toitures hérissées de cheminées fantastiques. Le salon, pièce maîtresse haute de 17 m sur 3 m de large, est au centre de la construction, coiffée d’un dôme qui filtre la lumière et scintille. Tout le décor de l’étage noble est somptueux, selon les vœux du commanditaire. La sobre façade, revêtue de marbre gris de Garraf dans les parties basses, contraste avec les grilles et l’exubérant blason en fer forgé du propriétaire. Le palais, classé au Patrimoine mondial comme le Parc Güell, est le premier témoignage de la création profondément originale de Gaudí. Au terme de la Rambla, sur la Plaça Portal del Pau, la statue de Christophe Colomb regarde du haut de ses 50 m en direction de la mer. Elle fut inaugurée lors de l’Exposition de 1888. Non loin, les Drassanes, anciens arsenaux royaux aménagés en musée de la marine, constituent un des témoins les plus significatifs de l’activité portuaire de Barcelone. En dépit de quelques remaniements au XVIIe siècle, il est l’exemple le plus complet de ce type d’édifice des XIIIe-XIVe siècles. La longue promenade des quais sur le Passeig de Colòn aménagée pour 1992 a perdu ses saveurs d’antan. Depuis le quai, une passerelle de bois conduit au Moll de España ou Centro del Mar, Centre de la mer. Il abrite un aquarium, Aquarium du Port Vell, et un centre commercial avec un cinéma.

El Barrio Gotico
L’essor économique que connaît la Catalogne à la faveur des échanges méditerranéens profite tout particulièrement à Barcelone, centre d’affaires commandé par une riche bourgeoisie marchande devenu au XIIIe siècle capitale du royaume aragonais. A cet élan s’associe l’art gothique qui donne son nom à la vieille ville, centre politique et religieux de la cité depuis l’époque romaine. D’importants vestiges témoignent de la puissante fortification de l’époque romaine. La Plaça Nova et l’Avenida de la Catedral commandent l’accès au vieux quartier qui réunit cathédrale et bâtiments officiels.

Cathédrale Sainte Eulalie - Barcelone

Cathédrale Sainte Eulalie – Barcelone

La cathédrale Sainte-Eulalie
Sous des allures gothiques, la façade de la cathédrale date de fait de la fin du XIXe siècle ainsi que la tour-lanterne. A l’arrière, l’édifice est médiéval (XIVe-XVe siècles). L’intérieur est d’une ampleur étonnante, due à la hauteur des voûtes d’ogives des trois vaisseaux. Le chœur ferme la perspective de la nef selon l’habitude espagnole de magnifier la liturgie et le rôle du chapitre épiscopal. Finement ouvragé, il abrite des stalles du XVe siècle, augmentées par Jean de Bourgogne des blasons des chevaliers de l’Ordre de la Toison d’or, réunis à Barcelone par Charles Quint en 1519. A l’arrière, le trascoro retrace dans le marbre l’histoire du martyre de sainte Eulalie, vénérée dans la crypte où un sarcophage d’albâtre, œuvre du Toscan Lupo di Francesco en 1327, enferme les saintes reliques. Ses chapelles abritent des chefs-d’œuvre des maîtres gothiques dont le retable de Lluís Dalmau (fin XVe) dans la chapelle Saint-Clément, et de nombreux tombeaux de prélats. Le cloître, ceint de chapelles, ouvre à l’est sur la chapelle du Saint-Sacrement couverte d’une voûte étoilée au dessin compliqué d’un gothique tardif. Son jardin planté d’orangers, de palmiers et de magnolias est habité par une colonie d’oies, gardiennes des lieux. En contournant la cathédrale par la rue de Bisbe, un passage couvert met en communication les maisons des chanoines de la cathédrale, Cases dels Canonges, et le palais de la Generalitat, situé à droite. Ce passage de style gothique a été construit en 1925.

Palais de la Generalitat
Etendu de l’église San-Sever jusqu’à la place Sant-Jaume, le palais du gouvernement catalan est le résultat d’agrandissements successifs depuis sa création au XIIIe siècle. Ses murs sur la rue de Bisbe donnent accès aux bâtiments du XVe siècle : un patio dû à Marc Safont s’ouvre à l’étage par un balcon aux colonnes frêles et donne accès à la chapelle Sant-Jordi, manifestation du gothique flamboyant à Barcelone. Sa façade sur la place Sant-Jaume, édifiée par Pere Blai entre 1596 et 1617, devient alors l’accès principal du palais.

Casa de la Ciutat
Face au palais de la Generalitat sur la place Sant-Jaume, l’hôtel de ville a lui aussi connu des transformations. Derrière sa façade du XIXe siècle, le siège du Conseil des cents, élevé pour l’essentiel au XIVe siècle, conserve un vaste patio et la Salle du conseil. Dès le XIIIe siècle, il forme une assemblée réunissant les plus grandes familles de banquiers, armateurs, et drapiers ; influent, il participe au gouvernement de la ville, voire de l’Etat catalan, défendant au mieux ses intérêts marchands. Après la place Sant-Jaume qui coïncide en partie avec le forum romain, centre politique et religieux de la cité antique, c’est la place del Rei, place du Roi, qui constitue l’autre grand volet de l’histoire officielle de la ville.

Palau Reial Major
Autrefois résidence comtale, le palais, investi par les rois qui le transforment dès le XIIIe siècle, doit à Pierre le Cérémonieux (1336-1387) plusieurs de ses embellissements. De l’époque médiévale, seuls subsistent le Salon del Tinel et la chapelle Sant-Agueda (Sainte-Agathe). L’ampleur du salon de réception, édifié entre 1359 et 1370 par Guillem Carbonnel, produit une saisissante impression avec ses grands arcs jetés sur toute sa largeur. La chapelle, accessible aussi depuis la façade du palais, enferme le retable du Connétable, œuvre maîtresse de Jaume Huguet (1465). La haute tour de guet qui surveillait la mer, el Mirador del Mar (mi-XVIe siècle), fait le lien avec le palais du vice-roi, el Palau del Lloctinent. Elevé sous le règne de Charles Quint, il devait donner à son représentant un lieu digne de sa fonction. Il abrite aujourd’hui les archives de la couronne d’Aragon. Le Musée d’histoire de la ville complète l’ensemble monumental de la place du Roi. Cet ancien palais des Xve et XVIe siècles fut déplacé pierre par pierre à ce nouvel emplacement, suite au percement en 1907 de la Via Laeitana qui sépare le quartier gothique de celui de la Ribera. Il propose la visite des fouilles menées en sous-sol de la place. Le petit musée Marès, implanté dans une dépendance du palais royal et ouvert sur ses jardins, place Sant-Lu, conclut la visite du quartier.

Le quartier de la Ribera
Baptisé Ribera, qui signifie « rivage », cet autre vieux quartier de Barcelone, étendu le long de l’interminable Via Laeitana, rend hommage à la mer qui parvenait jusqu’à lui, le Passeig Isabel II formant ses quais. Le dédale de ruelles des environs de l’église Santa-Maria-del-Mar a conservé l’âme du vieux quartier médiéval, et ses rues le souvenir des occupants : les carders, cardeurs ; les corders, cordiers ; les flassaders, tisseurs ; les mercaders, marchands… Le Palais de la musique catalane marque les confins de la Ribera.

Barcelone - Santa Maria del Mar

Barcelone – Santa Maria del Mar

Santa-Maria-del-Mar
Témoignage de l’esprit corporatiste de la société barcelonaise, cette église qui protège les marins partis en mer est le fruit d’un effort collectif : négociants, armateurs, honorables citoyens du Conseil des cent financent sa construction menée à bien entre 1329 et 1384. Son ampleur est due aux volumes des collatéraux qui rivalisent en hauteur avec la nef centrale. Ils se prolongent par un déambulatoire qui contourne le chœur marqué par le resserrement des piles du rond-point.

La rue Montcada
Le déploiement des palais de la rue Montcada montre l’importance des grandes familles barcelonaises qui bâtirent leurs hôtels particuliers au cœur du centre des affaires. Non loin, la Llotja, ou Bourse des marchands, dans la rue Consolat-del-Mar (nom du premier droit maritime émanant du Conseil des cent), rappelle ce rôle de premier plan. Reconstruite au XVIIIe siècle, elle conserve des espaces gothiques de la seconde moitié du XIVe siècle, dont la grande Salle de contratación, Chambre de commerce. La rue Montcada tient son nom d’un riche marchand, Guillermo Ramón de Montcada, célèbre pour ses actes de piraterie à l’encontre même des navires barcelonais et qui avait autrefois sa demeure dans la rue. Au n°25, la Casa Cervelló-Giudice et au n°23 le Palau Finestres sont d’un grand intérêt. La première offre une façade du XVIe siècle qui évoque les palais florentins du quattrocento. Elle comporte une grande porte en plein cintre, trois baies à l’étage noble soulignées par un bandeau et une loggia à arcades à l’étage supérieur. Le palais Finestres est la plus vieille demeure de la ville ; la nature de ses baies, percées sous de petits arcs reçus par deux colonnes, trahit son ancienneté. En face, au n°20, le palais Dalmases est sans doute le plus imposant ; sa première construction remonte au XVe siècle mais il fut remanié au milieu du XVIIe siècle. Dans le patio, la rampe de l’escalier ouvert sur la cour par deux grandes baies affiche un exubérant décor. Au n°18, la Casa Asilo-Cuna lui succède avec sa sobre façade couronnée aussi d’une loggia. Plus loin, au n°19, le palais Meca présente deux types de balcons bien distincts : le premier en pierre est du XVIIe siècle, le second en fer forgé et azulejos est particulier au XVIIIe siècle. Le palais suivant au n°17, Barò de Castellet, forme avec le précédent le Musée Picasso qui occupait initialement le seul palais Berenguer d’Aguilar. Le n°15 constitue l’entrée du musée.

Le Musée Picasso
Plusieurs fois remanié depuis sa première édification au XIIIe siècle, le palais Berenguer d’Aguilar se présente pour l’essentiel dans des murs du XVe siècle. Acquis par la mairie en 1953, il est restauré et inauguré en 1963 pour recevoir le legs de Jaume Sabartés, secrétaire particulier de Picasso. Il s’étend dans les années 1980 aux deux palais voisins pour accueillir des collections plus importantes. Elles comptent, outre de nombreuses œuvres gravées et premiers tableaux, la célèbre série des Ménines, donnée par Picasso et inspirée de la peinture de Vélasquez exposée au Prado. Face au Musée Picasso, le Musée du textile célèbre cette activité essentielle à la ville ; il présente de multiples étoffes précieuses et l’outillage propre à cette industrie.

Palais de la musique
Le bâtiment moderniste dédié à la musique catalane est signé Lluis Domènech i Montaner (1905-1908). A l’angle, l’allégorie de la chanson populaire due à Miquel Blay annonce la destination de l’édifice, un lieu pour promouvoir le chant. Les bustes au second niveau devant des baies représentent Bach, Beethoven, Wagner et Palestrina. Les réminiscences d’un art gothique, mudéjar, Renaissance ou baroque s’associent dans une architecture et une ornementation profondément originales. A l’intérieur, la salle de concert réserve le spectacle d’un luxuriant décor, d’influence baroque avec des sculptures de Pau Gargallo qui envahissent la scène. Une coupole renversée, au vitrail polychrome, domine l’auditorium.

Casa Fuster (Montaner) - Passeig de Garcia - Barcelone

Casa Fuster (Montaner) – Passeig de Garcia – Barcelone

Le Passeig de Gracia
C’est Ildefons Cerdà (1815-1876), un des premiers théoriciens de l’urbanisme moderne, qui donne en 1860 à Barcelone son plan d’expansion hors enceinte. Il dessine l’Eixample, ensanche en espagnol, qui signifie « élargissement ». Son tracé orthogonal, capable de satisfaire un développement ultérieur de la ville, est résolument moderne. Il dessine des îlots d’habitation de dimensions semblables (113 m de côté) desservis par de grands axes de communication adaptés aux nouveaux moyens de transport, en particulier le tramway qui fait son entrée dans la ville. Il dessert encore efficacement Barcelone de nos jours. Le Passeig de Gracia existait dès 1827. L’urbaniste l’intégra à son plan pour en faire l’axe principal de la ville neuve. Il devient entre 1890 et 1925 le centre résidentiel de la haute bourgeoisie. Un bureau d’information de la Ruta del Modernismo situé dans la Casa Lléo Morera propose une documentation sur l’ensemble des constructions de ce style à Barcelone. Un îlot d’habitation surnommé en castillan « manzana de la discordia », pomme ou îlot de la discorde, réunit les œuvres des trois grands maîtres rivaux du modernisme : Lluís Domènech i Montaner, Josep Puig i Cadafalch et Antoni Gaudí i Cornet. Au n°35, la Casa Lleó Morera (1902-1906) de Lluís Domènech i Montaner, immeuble de logements, occupe l’angle de l’ensemble. Il déploie en façade un décor éclectique qui conjugue un esprit baroque et des formes gothiques. En dépit des transformations dont l’immeuble fit l’objet (boutique du rez-de-chaussée), le vestibule d’entrée, la cage d’escalier et l’étage noble constituent un des ensembles les mieux conservés de ces intérieurs bigarrés. Au n°41, la Casa Amatler (1898-1900) est aussi une référence explicite au gothique par la forme de ses baies et son mur pignon en escalier, proche de l’art nordique. Son revêtement de sgraffites en camaïeu et à très faible relief est caractéristique du modernisme tant à l’extérieur qu’à l’intérieur des édifices. A sa suite, au n°43, la Casa Batllò (1904-1907), construite pour un riche industriel du textile, révèle l’originalité de Gaudí. La façade est semblable à un corps dont les colonnes du premier étage sont le squelette et les balcons en forme de masque autant de regards sur la ville. Le mur s’anime sous l’effet ondulatoire des arabesques du bow-window, des balcons et de la toiture, et sous les multiples reflets des céramiques bleues, vertes ou jaunes. A deux pas, la Carrer d’Aragò abrite la Fondation Tapies établie dans un bâtiment construit entre 1879 et 1886 par Lluìs Doménech i Montaner. Sa façade de brique est couronnée de la sculpture en tube d’aluminium réalisée par Tapies lui-même quand il crée, en 1984, cette fondation. Elle propose une collection des œuvres du peintre et une bibliothèque spécialisée ; c’est aussi un lieu d’expositions temporaires. La Casa Mila (1905-1910) dite « la pedrera », « la carrière », réalisée par Gaudì est un contrepoint à l’urbanisme quadrillé de Cerdà. Sa façade serpentine est souvent comparée à une carrière de pierre dont l’érosion naturelle aurait sculpté les formes. Elle masque une structure d’acier faite de piliers, de poutres et de solives métalliques qui autorisent toute la hardiesse de la construction et la dispense de murs porteurs. L’immeuble à appartements s’organise ainsi librement autour de deux vastes patios, l’un ovale, l’autre circulaire. Les toits sont peuplés de cheminées, de sorties d’escalier ou de bouches d’aération. L’Espace Gaudí (Espai Gaudì) y propose une découverte de l’architecte et permet la visite des cages d’escalier et des terrasses.

Stade olympique - Montjuic, Barcelone

Stade olympique – Montjuic, Barcelone

La colline de Montjuïc
Aménagée pour la première fois à l’extrême fin du XIXe siècle pour être un lieu de promenade dominicale sous l’œil vigilant de la vieille citadelle (XVIIe-XVIIIe siècle), elle accueille en 1929 l’Exposition internationale, puis en 1992 les Jeux olympiques. Elle se pare alors de bâtiments mêlant historicisme et avant-garde en architecture. L’ancien Palais national destiné à accueillir les cérémonies officielles de 1929 et le pavillon de Mies Van der Rohe ont été enrichis pour les Jeux olympiques, d’un stade, de piscines et du palais des sports Sant-Jordì. Les Jardins Mossen, tournés vers la mer (près du parc d’attractions), réservent de superbes panoramas sur la ville et son port.

 

Le Musée d’art catalan
Les deux campaniles de la Plaça d’Espanya ouvrent sur l’allée qui conduit, par un jeu de terrasses et de jets d’eau, au Palais national. Son style monumental est cher au noucentisme. Ce mouvement intellectuel et artistique apparu dans les années 1910 est chargé de réminiscences antiques. Dans ses murs, le Musée d’art catalan, Museu nacional d’arte de Catalunya, réunit aujourd’hui une collection d’œuvres romanes et gothiques réparties sur les deux ailes du palais. Cet espace muséographique fut entièrement repensé en 1990 par Gae Aulenti (auteur du Musée d’Orsay à Paris) pour permettre l’ouverture de la section romane cinq ans plus tard. Elle abrite des grands ensembles de peintures murales médiévales de Catalogne (XIe-XIIIe siècles). Ses sculptures en bois polychrome et ses devants d’autel permettent de saisir l’importance du mobilier et des objets religieux. Depuis 1997, la section gothique du musée a ouvert ses portes en réunissant une superbe collection de retables qui habillaient autrefois les chapelles des églises gothiques, œuvres des plus grands maîtres des XIVe et XVe siècles.

La Fondation Miró
Ce bâtiment moderne, construit entre 1972 et 1974 par Josep Lluis Sert, ami de Miró, reçoit la fondation du peintre qui désirait y réunir ses œuvres et y promouvoir l’art contemporain. Agrandi en 1988, il s’organise autour d’un patio aux murs blancs dont les ouvertures dispensent une lumière mesurée.

Offices de tourisme
Palau Robert, Passeig de Gràcia 107, tél. : 932 38 40 00, www.gencat.es/probert

Valence

Place de l’hôtel de ville, Valencia

Place de l’hôtel de ville, Valencia

Entourée de stations balnéaires, Valence est une métropole méditerranéenne, animée et souriante, la troisième ville d’Espagne avec ses 780 000 habitants. Elle profite des richesses agricoles du pays, les huertas où tout prospère, et des activités industrielles, en particulier celle, traditionnelle, du textile. Après sa reconquête en 1238, le tissage du coton et de la soie et la céramique, hérités des musulmans, continuent de nourrir une économie florissante. Après un recul au XVIIe siècle, Valence se redressait au siècle suivant et profitait de l’ouverture vers le Nouveau Monde pour renouer avec ses anciennes industries. .

Une riche cité
Les édifices civils, de style gothique, sont nombreux à témoigner de la richesse de la ville médiévale. Le premier d’entre eux est la Seu, la cathédrale. La première pierre est posée en 1262 mais le bâtiment final résulte de multiples interventions. Contre le chevet se trouve une loggia du XVIe siècle, à la croisée du transept un cimborrio du XIVe siècle aux verrières d’albâtre. En avant de l’église se dresse le campanile qui porte la cloche, dite « le Micalet » (1385-1418), monument fétiche de Valence. L’Almudín, ancienne halle aux blés des XIVe et XVIe siècles, est situé derrière la cathédrale. La puissante Torres de Serranos a été construite à la fin du XIVe siècle. La Torres de Cuarte du XVe siècle se trouve au nord-ouest à l’extrémité de la rue des Caballeros dans laquelle la Casa del Almirante et la Casa de la Scala cachent des patios. Dans cette même rue s’élève le palais de la Generalidad du XVe siècle, où siégèrent jusqu’au XVIIIe siècle les cortès de la ville. La Lonja de la Seda, ou Bourse de la soie, est un monument du gothique tardif : sa grande salle avec de hautes colonnes torses est l’œuvre de Pedro Compte (1483-1498). Le Musée de la céramique célèbre une production valencienne aux origines médiévales. Exposée dans le palais du marquis de Dos Aguas, sa collection rassemble des pièces exécutées pour l’essentiel dans la région. Le palais à la façade d’un fantastique décor baroque est exécuté en 1744. Le Museo San Pio V, musée des beaux-arts, est implanté dans un collège de style baroque, à l’écart de la vieille ville. Il expose des primitifs valenciens et Francisco Ribalta, peintre mystique du Siècle d’or.

Office de tourisme
Calle de la Paz, 48, tél. : 963 98 64 22, www.communidad-valenciana.com

Séville

Orangers, jasmins et jacarandas qui bordent les rues sévillanes offrent au voyageur un premier contact odorant. C’est ensuite son architecture blanche qui impressionne. Romaine puis musulmane, capitale almohade, parée d’or et d’argent à la faveur du Nouveau Monde, revisitée lors des expositions universelles de 1929 et 1992, la ville, forte de son histoire, cultive son patrimoine et ses traditions.

Porte des Amériques
Séville conserve plusieurs témoignages des échanges avec le Nouveau Monde dont elle a le monopole jusqu’en 1680 : la Bourse des marchands, ou Lonja, élevée au XVIe siècle par Juan de Herrera entre la cathédrale et l’Alcazar ; et, dans l’Alcazar, la fameuse Casa de Contrataciòn de los Indias, ou Chambre de commerce des Indes, fondée par Isabelle la Catholique en 1503. Celle-ci organisait la flotte marchande, réglait les litiges relatifs au trafic, veillait au prélèvement des taxes royales sur les convois. A l’apogée des échanges outre-Atlantique, dans la seconde moitié du XVIe siècle, Séville est un port encombré de navires marchands, de galions chargés d’or et d’argent, de navires venus de toute l’Europe pour porter vers l’Amérique des produits manufacturés ou alimentaires. L’Arenal, la grève, quartier qui depuis la cathédrale rejoint le fleuve, signale l’ancien emplacement du port fermé au nord par la Plaza de Toros. C’est ici qu’est élevé au XVIIe siècle l’hôpital de la Charité destiné à secourir les nécessiteux, à donner sépulture aux pauvres et aux suppliciés qui mouraient sur le port. Don Miguel de Mañara (1626-1679), le libertin repenti, figure mythique de Don Juan, finance la chapelle. Celle-ci, terminée en 1674, reçoit les grands chefs-d’œuvre de Murillo et de Valdès Leal aux côtés du retable de Bernado Simòn de Pineda qui réalise aussi la façade. Le retable enserre une mise au tombeau du sculpteur Pedro Roldan, qui signe aussi la figure ensanglantée du Christ de la Passion. Le palais San Telmo, patron des marins, abritait à l’origine l’Ecole de navigation pour les Indes. Il est aujourd’hui le siège du gouvernement andalou. La manufacture de tabac, au sud de la vieille ville, est devenue le siège de l’université sévillane. Elle affiche l’austérité d’une construction aux allures de forteresse, entourée de guérites et de douves qui recevaient autrefois les eaux du Tagarete, petit affluent du Guadalquivir à présent canalisé dans le sous-sol de la ville.

Séville médiévale
Reconquise en 1248, Séville garde aussi du passé médiéval musulman les souvenirs des temps almohades des XIIe et XIIIe siècles : le minaret de la mosquée de la Giralda, la Cour des orangers, la Tour de l’or sur le Guadalquivir, devenue le Musée maritime, une partie des fortifications et le Patio del Yeso de l’Alcazar. C’est aux musulmans qu’elle doit aussi ses rues étroites et tortueuses et ses maisons blanchies à la chaux ouvertes sur un patio intérieur du Barrio Santa Cruz. L’empreinte chrétienne est non moins éloquente : sa cathédrale du XVe siècle, ses multiples couvents et oratoires, la tradition vivace de la Semaine sainte en sont autant de témoignages. La basilique de la Macarena, construction du milieu du XXe siècle, du nom du vieux quartier musulman au nord de la ville, abrite la Vierge de l’Espérance, une des nombreuses patronnes et protectrices de Séville. Elle est le siège de la confrérie de la Macarena, ou des jardiniers, une des plus importantes de la ville. Toujours active, cette association de pénitents joue le rôle de maison de quartier et déploie, comme tant d’autres, à chaque Semaine sainte, son cortège de pasos.

Cathédrale de Séville. Extérieur, Sevilla

Cathédrale de Séville. Extérieur, Sevilla

La foi triomphante de la Cathédrale
« Erigeons une église si grande que ceux qui la verrons achevée nous prendrons pour des fous ». La traditionnelle assertion des chanoines de la cathédrale qui projetèrent en 1403 sa construction n’est pas démentie par son ampleur. Elevée au XVe siècle sur la salle de prière de la Grande mosquée du vendredi, ce vaste édifice à cinq nefs allie le gigantisme à la magnificence du style gothique. L’édifice fut achevé en 1519, après un siècle de travaux. Le minaret de la mosquée du XIIe siècle fut transformé en clocher et doté en 1558, du giraldillo, une girouette de la Sainte Foi en bronze. La Giralda est accessible depuis l’intérieur de la cathédrale ; sa construction de plan carré et de murs de brique, percés de fenêtres à arcs lobés, est d’une hauteur de 97 m. La cour des orangers, Patio de los Naranjos, qui précède l’accès à la cathédrale, est l’ancienne cour des ablutions de la mosquée almohade. Elle en a conservé plusieurs dispositions, dont la Porte du Pardon, fermée par de superbes vantaux de bronze, ornés de versets du Coran. En pénétrant dans la cathédrale par la Porte de la grenade aux pieds de la Giralda, apparaîssent l’éclat et la hauteur des voûtes de la croisée (40 m) et du transept. Un ensemble de verrières essentiellement du XVIe siècle tamise la lumière à l’intérieur de l’édifice. La capilla mayor et le coro disposés de part et d’autre du transept viennent rompre la perspective de la nef. Les grilles en fer forgé et doré de la capilla mayor abritent le maître-autel, présidé par un gigantesque retable sur bois sculpté polychrome et doré qui retrace l’Enfance et la Passion du Christ. L’ensemble du XVIe siècle, d’inspiration flamande, est couronné d’un calvaire du XIVe siècle. Les buffets des grandes orgues prolongent en hauteur le coro qui enserre les stalles des chanoines de la fin du XVe siècle et du XVIe siècle, réalisées en bois d’acajou de Cuba. Au milieu du XVIe siècle, à l’époque du maniérisme, la cathédrale fut augmentée à l’est de la Chapelle royale où reposent le roi de la Reconquête au XIIIe siècle, saint Ferdinand et le roi-poète Alphonse X le Sage, face à sa mère Doña Beatriz de Souabe. Au sud, l’avant-salle du chapitre et la salle capitulaire sont aussi du XVIe siècle. La première, voûtée de caissons, porte des décors sculptés qui exaltent les vertus cardinales au milieu de scènes bibliques. De plan elliptique, la salle capitulaire où se réunissaient les chanoines est ornée de peintures de Murillo, dont une Immaculée Conception, thème favori du maître, de 1667. La sacristie principale recèle plusieurs œuvres de Murillo, Zurbaran et Pedro de Campaña. La première sacristie, dite « de los Cálices », voûtée d’ogives, accessible par la chapelle des Douleurs, abrite entre autres un tableau représentant saintes Juste et Rufine, martyres du IIIe siècle, protectrices de la ville, peint par Goya en 1817. Les chapelles qui enveloppent l’édifice livrent elles aussi quelques toiles de ce maître du Siècle d’or.

L’Alcazar et ses jardins
Palais des souverains musulmans de la dynastie des Omeyyades puis des Almohades aux XIIe et XIIIe siècles, l’Alcazar a conservé quelques témoignages du savoir-faire musulman. Dans le Patio del Yeso, l’agencement des espaces, le travail du stuc et du bois, les compositions des azulejos aux motifs étoilés et les frises proclamant en arabe « seul Dieu est vainqueur » ont été miraculeusement préservés. L’enceinte ouvre sur la Plaza del Triunfo par les portes du Patio de las Banderas (des drapeaux) et du Patio de los Leones (des lions). Le Patio de la Monterìa qui introduit au palais du roi Pierre le Cruel (1350-1369) ferme la perspective de la cour, bordée à droite par l’Appartement de l’amiral, ancienne Casa de Contrataciòn de los Indias. Il démontre l’accomplissement de l’art de cour mudéjar. Le patio des Demoiselles (Doncellas) et le salon des ambassadeurs accueillirent en 1526 le mariage de Charles Quint et d’Isabelle de Portugal. Patios, chambres et alcôves forment une suite d’espaces qui mènent dans les jardins des XVIe et XVIIe siècles.

La Casa de Pilatos
Symbiose des raffinements de l’art gothico-mudéjar et de la Renaissance, ce palais et ses jardins datent du XVIe siècle. Sa construction, initiée par Don Pedro Enriquez de Ribera, est poursuivie par son fils Don Fadrique, premier marquis de Tarifa, qui lui donne entre 1534 et 1539 l’essentiel de son actuelle physionomie. Il le dote d’une collection de marbres antiques, originaux ou copies du XVIe siècle rapportés de Rome, complétée par ses successeurs, les ducs d’Alcala, vice-rois de Naples. Le palais doit son surnom de Maison de Pilate au XIXe siècle, lorsqu’on imagina qu’il avait été inspiré par un voyage de Don Fadrique à Jérusalem autour de 1520. Les images saintes d’un Chemin de croix voulu par le marquis jalonnent toujours les différentes stations de celui de la rue San-Esteban. Une fois franchie la cour d’entrée, un gigantesque bougainvillier rose fuchsia, fleuri en avril, précède l’accès au patio, le cœur de la bâtisse. Les azulejos, le marbre des statues et des colonnes, les yeserias du portique et le remplage gothique de la balustrade de la galerie supérieure aux arcs festonnés de tradition maure forment une harmonieuse synthèse des styles médiévaux gothique, mudéjar et Renaissance. Le patio dessert l’ensemble des pièces accessibles du palais, propriété de la duchesse de Medinaceli dont la famille acquit l’édifice au XVIIe siècle.

Office de tourisme
Avenida de la Constitucion, 21, tél. : 954 22 14 04

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