Un pays largement islamisé

 
Sur l'Ile de Fadiouth © ho visto nina volare

Sur l’Ile de Fadiouth © ho visto nina volare

L’islam est la religion majoritaire du Sénégal et de la Gambie (plus de 90% de la population est musulmane). Le reste est surtout animiste (Diolas de Casamance, Bassaris et Coniaguis du Sénégal oriental). 

Implantées depuis le siècle dernier, les missions chrétiennes ont surtout un rayonnement chez les Lébous de la presqu’île du Cap-Vert et de l’île de Gorée ainsi qu’en milieu sérère de la Petite Côte (Joal-Fadiouth) et chez les Diolas de Casamance. En Gambie, 10% de la population est anglicane. Comme la très grande majorité des musulmans du monde, les fidèles sénégalais sont des sunnites. 

Ils pratiquent les rites malékites très répandus en Afrique noire et au Maghreb. Bien qu’ils appartiennent au courant traditionaliste de l’islam (le sunnisme vient de « sunna », tradition), les musulmans sénégalais ne sont ni intégristes ni fondamentalistes. L’islam noir incorpore en général beaucoup d’éléments locaux dans la pratique de la foi. 

Un islam d’Afrique noir

Comme tous les musulmans, les fidèles sénégalais suivent les préceptes du Coran, acceptent la soumission à Allah et honorent le prophète Mohamed. Dans son dogme, l’islam est une religion sans clergé, sans intermédiaires entre les hommes et Dieu. Mais au sud du Sahara, la religion révélée s’est coulée dans les coutumes négro-africaines. 

La croyance en Allah (Yalla) a recoupé celle du dieu créateur des mythes païens : Mohamed (Mamadou ou Amadou) s’est trouvé tout naturellement en position d’inspiré comme les initiés des religions traditionnelles. C’est ainsi que des « guides », instruits dans les principes de l’islam, ont remplacé les devins guérisseurs.

Ces marabouts, de saints hommes, se sont placés sur le même terrain que les sorciers : confection d’amulettes (le plus souvent des versets du Coran dans une gaine de cuir), de gris-gris, de potions, etc. La confrérie a remplacé les sociétés secrètes. Son chef, le khalife, est l’envoyé de Dieu, sa personne est sacrée et suivre ses indications amène le salut.

Les confréries de l’islam sénégalais

L’islam au Sénégal est organisé en confréries dont les plus importantes sont celles des tidjanes et des mourides (suivies par les qadris, les layènes et les hamallistes). 

Mosquée de la Divinité, à Dakar © Jeff Attaway

Mosquée de la Divinité, à Dakar © Jeff Attaway

La confrérie des tidjanes a été fondée vers 1765 par Si Ahmed Tidjani à Fès, au Maroc. El Hadj Malick Sy, un religieux cultivé, l’a propagée au Sénégal où elle a peu à peu conquis les élites du pays. Moins organisés que les mourides, les tidjanes constituent néanmoins la première confrérie du pays par le nombre d’adeptes. 

Ceux-ci accordent une place de choix à l’éducation et à la culture. Les tidjanes organisent un grand pèlerinage, le gamou, qui commémore la naissance du prophète Mahomet et se tient tous les ans dans leur centre religieux de Tivaouane, au nord de Dakar. Les mourides jouent un rôle de premier plan dans le pays, tant au niveau politique qu’économique. Les mourides (les aspirants, en arabe) sont les disciples du marabout Amadou Bamba. Ce sage, né dans la région du Kayor vers 1850, étudia la théologie en Mauritanie. 

De retour dans son pays, son audience ne cessa de grandir au point d’inquiéter les autorités françaises qui décidèrent de l’exiler en 1895 au Gabon. Cet épisode et son retour d’exil triomphal sont très souvent représentés dans les peintures murales et sur verre. Après la mort d’Amadou Bamba, en 1927, le mouridisme se développa très rapidement autour d’une valeur sacrée : le travail. Les mourides propagèrent la culture de l’arachide au point de produire aujourd’hui près des deux tiers de la récolte nationale. Ils occupent également une place de choix dans le secteur des transports et dans le commerce de gros. Cette confrérie, très structurée, s’organise autour d’un khalife, descendant direct d’Amadou Bamba, et de plusieurs dizaines de grands marabouts. 

Certains d’entre eux, parfois surnommés les « marabouts Cadillac », ont une fâcheuse tendance à exploiter le travail de leurs talibés – disciples – qui leur versent une partie importante de leurs revenus. Les mourides, réputés pour leur sens du travail, comptent un sous-ordre, les baye-fall qui constituent le service d’ordre de la confrérie. 

Les baye-fall doivent leur nom à Ibra Fall qui fut un fervent serviteur d’Amadou Bamba. Ces fidèles, facilement reconnaissables à leurs nattes rasta et à leur grand bâton, ont une pratique très contestée de l’islam. Amadou Bamba ayant, selon la légende, exempté son fidèle serviteur de jeûner et de prier, les baye-fall s’abstiennent bien souvent de pratiquer ces rites. Malgré cette curieuse pratique religieuse, leur rôle s’avère très important, en particulier dans le maintien de l’ordre lors du grand magal (commémoration, en wolof). Cette fête, la plus importante du pays, se tient environ quatre mois et demi après la fin du ramadan. 

Elle célèbre le départ en exil d’Amadou Bamba et compte autant pour les fidèles qu’un pèlerinage à la Mecque. Pour cette fête, toute l’activité du pays s’arrête et des centaines de milliers de Sénégalais accourent à Touba, capitale des mourides. Pour obtenir la baraka (bénédiction) des marabouts, les fidèles n’hésitent pas à dilapider des sommes importantes économisées parfois depuis des mois. 

La confrérie des mourides joue également un rôle politique très important en servant d’intermédiaire entre le pouvoir et la population. Après avoir appelé à voter pour Diouf en 1988, la confrérie intervient dorénavant de manière plus discrète mais elle peut toujours compter sur le pouvoir pour obtenir prêts et aides. 

Les Lébous de la presqu’île du Cap-Vert appartiennent surtout aux layènes, une confrérie fondée par Seydina Limamou Laye et dont le centre religieux est Yof dans la presqu’île du Cap-Vert. Enfin, peu nombreux, les hamalistes sont dispersés dans l’est du pays. Ils ont pour centre religieux Nioro, au Mali, et pour fondateur Cheikh Hamallah. 

Lire la suite du guide