A l’aube du troisième millénaire, la Chine n’en finit pas d’étonner. Tout à fait éveillée, elle est en pleine métamorphose, mutante et diverse au pouls de ses villes géantes, immémoriale dans ses espaces sauvages.
Economie
C’est, avec le développement des TIC (technologies de l’information et de la communication), le secteur des mutations les plus spectaculaires. En vingt ans, les dirigeants ont redressé la barre d’un pays exsangue à la fin de l’empire, puis à genoux après la guerre civile et les folies des années Mao. De 1978 à 1988, ils ont engagé une série de réformes en faveur du libéralisme : ouverture aux investisseurs étrangers, libéralisation des prix et décentralisation. Dans les années 1990, on parlait déjà de miracle chinois quand le pays passa à un taux de croissance à deux chiffres. Aujourd’hui le cap de sa croissance annuelle est maintenu au-dessus des 9 %. Mais il a creusé dans la Chine communiste des inégalités considérables. En signant, en avril 2000, un protocole d’accord relatif à son adhésion à l’Organisation mondiale du commerce, elle poursuit son mouvement d’insertion dans l’économie mondiale.
L’agriculture
En démantelant les communes populaires au début des années 1980, Deng Xiaoping avait fait des ruraux les premiers bénéficiaires de ses réformes. Aujourd’hui, le secteur industriel est devenu le principal moteur du décollage économique. La majorité de la population active ne travaille plus à la campagne (46 % sur 744 millions), le secteur agricole est en perte de vitesse et ne représente plus que 15 % du PIB. Grevés d’impôts, soumis aux prébendes des fonctionnaires locaux, trois quarts des paysans vivent aujourd’hui avec un revenu proche du seuil de pauvreté. Même si le travail intensif et le parti-pris d’une production agricole à valeur ajoutée devrait permettre d’exporter davantage et d’augmenter le revenu paysan, l’adhésion à l’OMC, avec l’ouverture à la concurrence internationale et la baisse des tarifs douaniers métamorphose la Chine en un ogre importateur de produits agricoles.
L’industrie
Premier secteur d’activité avec 51 % du PIB, elle connaît un ensemble de réformes de fond avec le renversement des priorités de l’industrie lourde à l’industrie légère et la reconversion des grandes entreprises publiques. Dans le secteur d’Etat, les entreprises sont invitées à renouer avec le profit depuis la décennie 1990. Inexistant au début des années 1990, le secteur privé a quadruplé sa production depuis 1998, avec une productivité deux fois supérieure à celle des entreprises d’Etat et une participation pour les trois quarts aux exportations chinoises. En 2001, Jiang Zemin a consacré les entrepreneurs privés en leur donnant la possibilité d’entrer au Parti Communiste.

Chine – Enfants © tangka
Institutions politiques et administratives
Le territoire chinois est découpé en 30 circonscriptions : quatre municipalités urbaines (Pékin, Shanghai, Tianjin et Chongqing), 22 provinces et cinq régions autonomes. Les premières sont dotées de maires, les deuxièmes de gouverneurs et les troisièmes de présidents, tous assistés d’assemblées élues pour cinq ans et doublées de comités du Parti, placés sous l’autorité directe du pouvoir central. Sous leur juridiction, on trouve encore des circonscriptions administratives, villes, préfectures et départements autonomes.
Les JO 2008, consécration d’une reconnaissance internationale
La capitale de la Chine a été choisie en 2001 par le Comité international olympique (CIO) pour organiser les prochains jeux Olympiques et Paralympiques d’été qui se dérouleront du 8 au 24 août 2008. Dès l’annonce du résultat, des milliers de Chinois sont descendus dans les rues pour scander en chœur « Pékin, gagnant ! ». Jusque tard dans la nuit et sur fond de feux d’artifice et de klaxons, la foule a convergé vers la place Tian’an men, le monument du Millénaire et la Grande Muraille de Chine. De son côté, la capitale du pays le plus peuplé de la planète s’est empressée de célébrer l’événement en apposant affiches, néons et calicots sur l’air de « Pékin Aoyunhui 2008 ».
Population
Depuis deux mille ans, la Chine représente le quart de l’humanité. Elle lance tout juste son prochain recensement sur fond d’incertitudes. Tout a été mis en œuvre pour ne pas dépasser le chiffre de 1,6 milliard d’habitants en 2020 depuis le lancement de la politique de l’enfant unique en 1978. Strictement appliquée en ville, elle est plus fluctuante à la campagne et surtout au sein de la « population flottante » des dizaines de millions de ruraux en quête d’embauche. Les autorités locales ont déjà découvert un pourcentage inquiétant d’« enfants fantômes » jamais recensés… Enfin, la répartition du peuplement est loin d’être homogène, les neuf dixièmes étant concentrés sur seulement un sixième de la surface du pays, principalement autour des pôles économiques et urbains de la Chine orientale.
Les groupes ethniques
La bannière rouge de la République populaire de Chine est frappée d’une constellation de cinq étoiles, une grosse représentant le Parti communiste chinois et quatre petites pour les cinq nationalités reconnues dès la fondation de la République : les Han, les Mandchous, les Mongols, les Tibétains et les Hui (musulmans de Chine).
Ecrasante majorité de la population, les Han désignent le peuple chinois, en référence aux dynasties impériales qui régnèrent sous ce nom de 206 av. J.-C. à 220 ap. J.-C. Etre han, c’est appartenir à la culture chinoise, être le dépositaire d’une tradition plusieurs fois millénaire.
Or 6,7 % des habitants de la Chine sont non-han, y compris les nationalités déjà citées. Derrière ce faible pourcentage se cachent quelque 400 groupes ethniques qui parlent 55 langues différentes, formant les 55 « nationalités minoritaires » du pays. Cinq d’entre elles forment une large part, mais non la majorité, de la population des régions autonomes (Mongolie intérieure, Xinjiang, Guangxi, Ningxia et Tibet), établies entre 1947 et 1965 à la périphérie des provinces chinoises. Seuls quelques groupes dépassent les 5 millions d’individus : les Zhuang du Guangxi, les Ouïghours du Xinjiang, les Hui concentrés au Ningxia mais présents dans plusieurs provinces, les Miao et les Yi du Sud-Ouest. Certains sont à peine plus de 1 000. Eleveurs des plateaux ou riziculteurs des vallées, leurs modes de vie sont très divers, de même que leur degré de sinisation.
La Chine en cinq familles
Le critère linguistique étant déterminant dans l’identification des nationalités minoritaires, voici un petit tableau des cinq grandes familles de langues parlées par les peuples de Chine.
Les peuples altaïques
Les différents peuples de langues turques (kazakh, ouïghour et kirghiz) vivent dans les zones semi-désertiques de l’Asie centrale chinoise. Ils sont les descendants de grands fondateurs d’empire, les Mongols et les Mandchous des steppes du Nord-Est et du Nord.
Les Tibéto-Birmans
Dispersés dans le grand Sud-Ouest, une quinzaine de peuples parlent les langues de ce groupe. Les pasteurs tibétains sont moins nombreux que les Yi et leurs cousins (Hani, Lisu, Naxi, Lahu, Bai, Jinuo), constellation de peuples proches par la langue et la culture, établis sur les hauts plateaux qui suivent les chaînes de montagnes du Yunnan et du Guizhou. Aux confins de la Birmanie et de la Chine, le long des cours supérieurs du Mékong et de la Salouen, vivent les petites populations des Nu, des Dulong, des Jingpo et des Achang.
Les Austro-Asiatiques
Cousins des Khmers du Cambodge, les Wa, Bulang et Deang forment de petites communautés éparpillées à l’ouest du Yunnan, au voisinage du Triangle d’or.
Les Miao-Yao
Les populations de langue miao-yao sont sans doute des aborigènes du centre ou du nord de la Chine ancienne qui migrèrent au sud du Yangzi jiang en des temps lointains. Ils comprennent une dizaine d’ethnies apparentées, rassemblées aujourd’hui en deux nationalités. Les Miao et les Yao ont en commun une extraordinaire richesse vestimentaire qui puise dans toutes les ressources de l’art textile.
Les Taï-Kadaï
Riziculteurs de tradition, ils s’étendent sur la plupart des plaines, des plateaux et des vallées du sud de la Chine et de la péninsule indochinoise. Cet ensemble ethnolinguistique, pour considérable qu’il soit, n’a donné lieu en Chine qu’à neuf nationalités officielles, certaines totalement sinisées : les Buyi, les Zhuang, les Dai, les Dong, les Shui, les Mulam, les Maonan, les Gelao et les Li.
Religions
Eradiquée au plus fort des années de la Révolution culturelle, la religion a retrouvé sa place dans le quotidien des Chinois.
Un parti, 70 millions de membres et 1,3 milliard d’individus
En mars 2003, Hu Jintao est devenu le nouveau numéro un du pays, cumulant les fonctions de secrétaire général du Parti et de chef de l’Etat, tandis que le premier ministre Zhu Rongji laissait sa place à Wen Jiabao. Ce rajeunissement des équipes dirigeantes marquerait-il la fin du règne de Jiang Zemin et de sa « bande de Shanghai » ? Sur le papier, oui. Dans les faits beaucoup moins, car Jiang Zemin ne quitte qu’à moitié le pouvoir en restant chef des armées et ses protégés, casés aux postes clés de la direction, lui permettent de continuer à « régner derrière le rideau », selon une solide tradition impériale. Beaucoup moins médiatisé, mais toujours ancré dans l’héritage socialiste, le Bureau politique, désormais composé de neuf membres, demeure le cerveau du régime.
Les trois enseignements
Confucianisme, taoïsme, auxquels s’ajoute une doctrine venue de l’Inde, mais totalement sinisée, le bouddhisme, composent l’héritage du passé. Le premier, après avoir été longtemps la clé de voûte des cultes officiels, continue à régler une certaine morale sociale. Le deuxième a légué ses pratiques physiques (diététique, anatomie, exercices respiratoires) et spirituelles (méditation). Le troisième, en s’appuyant sur les notions de salut et de délivrance, a nourri les croyances en l’au-delà.
Le bouddhisme s’est diffusé en Chine à la fin du Ier siècle, sous la forme du Mahayana ou Grand Véhicule (de salut). Cette doctrine met l’accent sur les vertus de compassion et de sagesse. Elle a donné lieu à plusieurs écoles de pensée, dont le chan, plus connu sous son nom japonais, le zen. Parmi les bodhisattvas, « êtres d’éveil », intercesseurs entre Bouddha et les hommes, Wenshu, Puxian et Dizang occupent une place de premier plan aux côtés de Guanyin, bodhisattva de la compassion universelle.
Le lamaïsme est une forme du bouddhisme particulière aux populations tibétaines et à la Mongolie intérieure.
Forgé sur le nom de son initiateur, Confucius, le confucianisme doit aussi beaucoup à un philosophe du IVe siècle av. J.-C., Mengzi ou Mencius. Il contribua à la diffusion de la pensée confucéenne en la rendant plus pénétrable et se fit le champion de son interprétation humaniste. Norme des rites officiels et du bon gouvernement, le confucianisme devint un code moral, élargi à l’ensemble de la société, avec la naissance du courant néo-confucianiste au Xe siècle.
Le terme de taoïsme a été formé à partir du mot « dao », la « voie », clé de voûte de la pensée chinoise ancienne. Cette « voie », sur laquelle chacun devait s’engager pour réussir sa vie, était perçue différemment par les confucéens et par les taoïstes, ces derniers lui donnant volontiers un sens mystique et naturaliste. Le yin et le yang sont les concepts les plus anciens. Principe masculin lié au ciel, le yang est activité, lumière et chaleur. Principe féminin associé à la terre, le yin est repos, obscurité et humidité. Le « taiji », « faîte suprême », est le diagramme représentant leur union, sous la forme d’un cercle divisé par un S en un côté noir (yin) et un côté blanc (yang).
La religion populaire
Les trois enseignements cohabitent sans s’opposer. En parallèle, il existe tout un monde de dieux intercesseurs qui défient l’étiquetage. En Chine, les images des dieux, des héros et des immortels sont d’abord vénérées de manière très pragmatique pour leur efficacité. Le panthéon populaire n’est pas exclusivement masculin : des temples sont dédiés à Mazu sous les traits de la Dame céleste, de la princesse des Nuages bigarrés, fille du Taishan, ou de Chang’e, qui vit dans la lune… Toutes sont de puissantes protectrices. Au cours des miaohui, « réunions de temples », qui jalonnent le calendrier lunaire, les Chinois se souviennent de l’histoire de leurs dieux locaux, du sol ou du clan, et partagent avec eux le plaisir d’une pièce d’opéra présentée par une troupe d’acteurs ambulants.