Entre terre et eau, cette région marécageuse est l’une des plus surprenantes du pays.
Des centaines de bolons – bras de mer – y forment un lacis inextricable entre les îles. Riche en poissons, le Siné-Saloum abrite également des multitudes d’oiseaux.
En général, cet estuaire s’explore en bateau depuis un campement. Toute cette région, qui s’arrête au bout de la Petite Côte et de l’estuaire des fleuves Siné et Saloum mais s’étend dans l’arrière-pays au-delà de Kaolack et Kaffrine, était autrefois le territoire de plusieurs royaumes sérères (notamment le Siné et le Saloum).
Originaires du fleuve Sénégal, les Sérères sont considérés comme parents des Wolofs et des Toucouleurs. Ils quittèrent la région et émigrèrent au sud où ils rencontrèrent des Mandings au XVIe siècle. Leur alliance donna naissance à une organisation sociale originale : les rois (« bours ») étaient choisis dans la dynastie manding des Guelowar et les grands dignitaires dans l’aristocratie sérère. Restés longtemps animistes, les Sérères furent à plusieurs reprises victimes des guerres saintes (« djihad ») lancées par les marabouts toucouleurs musulmans et en particulier par Maba, almamy du Rip, au siècle dernier.
Aujourd’hui beaucoup de Sérères ont accepté l’islam ou le catholicisme même si ces conversions n’ont pas toujours entamé en profondeur leurs croyances animistes. Les Sérères continuent à croire en un dieu suprême créateur (« rog ») et à tout un panthéon de divinités et d’esprits du monde invisible (« pangol ») à qui ils font de nombreuses offrandes et qu’ils placent au centre de grandes fêtes (récoltes, initiation, funérailles, etc.).
Quitter Dakar par l’autoroute et prendre la direction de la Petite Côte, via Rufisque et Mbour. A Mbour (83 km de Dakar), laisser la route de Joal au sud et bifurquer vers l’est en direction de Kaolack. Pénétrer alors dans la grande région d’arachides du Sénégal.
A Tiadiave (112 km), une petite piste conduit au sud à Nguénière et Ndangane, une des portes d’entrée de l’estuaire et du parc national du Siné-Saloum.
La route atteint ensuite Fatick (145 km), au bord du petit fleuve Siné, centre de traite de l’arachide. De Fatick, une autre petite route descend vers l’estuaire du Siné et vers les îles du parc national.
Continuer la N1 vers l’est, traverser les tanns, grandes étendues salées autour de Kaolack. Le sel et l’arachide ont fait la fortune de Kaolack (193 km de Dakar, 150.000 hab., poste, garages, hôpital, marché, hôtels, restaurants). Port fluvial sur le Saloum, navigable toute l’année jusqu’à son embouchure, Koalack est un des sommets du triangle arachidier Kaolack-Thiès-Diourbel.
A Kaolack, le marché est particulièrement pittoresque. La ville s’avère par ailleurs un excellent tremplin pour se rendre dans les îles et l’estuaire du Siné-Saloum.
Par la N5, gagner soit Foundiougne (à droite au carrefour de Passi), soit Sokone, Toubakouta ou Missira, plus au sud. De Foundiougne ou de Ndangane (accessible par Tiadiaye et Joal), des pirogues emmènent les visiteurs à travers les marigots et les îles du Saloum ainsi qu’à la pointe de Sangomar.
Dans les îles de Guissanor et de Guior, les villages de Dionewar et de Niodor, occupés par les pêcheurs niominka, sous-groupe ethnique des Sérères, ont conservé leurs traditions, en particulier leur croyance dans les génies de la mer. Parc national du delta du Saloum Aménagé sur 73.000 ha, le parc comprend des îles enfouies sous la mangrove (forêts aquaphiles de palétuviers) et la pointe de Sangomar et ses plages de sable où vivent de nombreuses colonies de tortues de mer. C’est l’habitat idéal pour une très grande variété d’oiseaux : flamant rose, pélican, sterne caspienne, goéland railleur, mouette à tête grise, balbuzard, héron goliath, aigrette des récifs, etc.
Des singes (colobes bai, singes verts et singes rouges) peuplent également le parc ainsi que des antilopes (cobes des roseaux, guibs harnachés), des phacochères (le sanglier d’Afrique), des hyènes, des chats sauvages et des panthères. Très craintifs, les lamantins (sirènes de l’Antiquité ou « mamy ouata ») vivent aussi dans ces marigots ainsi que des dauphins et quelques crocodiles.
A Sokone (47 km au sud de Kaolack, sur la N5) et à Toubacouta (66 km), se trouvent hôtels et campements disposant de pirogues à moteur pour pratiquer la pêche à la traîne ou se promener dans les bolons du Siné-Saloum. Depuis les embarcadères s’explorent les nombreux bras de mer poissonneux regorgeant de barracudas, carpes rouges, carangues, raies, guitares et pastenagues, mérous bronzés (thiof) et capitaines.
Les campements sont réputés auprès des pêcheurs sportifs et des gourmets. La faune ailée abonde : martins-pêcheurs, hérons goliath, aigrettes, hérons cendrés, pélicans, flamants roses, sternes, etc.
Les populations environnantes sont également très intéressantes : Niominkas des îles du Saloum et Socés, parents des Mandings, dans les îles Bétanti.
Musulmans pour la plupart, ils vivent à la fois de la pêche traditionnelle, de la récolte des coquillages, de l’agriculture (riz et mil) ou encore du sel des tanns et de la fabrication de briques à partir des coquillages.
Les beaux villages de Ngadior (îles du Saloum), de Diofandor (île Poutake) ou l’île aux coquillages de Diorom Boutak se joignent en pirogues. Fouillée par des archéologues, cette dernière butte de coquillages accumulés par les hommes d’une civilisation inconnue (VIIe-XIIIe siècles) a livré des tombes, des poteries anciennes, des perles et des parures. Autres îles à voir : les Îles aux oiseaux et les Îles aux bœufs, aux avant-postes en mer des îles Bétanti. Sur la terre ferme, les visites aux plantations d’anacardiers (arbres produisant la noix de cajou) de Sokone et au marché du dimanche de Touba Mouride méritent le détour. Autre curiosité du Siné-Saloum : les mégalithes.
La région compte plus de mille cercles de pierre qui auraient été édifiés par une civilisation inconnue aux VIIe et VIIIe siècles. Pour les voir, Kaolack sert de plaque tournante vers :
– l’est, le long de la N1, Kaolack-Kaffrine-Koungheul : site mégalithique de Malène-Hodar, près de Kaffrine, et plusieurs cercles de pierres au sud de Koungheul (à Keur Ali Lobé et Diam-Diam),
– le sud, peu après Nioro du Rip sur la N4, tout près de la frontière gambienne : au sud-est de Niora se trouvent les sites mégalithiques de Kabakoto, Kaymor, Garan et Payoma mais surtout l’extraordinaire ensemble de Dialloumbéré, près de Siné Ngayène, qui compte cinquante-quatre cercles de pierres dont certains formeraient la « tombe du roi » et la « tombe de la mère du roi », tumulus qui servaient de tombes collectives et où les archéologues ont trouvé des corps ainsi que des armes et des bijoux.
Certaines de ces pierres mégalithiques ont la forme de lyre. Une d’entre elles a été transportée à Dakar.