Casablanca

Grande Mosquée de Casablanca
Ville moderne, capitale économique et financière du Maroc, principal port, premier centre universitaire, Casablanca impressionne par son dynamisme. Le prix à payer de cette vitalité est une urbanisation sauvage et galopante, les quartiers luxueux contrastent violemment avec la pauvreté des bidonvilles dans ce périmètre urbain plus étendu que Paris. Pour administrer cette ville tentaculaire et disparate il a fallu la diviser en une super-préfecture et six préfectures.
Casablanca dans l’histoire
Contrairement aux autres villes marocaines, Casablanca est de fondation récente. Il existait bien sur la colline d’Anfa, un petit village berbère du même nom mais, adonné à la piraterie, il fut attaqué et rasé par les Portugais en 1468. La ville renaît au XVIIIe siècle sous le nom de Dar el Beïda, c’est-à-dire la maison blanche, Casa Blanca pour les Espagnols. Au XIXe siècle, les échanges commerciaux avec l’Europe favorisent son développement économique. Dès 1862, la compagnie Paquet exploite la ligne Marseille-Casablanca et des négociants européens viennent s’y installer. En 1906, une entreprise française obtient la construction du port artificiel dont les incidents sur le chantier provoquent l’intervention française. En 1912, Lyautey, le résident général, décide d’en faire la capitale économique du protectorat. Les plans de la nouvelle cité sont tracés par l’architecte et urbaniste Henri Prost. La toute nouvelle mosquée Hassan II et le Casablanca Trade Center en cours d’achèvement s’intègrent dans cette continuité d’innovation architecturale qui caractérise la plus grande ville du Maroc.
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La ville moderne se compose en grands boulevards qui convergent vers la place des Nations- Unies. Vers l’est, le boulevard Mohamed-V est bordé de magasins luxueux, vers le nord le boulevard Houphouët-Boigny s’anime de bazars colorés, au sud l’avenue Hassan II conduit au centre administratif de la ville. La plupart des bâtiments coloniaux méritent un coup d »il : l’hôtel de ville, la poste, le palais de justice, allient la tradition hispano-mauresque à l’art nouveau. Sur la place Mohamed V, ancienne place de France, se dresse la statue équestre du maréchal Lyautey ; la cathédrale du Sacré- C’ur en bordure du parc de la Ligue Arabe (ancien parc Lyautey) est éclairée par des claustras de béton. La médina contraste étrangement avec le quartier moderne. En partie entourée de remparts, elle demeure très authentique. La nouvelle médina construite au sud de la ville appelée aussi quartier des Habous fut édifiée en 1923 pour tenter d’absorber les bidonvilles qui surgissaient déjà à la périphérie de la ville. Les architectes respectèrent à la fois le style et les architectures traditionnelles du Maroc et les règles d’urbanisme moderne. C’est un quartier très vivant et plein de charme, où la Mahakma du Pacha, qui abritait autrefois les séances du tribunal et aujourd’hui une des préfectures de Casablanca, a fait appel pour sa décoration à toutes les ressources de l’art marocain, réparties sur ses 64 salles. La mosquée Hassan II, achevée en 1993, se situe face à la mer en bordure de la route de la corniche. C’est la plus grande mosquée du monde après celle de La Mecque. Conçu par un architecte français, cet édifice construit en partie sur l’eau peut accueillir 20 000 fidèles à l’intérieur et 80 000 sur l’esplanade qui la prolonge. Le minaret culmine à 200 mètres au-dessus de la mer. L’ensemble, financé en grande partie par le peuple marocain dans le cadre d’une souscription nationale, comprend aussi une medersa, une bibliothèque, un musée et des salles de conférences. A l’audace architecturale s’associe le savoir faire des artistes marocains qui ont décoré ce monument : fresques, zelliges, bois peint et sculpté, stucs, arabesques, calligraphies… réalisés par les meilleurs artistes venus de tout le pays. Il est possible aux non musulmans de visiter ce lieu de culte en suivant une visite guidée tous les jours sauf le vendredi, de 10 h à 14 h. On entre dans l’édifice par une de ses 25 portes, à l’intérieur la nef est soutenue par 76 piliers. Alliance de la tradition et de la modernité que le Maroc souhaite incarner, le plafond en bois de cèdre sculpté et peint peut s’ouvrir. Dans la salle de prière les femmes prennent place dans les mezzanines, où elles sont dissimulées aux regards par les moucharabiehs, ces grillages de bois sculptés. La direction de la Mecque est indiquée par le Mirhab, mais lorsque la nuit est tombée, un puissant rayon laser parti du minaret, s’élance dans les ténèbres vers les lieux saints. La station balnéaire d’Aïn Diab dispose d’une agréable plage de sable fin bordée de villas, hôtels et restaurants. A 3 Km dans le prolongement de la côte se trouve le marabout de Sidi Abderrhamane, accessible seulement à marée basse. On peut revenir en ville par le quartier résidentiel d’Anfa aux grandes avenues fleuries et aux villas spacieuses enfouies sous la végétation
Agadir

Agadir – Plage
Agadir dans l’Histoire
C’est en 1505 que les lieux entrent dans l’histoire avec la construction, par un gentilhomme portugais, d’un fortin nommé Santa Cruz de Cap de Gué, un peu au nord de la ville actuelle. Vendu en 1513 au roi de Portugal, le fort devient le centre d’une région soumise à l’autorité portugaise tandis que se développe le port, fréquenté par les négociants européens. Après plusieurs tentatives, le sultan saadien Mohammed ech Cheikh s’en empare en 1541. Sous les Saadiens, Agadir connaît une réelle prospérité, le port exporte du sucre de canne, des dattes, de la cire, des peaux brutes, de l’or…, et reçoit des produits européens. L’extinction progressive de la culture de la canne à sucre, à partir du milieu du XVIIe siècle marque le début de son déclin. En 1760, Sidi Mohammed ben Abdallah lui porte un nouveau coup en fermant le port au trafic européen et en fondant celui concurrent d’Essaouira. Au début du XIXe siècle, la ville n’est plus qu’un village assoupi. En juillet 1911, la baie d’Agadir est le théâtre d’un épisode de la rivalité franco-allemande sur le Maroc. Le navire de guerre Panther vient croiser devant la ville, l’incident fut tel qu’il faillit déclencher une guerre entre les deux pays. Dans les années 1930, Agadir participe à la légende de l’aéropostale. C’est une escale sur la ligne, avant celles de Cap Juby (Tarfaya) et Villa Cisneros (Dakhla) qui vit se poser Mermoz et Saint-Exupéry. Le 29 février 1960 est un jour d’apocalypse que la ville actuelle, trop neuve ne permet pas d’oublier. Pour la reconstruction le roi Mohamed V fait appel à la solidarité nationale par un impôt spécial qui permet de trouver le financement nécessaire.
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Toute blanche, bien conçue et aérée, la nouvelle ville d’Agadir est dénuée du charme des anciennes cités marocaines. A partir du centre-ville se développe une agglomération étendue et sans attraits dont les trop longues avenues n’invitent guère à la flânerie. Le principal intérêt de la ville est sa belle et longue plage de sable fin. La Kasbah est le plus beau site d’Agadir, véritable nid d’aigle dominant l’océan perchée à 236m. Elle offre une vue surprenante sur la ville et ses installations portuaires ou industrielles. La Kasbah fut édifiée en 1540 par Mohammed ech Cheikh pour servir de base d’attaque contre la forteresse portugaise. Craignant un retour offensif des Portugais, Moulay Abdallah la rebâtit en 1752 et y installa une garnison. Une inscription en arabe et en hollandais rappelle que les Pays-Bas y établirent un comptoir en 1746. L’esplanade chaotique qui occupe l’intérieur des remparts abritait autrefois l’un des quartiers les plus peuplés de l’Agadir d’avant le séisme ; rien n’a pu en être sauvé. Le port ne se visite pas, c’est un port de pêche très moderne où les poissons sont immédiatement surgelés ou mis en conserves et un port de commerce. Le centre-ville est parcouru par les avenues Général-Ketani, Hassan-II, des F.-A.-R., du Prince-Moulay-Abdallah et du Prince-Héritier-Sidi-Mohammed. Entre ces artères s’intercalent des zones piétonnières bordées de restaurants, boutiques et magasins d’artisanat qui forment le c’ur animé de la ville. Il est séparé de la zone touristique où sont implantés la plupart des hôtels par l’avenue Mohamed-V. Lorsque la ville dut être entièrement reconstruite, le gouvernement marocain fit appel à des architectes novateurs qui conçurent des bâtiments publics assez remarquables : la poste principale dont la façade se présente comme un pan de béton brut, incliné vers l’avant et l’Hôtel de Ville, situé à côté de la poste, plus classique, sont les ‘uvres de J.-F. Zevaco. Le tribunal est signé par E. Azagury et s’impose, lui aussi, comme l’un des édifices les plus intéressants du nouvel Agadir. A voir aussi le Théâtre en Plein Air. Le Musée Municipal présentant la collection Bert Flint d’objets traditionnels du sud marocain a malheureusement fermé.
Marrakech

Marrakech – Vue générale © susannah
Marrakech est la plus vivante et la plus attachante des villes marocaines. De toutes les villes makhzen, c’est elle qui a donné son nom au royaume tout entier. Fondée par les Almoravides, troisième ville du royaume, son influence s’exerce au-delà de la barrière montagneuse du Haut-Atlas, jusqu’aux confins sahariens. Elle est aussi la cité la plus berbère du pays et cette originalité particulière s’exprime par l’intermédiaire des bateleurs de la place Jemaa el Fna.
Marrakech dans l’histoire
A l’origine, Marrakech était un camp militaire implanté vers 1070 dans la plaine du Haouz par le chef almoravide Abou Bekr. Il fit construire une kasba, le Qasr el Hajar, le château de pierre, dont les vestiges ont été retrouvés à proximité de l’actuelle Koutoubia. Appelé au Sahara où venait d’éclater une révolte, Abou Bekr confia, en janvier 1071, confia à son cousin Youssef ben Tachfin le soin de gouverner les nouvelles possessions almoravides. Devenu pratiquement le seul maître de Marrakech, Youssef ben Tachfin fonda immédiatement une grande mosquée dont il ne reste rien, puis il recruta en Espagne un corps de mercenaires chrétiens et, au Soudan, deux mille soldats noirs, pour constituer sa milice personnelle. Lors du retour d’Abou Bekr, en 1072 ou 1073, il était trop fermement installé pour rétrocéder à son cousin le gouvernement qui lui avait été confié. Ayant étendu son autorité sur le nord du Maroc, Youssef ben Tachfin, franchissant le détroit de Gibraltar, alla ensuite s’assurer la possession de la plupart des principautés musulmanes de la péninsule ibérique. Marrakech profita largement de ses conquêtes, non seulement par l’apport de riches butins, mais aussi grâce à l’établissement de relations commerciales avec l’Espagne notamment, bien que la ville de Fès eût, semble-t-il, la préférence de Youssef ben Tachfin. À la mort du grand conquérant en 1106, son fils Ali ben Youssef, souverain guerrier pieux et lettré, entreprit, par de grands travaux, de donner à Marrakech son visage de capitale d’un empire qui s’étendait du Sahara à l’Ebre, de l’Atlantique à Alger. La ville s’adonna au commerce avec toutes les provinces de l’empire et son artisanat, en particulier la maroquinerie, se développa. Lorsque la dynastie almoravide céda la place aux intransigeants Almohades, Marrakech, peu éloignée du foyer spirituel des nouveaux maîtres du Maroc, fut la première victime de leurs attaques dès 1121. Après un premier échec aux portes de la ville en 1128, Abd el-Moumen partit à la conquête du nord du Maroc ; il attendit 1146, pour remettre le siège devant Marrakech. La ville fut prise d’assaut l’année suivante et aussitôt mise à sac. Les Almoravides furent exterminés, leurs sanctuaires détruits, selon l »uvre de purification exigée par Ibn Toumert avant sa mort. Se parant du titre de « prince des croyants », Abd el-Moumen s’installa dans le palais d’Ali ben Youssef. Il édifia la Koutoubia et créa de grandes citernes et un vaste jardin. Son successeur, Abou Yacoub Youssef (1163-1184), agrandit sa capitale et aménagea également un grand jardin, qui fut peut-être l’actuel agdal. Yacoub el-Mansour (1184-1199), le fils aîné d’Abou Yacoub Youssef, était un infatigable bâtisseur. À partir de 1185, il dota la ville d’une nouvelle kasba qui ne comptait pas moins de douze palais, des jardins, des pavillons, des bassins, une mosquée, un oratoire de plein air pour la prière publique, une kaysariya, un hôpital et une place d’armes où sa cavalerie se livrait à des exercices. L’ensemble était protégé par une enceinte distincte et contribua à l’élargissement de Marrakech vers le sud. L’apogée que connut la ville sous ces trois premiers souverains almohades se manifesta également dans l’industrie et le négoce, par le renforcement des liens avec l’Espagne musulmane ; comme sous les Almoravides, Marrakech attira à cette époque de nombreux savants et poètes, notamment le célèbre philosophe, médecin et savant Averroès. Marrakech souffrit énormément de la faiblesse des derniers souverains de la dynastie, de leurs querelles intestines, de leurs luttes fratricides et des révolutions de palais que les Mérinides mirent à profit en ne s’attaquant à la ville qu’après avoir méthodiquement occupé la région de Fès. Marrakech succomba en 1269 et son conquérant, Abou Youssef Abd el Haqq, n’y séjourna que deux ans, transférant ensuite sa capitale à Fès. Le simple rôle de métropole du Sud marocain ne convenait guère à Marrakech qui tenta à plusieurs reprises de se soulever contre le gouvernement central. En 1554, le prince saadien Mohamed ech Cheikh fit de Marrakech, la capitale de tout son royaume. Après la conquête de Tombouctou en 1591, par son successeur Abou el Abbas el-Mansour, surnommé ed Dehbi, « le doré », Marrakech s’enrichit de magnifiques constructions, décorées de marbre de Carrare. Sous les Alaouites, le siège du gouvernement fut transféré à Fès et à Meknès. De temps à autre, quelques sultans firent toutefois des séjours à Marrakech où ils marquèrent leur passage par d’importants travaux. Moulay el-Hassan (1873-1894) y fut proclamé sultan avant d’être reconnu à Fès. Son fils Moulay el Aziz y séjourna de 1895 à 1901 et le palais de la Bahia fut édifié sous son règne par un de ses vizirs, Ba Ahmed. C’est à Marrakech qu’en 1907, profitant du départ de Moulay Abd el-Aziz, son frère Moulay Abd el-Hafid se fit proclamer sultan du Maroc ; c’est à Marrakech encore qu’en 1912, après l’abdication de Moulay Abd el-Hafid, El Hiba se fit aussi proclamer sultan par ses partisans. Lyautey, dans le but de sauvegarder le patrimoine architectural marocain et de séparer les populations fit venir l’urbaniste Henri Prost qui créa, à côté de la Médina enserrée dans ses remparts, le quartier Guéliz destiné à l’administration et aux fonctionnaires du Protectorat. Henri Prost dessina un plan en étoile aux avenues larges et plantées d’arbres le long desquelles furent bâtis les immeubles et maisons. Les premiers hôtels de luxe furent construits dans le quartier dit de l’hivernage, dont la Mamounia terminé en 1929. Le chemin de fer atteignit la ville en 1928 avec des liaisons vers Casablanca et Rabat. En 1930, Marrakech comptait 195 000 habitants et ne cessait d’attirer vers elle une population croissante. En 1953, avec l’appui du pacha de Marrakech, le gouvernement français tenta de différer l’échéance de la décolonisation et destitua le souverain régnant. Cependant en 1956, la population de la ville accueillit triomphalement, comme dans l’ensemble du pays, le retour d’exil du roi Mohamed-V. Le Glaoui, décédé peu avant l’indépendance après des excuses publiques au roi, ne vit pas sa famille dispersée et ses biens confisqués.

Marrakech – Koutoubia © wseltzer
Visiter Marrakech
Marrakech est une ville vaste et riche aux centres d’intérêts nombreux et variés. Pour tout visiter, il faut y séjourner plusieurs jours. C’est pourquoi les visites sont numérotées de façon à n’en faire qu’une ou deux si l’on ne dispose que de peu de temps. La ville se divise en deux quartiers bien distincts, la médina entourée de remparts et le Guéliz, conçu selon la volonté de Lyautey, hors des murs. Pour circuler, mieux vaut être à pied dans la médina ; en taxi urbain (jaune) et en calèche dans les autres quartiers. C’est vers la médina, dominée par le splendide minaret de la koutoubia que l’on se dirigera en premier lieu.
1 – La Koutoubia et la place Jemaa el Fna
Son haut minaret attire immédiatement le regard. C’est le monument le plus impressionnant de Marrakech. A la fois massif et élancé il s’élève au-dessus de la ville, exemple splendide de l’art hispano-mauresque qui aurait servi de modèle à la Giralda de Seville. La mosquée de la Koutoubia, ou mosquée des libraires (koutoub signifie livres), doit son nom au souk des libraires qui s’étendait à ses pieds au Moyen Age. La construction actuelle fut précédée d’un palais de pierre bâti par Abou Bekr et que le sultan Abd el Moumen fit raser pour le remplacer par une mosquée. L’édifice est inauguré en 1158. L’Almohade entendait ainsi fixer le souvenir de sa conquête mais aussi réaliser avec éclat sa promesse de consacrer de nouveaux sanctuaires après la démolition des mosquées almoravides. Le minaret a sans doute été achevé par son petit-fils Yacoub el Mansour (1184-1189). Mesurant 13 m de côté et 69 m de haut avec le lanternon (77 m jusqu’à la pointe extrême), il comporte un noyau intérieur abritant six salles superposées. La plate-forme est entourée d’un chemin de ronde avec une balustrade dentelée dont les merlons ont 2 m de haut. Le lanternon, qui atteint presque 16 m, apparaît comme un second minaret posé sur le premier. Les quatre boules de cuivre doré fixées à la hampe, et dont la plus grosse atteint 2 m de diamètre, auraient été à l’origine en or. Elles auraient été faites avec des bijoux offerts par l’épouse de Yacoub el Mansour. Pour décourager les convoitises, des génies auraient été commis à la garde de ce trésor et de graves accidents seraient survenus à ceux qui auraient tenté de l’enlever ou même de l’approcher. A côté de la Koutoubia, sur la place Youssef ben Tachfine, dans un simple mausolée chaulé à blanc reposeraient les restes du grand sultan almoravide. En face de la Koutoubia, le Dar Moulay Ali est une belle demeure marocaine de la fin du XIXe siècle, occupée par le consulat de France. La place Jemaa el Fna est véritablement le c’ur vivant de Marrakech, il faut passer plusieurs heures, pour profiter pleinement de l’ambiance, y revenir à différents moments de la journée. Si les bateleurs se succèdent tout au long du jour, c’est particulièrement le soir que l’animation bat son plein, lorsque le soleil commence à décliner. Sur la place, des restaurants aux terrasses hautes constituent, surtout en soirée, les meilleurs observatoires pour embrasser, d’un seul coup d »il, tous les spectacles qui s’offrent à vous. Surtout, la place change de visage au cours de la journée. Le matin c’est un marché aux fruits et légumes en plein air. Toute la production des exploitations agricoles environnantes converge sur la place et les étals de légumes allient le jaune des citrons, à l’orange des carottes, au rouge des tomates et au vert des courgettes et des salades. Aux fruits de saison, les fleurs viennent compléter cette palette. Partout sur la place les marchands de jus d’orange proposent un verre de jus fraîchement pressé. Au milieu du jour la place semble endormie, les marchands ont plié leurs étals et les bateleurs ne se sont pas encore appropriés les lieux. Il faut revenir au milieu de l’après-midi pour profiter des charmeurs de serpents, des dentistes en plein air, des guérisseurs en tout genre, des quincailliers, des diseurs de bonne aventure. Le soir tombé, la place se transforme en un gigantesque restaurant en plein air, avec de longues tables de bois sur lesquelles on sert des hariras brûlantes, des escargots cuits en bouillon ou autre spécialité locale. La fumée des merguez et des brochettes s’élève des braseros et les lumières continuent de briller jusque tard dans la nuit. Le nom de Jemaa el Fna signifierait la « réunion des trépassés » et son origine serait due aux impitoyables exécutions par lesquelles un khalifa du sultan punissait autrefois ses ennemis, ou supposés tels ; on y exposait en effet, à l’occasion, les têtes des exécutés.
2 – Mosquées et Médersas

Medersa Ben Youssef – Marrakech © wonker
Au coeur de la médina la médersa Ben Youssef permet de visiter un bel exemple d’art hispano-mauresque. Pour s’y rendre il faut d’abord traverser les souks. Depuis la place Jemaa el Fna, gagnez la place Bâb Fteuh, à droite s’ouvre la rue principale des souks, la rue du souk Smarine, où des lames de fibrociment remplacent l’ancien treillis de roseaux, dangereusement combustible. Au bout de 300 m, à une fourche en Y, prendre à gauche et, 150 m plus loin, à droite. Vous arrivez alors sur une place où se trouvent la koubba, la mosquée Ben Youssef et, à proximité, la médersa. La mosquée Ben Youssef construite sous les Almoravides a été transformée plusieurs fois, elle apparaît massive et fermant tout un côté de la place sur laquelle elle s’élève. Au-dessus de son toit de tuiles vertes s’élève le minaret à plus de 40 m. Sur la place, protégée par un mur, la koubba restaurée se visite. La koubba el-Baâdiyn, qui date du XIIe siècle a été dégagée du sol en 1948, après huit siècles, en raison de l’élévation du terrain depuis sa construction. Cet enfouissement l’a en quelque sorte protégée et elle reste le seul témoin intact de l’art islamique médiéval de Marrakech. Récemment restaurée, elle se visite, ainsi que les réservoirs souterrains qui l’alimentaient. Emprunter la ruelle sur le côté gauche du lycée, sous le passage couvert se trouve à droite, la belle porte d’entrée de la médersa Ben Youssef. La médersa Ben Youssef est l’un des bâtiments les plus intéressants de Marrakech. Cette école de théologie coranique fut fondée par le sultan mérinide Abou el-Hassan, au milieu du XIVe siècle et entièrement reconstruite en 1564-1565 par le Saadien Moulay Abdallah, qui en fit la médersa la plus importante de tout le Maghreb. Elle offre donc un témoignage de l’art islamique sous les Saadiens. On entre d’abord dans un long couloir au plafond peint. Au fond se trouve exposée une belle cuve d’ablutions exécutée en Espagne. Un vestibule, sur la droite, conduit à la cour intérieure ouverte sur la lumière. Au centre se trouve un grand bassin de marbre reflétant le ciel. Les murs latéraux s’ouvrent par des galeries soutenues par des piliers de bois. Tout cet ensemble est admirablement ouvragé, le bois est ciselé, le plâtre sculpté, les mosaïques harmonieusement composées. En face s’ouvre la salle de prière soutenue par des colonnes de marbre et dont le mirhab est orné de versets coraniques. Elle est éclairée de petites fenêtres au décor ajouré. Depuis le premier étage accessible par les galeries, il est possible de visiter les chambres des étudiants. On en compte plus d’une centaine, semblables à d’austères cellules, ouvrant tantôt sur de petites cours intérieures tantôt sur la médina. Revenez à la mosquée Ben Youssef et suivez au nord la rue Baroudienne, puis la rue Amesfah. Un peu plus loin se remarque, une fontaine monumentale, dite Chrob ou Chouf, Bois et Admire. Elle mérite un arrêt pour son encadrement en bois sculpté abrité des intempéries par un auvent. Près de là se trouve un foundouq accueillant des pauvres. Aujourd’hui ces auberges ont été transformées en habitations. Prenez aussitôt la première à gauche, un passage voûté, prolongé par la rue de Bab Taghzout. Bab Taghzout plus loin, est une ancienne porte de l’enceinte almoravide de la ville. Suite au développement de cette dernière, elle est devenue une porte intérieure. En revenant vers la place Jemaa el Fna, vous passerez devant la petite mosquée de Sidi bou Ameur avant d’atteindre la rue de Bab Doukkala, devant le Dar el Glaoui construit au début du siècle par le pacha de Marrakech. Cette magnifique demeure masquée par de hauts murs ne se visite pas. La rue passe devant la mosquée de Bab Doukkala, construite vers 1557-1558 par Lalla Messaouda, mère du sultan saadien Ahmed el Mansour. Puis devant la fontaine de Sidi el Hassan ou Ali, formée d’un vaste bassin rectangulaire couvert de trois coupoles et financée par un éminent professeur de théologie. Prenez la rue Bab Doukkala sur la gauche, et tournez plus loin, à gauche encore, dans la rue el Mouassine pour vous rendre au mausolée de Sidi Abd el Aziz, fondateur d’une école de pensée islamique au XVIIIe siècle. En sortant du mausolée, reprendre à droite la rue el Mouassine jusqu’à la petite place où se trouve la grande mosquée el Mouassine, érigée entre 1562-1563 et 1572-1573 par le sultan saadien Moulay Abdallah. La fontaine el Mouassine, de belles proportions, fut aménagée en même temps que la mosquée. Le bassin est protégé par des coupoles ornées de stucs, soutenues par des poutres de bois peint et encadrées d’un auvent. Récemment restaurée, elle est protégée par des grilles et malheureusement vidée de son eau… Tourner à droite dans la rue el Mouassine et prendre la rue el Kboui pour aller voir la petite mosquée de Sidi Moulay el-Ksour. Construite sous les mérinides en 1331, elle a par la suite pris le nom d’un des saints de Marrakech, Sidi Abdallah el Ghezouani mort en 1528. De son vivant il était déjà tellement honoré par la population que le sultan de Fès en prit ombrage et le fit incarcérer. La rue el Mouassine ramène place Jemaa el Fna.
3 – Les souks

Marrakech – Souk © kafeole
La promenade dans les souks est une merveilleuse expérience pour le voyageur occidental qui veut bien s’y plier. Dans le prolongement de l’animation qui règne sur la place Jemaa el Fna elle offre une véritable immersion dans un monde de couleurs, d’odeurs et de bruits. Le promeneur entraîné par la foule passera d’une boutique à l’autre, d’un artisan à l’autre. Happé par les vendeurs, il est comme aspiré par le dédale des ruelles couvertes de lattis protecteurs ou d’écheveaux de laines. La foule qui le presse se compose de ménagères affairées, de marchands ambulants, de pères de familles solennels, d’enfants en quête de quelques dirhams à gagner, de mendiants et de marchands ambulants. Tout ce peuple marocain, bigarré et bruyant, issu de toutes les couches sociales vit au c’ur de la médina et se mêle au gré de ses occupations. Bien sûr vous serez sollicités pour acheter, cependant prenez votre temps avant de choisir, comparez et marchandez, enfin ne comptez pas votre temps si vous voulez prendre plaisir à flâner dans les souks. Pour visiter les souks, deux itinéraires sont possibles : le premier au départ de la place Jemaa el Fna et le second par la porte Bab Doukala. Par la place Jemaa el Fna vous accédez à la place Bab Fteuh. En prenant à droite vous arriverez au souk des potiers. Vous y trouverez des plats à tajines, des poteries vernissées et de belles céramiques à décor bleu de cobalt. Sur la gauche, commence le souk Smarine. Le second itinéraire permet d’éviter les guides indésirables qui attendent les promeneurs place Bab Fteuh, vous pouvez entrer dans les souks par la rue Bab Doukkala et la fontaine Mouassine puis revenir vers la place Jemaa el Fna à la fin de votre promenade. La rue du souk Smarine est vouée aux marchands de tissus. Après l’avoir longée sur 150 m environ, une ruelle s’ouvre sur la droite avec des boutiques d’apothicaires, de guérisseurs et des marchands de bijoux de pacotille. Cette ruelle conduit au Rahba Qedima, ancien marché au grain qui fut aussi le marché des esclaves. La petite place très animée est entourée de plusieurs souks : le premier, sur la droite, est consacré aux laines, le second aux peaux de moutons. Les curieux étalages des apothicaires proposent une invraisemblable variété de produits inattendus et sont les fournisseurs des sorciers, guérisseurs ou magiciens. En suivant ensuite le souk el Kebir sur la droite, vous passerez devant le souk des bijoutiers pour arriver à la hauteur des kissarias. Ces galeries couvertes aux beaux plafonds en bois de cèdre, fermées par des portes monumentales, abritent de nombreux magasins d’habillement. Les jeans et vestes de cuir ont remplacé les vêtements traditionnels. Continuez dans la rue du souk el Kebir, où dominent les maroquiniers. Vous atteignez ensuite la rue du souk Cherratine que vous suivez à gauche Au bout de cette petite rue, tournez à gauche dans le souk Smata, caractéristique avec son odeur de cuir et les minuscules échoppes de babouchiers, des piles de babouches jaunes, rouges, vertes ou en cuir naturel s’entassent. A bouts pointus ou ronds lisses ou brodés, pour hommes, femmes et enfants, elles peuvent faire de confortables pantoufles. Arrivé sur une petite place, tournez à droite dans le souk Attarine, puis immédiatement à gauche quelques mètres plus loin pour atteindre le souk des teinturiers. Les écheveaux sont mis à sécher en guirlandes multicolores sur des cannes de roseaux après avoir trempé dans leurs teintures variées. Les colorants naturels jadis utilisés ont fait place aux teintures chimiques mais les chaudrons noirs chauffés au bois continuent d’être utilisés. N’hésitez pas à acheter des pelotes de cette laine grossièrement filée, elle permet de réaliser des pulls over amusants. En continuant la ruelle en pente vous atteindrez la fontaine et la mosquée el Mouassine. À hauteur de la fourche du souk des teinturiers, une ruelle vous conduira dans le souk des Chouaris où l’on tresse les fibres du palmier nain pour fabriquer les paniers et les couffins doubles pour les ânes (chouaris) ; dans ce souk, on sculpte des cuillers et des récipients en bois de citronnier ou de noyer, il se prolonge par le souk Haddadine où travaillent les forgerons. En revenant dans le souk Attarine, vous pourrez vous arrêter dans le souk des cuivres où les artisans façonnent théières, plateaux, lanternes au ciseau, poinçon et marteau. Le retour s’effectue par la rue du souk Smarine qui débouche sur la place Jemaa el Fna.
4 – Tombeaux saadiens, palais el Badi et Mellah

Marrakech – Cimetière juif – Marrakech © Jean & Nathalie
Cette promenade permet de visiter divers monuments royaux de Marrakech qui se présentent comme des oasis de paix au c’ur même de la médina bruissante. Cela peut aussi être l’occasion de s’arrêter au souk des dinandiers proche du palais el Badi et à celui des bijoutiers dans le Mellah. Le palais el Badi est le cadre, une fois par an, du festival de folklore de Marrakech. Si vous êtes en voiture vous pouvez stationner place des Ferblantiers ou sur le parking devant le palais el Badi. Après avoir franchi Bâb Agnaou et tourné à droite pour pénétrer dans l’ancienne kasbah, vous découvrirez, au détour d’une ruelle coudée, le minaret de la mosquée de la kasbah. La mosquée de la kasbah fut construite par Yacoub el-Mansour très probablement en même temps que les autres parties de la kasbah, c’est-à-dire à la fin du XIIe siècle. Mais plusieurs fois restaurée, elle a perdu son cachet médiéval. La façade, longue de 80 m environ, est coiffée de créneaux dentelés. Son minaret s’élève avec légèreté au-dessus du toit. Bien décoré et bien proportionné, il est un des plus intéressants à contempler. Sur la droite de la mosquée, au fond d’une petite impasse, se trouve la porte d’entrée des tombeaux saadiens. Ce lieu ne devint nécropole qu’avec l’inhumation du prince saadien Mohammed ech Cheikh en 1557. Son fils, qui lui avait élevé une koubba, y fut enterré à son tour en 1574. Moulay Ahmed el-Mansour, après y avoir fait inhumer sa mère Lalla Messaouda en 1591, y fit faire de grands travaux d’embellissement. Il y fut naturellement enterré ainsi que ses trois successeurs. Voulant effacer le souvenir de ses prédécesseurs, Moulay Ismaïl fit murer l’entrée. On ne pouvait plus accéder aux tombeaux qu’à partir de la mosquée de la kasba. Les tombeaux furent, pour ainsi dire, « oubliés » jusqu’en 1917, quand le Service des Beaux-Arts et des Monuments Historiques les restaura et ouvrit un accès indépendant de la mosquée. Les tombeaux saadiens sont entourés d’une haute muraille isolant de la kasba deux mausolées. Le premier, le plus remarquable, érigé par Moulay Ahmed el-Mansour, se compose de trois salles. Dans la première salle, se trouve le tombeau du sultan Moulay el-Yazid (1790-1792), de la dynastie alaouite, entouré d’une balustrade de bois sculpté et encadré de tombes d’enfants. En face du mirhab, une porte donne accès à la salle centrale, soutenue par douze colonnes. Depuis une porte extérieure, il est possible de voir la tombe de Moulay Ahmed el-Mansour, le Doré, ainsi que celle de son fils, de son petit fils et de bien d’autres membres de sa famille. La décoration de cette salle est très riche avec sa coupole à stalactites, ses plafonds en bois de cèdre peint et doré, la partie inférieure des murs revêtue de zelliges et la partie supérieure couverte d’entrelacs en plâtre sculpté. La troisième salle abrite des tombeaux d’enfants. Le mausolée situé au centre du jardin est celui de Lalla Messaouda, la mère d’Ahmed el-Mansour. L’ensemble des bâtiments est entouré d’un paisible jardin clos de murs. Revenez à Bab Agnaou et suivez sur une centaine de mètres environ la rue Okba ben Nafaa, qui longe les vieux remparts vers le nord, puis tournez à droite dans l’avenue Houmman el Ftouaki qui conduit à la place des Ferblantiers devant la porte Berrima. Bab Berrima donne accès au quartier de Berrima et au mellah où fut rassemblée la population juive, vers 1558, sur l’ordre de Moulay Abdallah (1557-1574). Passez sous la porte surmontée de tours garnies de nids de cigognes, et longez le mur de droite pour accéder, au fond d’une impasse, entre deux hautes murailles à l’entrée du palais el Badi. Pour tenter d’imaginer la splendeur de ce palais, aujourd’hui en ruines, mieux vaut prendre un guide. Ses ruines servent de cadre au festival annuel du folklore marocain (début juin). Cinq mois après avoir vaincu les troupes portugaises à la fameuse « bataille des Trois Rois », le 4 août 1578, Ahmed el-Mansour décida de se faire construire, à côté de ses appartements privés, un immense palais de réception destiné aux fêtes et aux audiences solennelles. Les travaux, commencés dès la fin de l’an 1578, devaient se poursuivre jusqu’à la mort du souverain, en 1603. On ne sait rien de l’architecte qui en dessina les plans, mais on peut penser qu’il était d’origine andalouse et qu’il sut s’entourer d’artistes européens, notamment italiens car tout le marbre provenait d’Italie. La tradition voulait que ce marbre soit payé poids pour poids en sucre de canne dont le Maroc était un grand producteur. Pour se faire une idée de la splendeur de ce palais, il ne reste plus que les descriptions admiratives des visiteurs de l’époque, car Moulay Ismaïl, jaloux de ce joyau, le fit détruire. La démolition, commencée vers 1696, dura une dizaine d’années ; la plupart des matériaux fut réutilisée pour les palais impériaux de Meknès, mais il n’est guère, dit-on, de cité maghrébine qui n’en reçut quelques fragments. De ce palais où les marbres, les onyx, les riches mosaïques, les plafonds de stuc et les revêtements de feuilles d’or constituaient un décor féerique, il ne subsiste plus aujourd’hui que des pans de murs. Le visiteur accède dans le palais par ce qui était la mosquée. On remarquera le long des murs des alvéoles qui servaient à ranger les babouches. Dans la vaste cour rectangulaire pourvue d’un bassin central, on peut voir encore quatre bassins d’angle, des parterres plantés d’orangers et les ruines imposantes d’anciens pavillons, c’est tout ce qui reste de ce palais qui comptait 365 pièces. Seules les dimensions des vestiges permettent d’envisager la splendeur disparue de l’ensemble. Dans le pavillon du Hammam, on peut encore voir deux baignoires et des canalisations. Le Pavillon qui fait face à l’entrée était celui des réceptions. En arrière, se trouve la salle du tribunal, celle des gardes et la prison souterraine composée de 22 cellules dans lesquelles les prisonniers étaient gardés dans l’obscurité totale. L’entrée principale du palais se trouvait dans le pavillon abritant une fontaine. Revenez à la place des Ferblantiers et prenez à droite l’avenue qui longe d’un côté un cimetière et, de l’autre, l’ancien quartier juif de Marrakech, le Mellah. Ce quartier fondé en 1557 par les Saadiens était entouré d’une enceinte percée de deux portes, l’une ouvrant sur le cimetière actuel, l’autre sur la ville. Ce mellah est resté jusqu’en 1936 le plus important du Maroc, avec 16 000 habitants. Aujourd’hui, c’est un quartier essentiellement musulman, car la majorité de ses occupants sont partis depuis 1956. Ses ruelles tracées à angle droit abritent un souk aux tissus, épices, légumes, bien achalandé et paisible. Avant le coude de la rue qui longe le mellah, sur la petite place face au palais de la Bahia, s’ouvre à gauche le souk des bijoutiers, autrefois entièrement tenu par les juifs. On y trouve surtout des bijoux en or. En tournant à droite, on arrive à la Bahia.
5 – Palais princiers

Palais de la Bahia – Marrakech © Wrote
Bien que récents, ces deux palais font partie des joyaux de la ville. Les deux sont de riches demeures princières, qui rendent compte de l’art de vivre des grandes familles de Marrakech, au siècle dernier. Il est possible de se rendre en voiture jusqu’aux abords du palais de la Bahia. Stationnement possible soit dans l’avenue Houmman el Ftouaki empruntée pour venir aux tombeaux saadiens, soit place des Ferblantiers, soit sur une petite place que l’on atteint en passant devant la Bahia par la rue Riad Zitoun el Said, proche du musée Dar Si Saïd. Le palais de la Bahia, « la brillante » fut érigé sur l’ordre de Si Moussa, grand vizir du sultan Sidi Mohammed ben Abd er-Rahman, et par son fils Ba Ahmed, grand vizir et favori des sultans Moulay el-Hassan et Moulay Abd el-Aziz, vers la fin du XIXe siècle. L’architecte El Haj Mohammed ben Mekhi el Mifioui s’inspira de la tradition andalouse et de l’influence d’un officier français mais mit sept ans pour le construire (la visite est guidée). La distribution des locaux et des cours paraît établie sans plan d’ensemble : elle s’explique par des agrandissements successifs, rendus nécessaires par l’accroissement de la famille et par les hasards des acquisitions de terrains et maisons avoisinants. Ce palais de la Bahia, qui s’étend sur 8 ha, est composé d’une succession d’appartements entourant des jardins garnis d’arbres et de fleurs, et des cours. Après l’immense salle du conseil, splendidement décorée, et la salle de réception, s’étend la cour d’honneur, de 50 m sur 8, pavée de marbre et de zelliges. L’appartement de la favorite est superbement orné de boiseries peintes et de zelliges. Les chambres des femmes entourent une ravissante cour et vous pourrez voir le grand jardin mauresque, planté de cyprès, bananiers, orangers et jasmins. Après la visite de la Bahia, vous pourrez vous rendre à la maison Tiskiwin (ouverte le matin seulement) où Bert Flint a rassemblé une intéressante collection d’art populaire marocain. Tout proche se trouve le musée Dar Si Saïd, une belle demeure marocaine de la fin du XIXe siècle, construite par le frère de Ba Ahmed, Si Saïd, chambellan et vizir de Moulay el-Hassan. Elle est devenue, en 1930, un intéressant musée d’art marocain mais dont les collections mériteraient d’être renouvelées. Au rez-de-chaussée, dans le couloir d’entrée, les portes en bois sculpté et peint proviennent des kasbas du Sud. Dans la première salle on peut voir les éléments d’une balançoire, comme il y en avait beaucoup autrefois place Jemaa el Fna et un tapis de Tensift. Sur le jardin intérieur fleuri et ombragé, agrémenté d’un bassin pavé de zelliges vertes et bleues, quatre salles d’expositions ouvrent leurs portes fenêtres. La première salle à droite présente les vêtements de la femme citadine ; caftans, babouches, ceintures en soie brochée ou en velours rehaussé de broderies dorées, voiles brodés d’or. La deuxième salle est consacrée à la dinanderie. Objets en cuivre rouge martelé de la région de Taroudannt ; un couscoussier, présentation des ustensiles pour la préparation du thé : bouilloire sur le kanoun (réchaud au charbon de bois), théière, boîtes à thé, sucre et menthe. Dans la troisième salle sont rassemblées les armes. Sabres et poignards ; fusils fonctionnant à la poudre et au silex, à la crosse incrustée d’ivoire, d’os ou d’argent. Dans la quatrième salle est présentée une collection de bijoux berbères. Les pièces essentielles sont le frontal, cet ornement qui ceint le front, les boucles d’oreilles, les colliers et les fibules. Ces dernières servaient à fixer le haïk (voile drapé). La plupart de ces bijoux sont en argent repoussé, filigravé, parfois incrusté de pierres semi-précieuses. L’ambre qui a une réputation prophylactique existe sous forme de collier. Au premier étage, la salle de réception de style hispano-mauresque avec un beau plafond en coupole est meublée d’un porte-cierge en bois, d’un fauteuil de mariée et d’un tapis de Rabat. Le second étage est consacré à une exposition de tapis ruraux dont certains sont très anciens. Ils présentent des décors géométriques ou des motifs figuratifs. L’exposition de tapis se poursuit au rez-de-chaussée. Autour de la cour, on remarque une belle collection de portes et de bois sculptés de l’époque saadienne (XVe siècle) provenant du palais El Badi. On remarquera les moucharabiehs qui garnissaient les balcons et les ouvertures pour voir sans être vu et étaient parfois peints de couleurs très vives. Dans le couloir, vers la sortie, sont présentés des burnous et bottes utilisés par les berbères de la tribu des Aït Ouaouzguite qui vivent dans le massif du Siroua.
6 – Le tour des Remparts

Marrakech – Remparts de la Medina © gatos.rojos
Les remparts de Marrakech, bâtis en terre rouge sont soigneusement préservés. Ils enserrent la médina sur laquelle ils ne s’ouvrent que par neuf portes. Ils sont très symboliques de Marrakech contrastant avec le ciel bleu et les arbres verts. En partant de la place de la Liberté vers le nord et Bab Doukkala, sur la droite subsiste une partie de l’ancienne Bab er Raha, « porte de la poterne », et de ses deux bastions crénelés. Bab Doukkala est d’époque almoravide. Doukkala désignent un territoire s’étendant au-delà de la médina. En Suivant les remparts, vous arriverez à Bab el Khémis. Cette « porte du Jeudi » dont les vantaux auraient été rapportés d’Andalousie par un prince Almoravih s’ouvre sur la route de Fès A l’est, Bab el Debbagh, la « porte des tanneurs » donnait autrefois sur le quartier des tanneurs. En raison des odeurs nauséabondes se dégageant des peaux séchées, ils étaient cantonnés hors de la médina et trouvaient dans l’oued Issil, l’eau nécessaire au trempage des peaux. Plus au sud, Bab Aylen porte le nom d’une tribu berbère de la région. C’est sans doute la porte qui a subi le moins de modifications depuis sa construction au XIIe siècle. Au sud, Bab Ahmar, la « porte rouge » permet d’accéder à l’actuel palais royal. L’itinéraire pénètre dans la médina, entre le jardin de l’Agdal et le Palais Royal. Le jardin de l’Agdal est un immense enclos long de 3 Km et large de 1,5 Km, planté d’arbres fruitiers et d’oliviers, il fut aménagé au XIXe siècle dans le prolongement direct du palais royal et dispose de deux bassins d’irrigation. Actuellement il n’est plus possible de s’y promener, on peut seulement le longer en suivant cet axe principal. Le Palais Royal, Dar el Makhzen, est de fondation almohade mais fut agrandi à chaque succession de dynastie. Hassan II, qui y séjournait au moins une fois par an, l’a fait restaurer au début des années 60. On y accède par une porte au grand méchouar, une vaste esplanade où se tenaient les réceptions royales publiques et les fantasias (du milieu du XVIIIe siècle et durant le XIXe siècle). On ressort de l’enceinte par Bab Ighli. En continuant vers le nord, derrière une plantation d’orangers, les remparts forment un coude qui dissimule Bab er Robb. Bab er Robb, la « porte du raisin », tient son nom de la réglementation imposée à l’entrée du vin cuit dans la ville, qui ne se faisait que par cette porte. Bab Agnaou, juste à côté de Bab er Robb est une merveille de l’art almohade. Agnaou est un mot berbère qui signifie « bélier sans cornes et sans voix » mais sans que l’on sache pourquoi il lui a été attribué. Cette porte a perdu les deux tours qui l’encadraient à l’origine et les divers éléments qui la composent sont d’origine hispano mauresque. Elle servait de lieu pour l’exposition de corps et de têtes de suppliciés. C’est par cette porte que Yacoub el Mansour entrait dans son palais. Sa fonction était surtout décorative car elle n’abritait qu’un seul corps de garde. Construite en pierre calcaire bleue du Guéliz, elle est rougie par le sable du désert apporté par le vent. Sa frise décorative est remarquable et forme un magnifique encadrement dans lequel s’inscrivent quatre arcs en plein cintre successifs et chacun décoré différemment. On longe à droite un cimetière où se trouve le mausolée de Sidi es Soheyli (1115-1185), un des sept patrons de Marrakech. En arrière, s’ouvrait Bab Ech Charia, aménagée par les Almohades et aujourd’hui murée. Bab el Jédid ouvre sur la longue avenue rectiligne qui mène à la Ménara. Bab el Makhzen donnait autrefois sur la kasba almoravide d’Abou Bekr et de Youssef ben Tachfine et était réservée aux sultans. Retour place de la Liberté point de départ de cette promenade.
7 – Le Guéliz et le Jardin Majorelle
Le Guéliz incarne le Marrakech moderne, avec son cortège d’embouteillages, ses banques, ses bureaux et ses cafés aux terrasses toujours pleines. Ses rues tracées au cordeau sont bordées de larges trottoirs où se croisent des jeunes femmes en minijupe. Chaque rue est ombragée d’une série d’arbres : orangers, amandiers, jacarandas. Marchands de journaux, cireurs de chaussures, vendeurs de cigarettes sollicitent les passants. L’avenue Mohammed-V est l’axe principal de ce quartier planifié par Lyautey et Henri Prost, pour éviter toute altération de la médina. Autour des trois ronds-points (places de la Liberté, du 16-Novembre et Abdel-Moumen-Ben-Ali) rayonnent rues et avenues. A l’angle de l’avenue Mohammed-V et de la rue Souriya se trouve le marché couvert, le souk de Guéliz, où acheter fruits, légumes et fleurs, mais aussi céramiques et vanneries à des prix parfois plus modérés que dans les souks de la médina. Le quartier du Gueliz est aussi intéressant pour un shopping de bonne qualité : cuirs, vêtements, chaussures et meubles design. Malgré de nombreuses destructions pour reconstruire des bâtiments plus élevés, quelques bâtiments coloniaux subsistent et méritent le coup d’oeil : l’immeuble Gidel est à l’angle de l’avenue Mohammed-V et de la rue de la Liberté, pour son hall d’entrée de style colonial, orné de fresques naïves ; la Grande Poste, place du 16 Novembre ; l’immeuble de la Société Générale, place Abdel-Moumen-Ben-Ali et sa façade art-moderne ; en face, le café Renaissance avec son ameublement caractéristique des années 50. Il faut emprunter le boulevard Zerktouni puis l’avenue Yacoub-el-Mansour pour se rendre au jardin Majorelle. Le jardin Majorelle fut créé dans les années 20 par le peintre Jacques Majorelle qui avait pris la décision de s’installer définitivement au Maroc. Autour de l’atelier aux murs peints d’un bleu vif, quatre allées se croisent, ombragées d’arbres et de fleurs aux essences variées. Les bassins portent des nymphéas et des papyrus. L’ensemble a été restauré et ouvert à la visite par le couturier Yves Saint-Laurent.
Les environs de Marrakech

Setti Fatma – Vallée de l’Ourika © Bryce Edwards
Les environs de Marrakech offrent d’agréables excursions que ce soit dans la palmeraie toute proche ou dans le Haut- Atlas dont les premiers contreforts s’élèvent à une cinquantaine de kilomètres.
1 – Le tour de la palmeraie
Ce circuit, de 22,5 Km de route très étroite et asphaltée, est à faire en fin d’après-midi, de préférence en voiture car en calèche c’est un peu long. Cette promenade risque d’être décevante car la palmeraie de Marrakech s’est considérablement dégradée. Elle perd peu à peu sa fonction agricole intensive pour devenir une zone hôtelière ou résidentielle. Rien de plus chic que d’avoir sa maison dans la palmeraie…
2 – Amizmiz (54 Km)
Quitter Marrakech en direction de Taroudannt. Suivre à droite la S 507 vers Amizmiz. A 18 km, le village de Tamesloht fut un important centre religieux de la plaine du Haouz, entouré d’orangeraies et d’oliveraies. La kasba, propriété d’un allié du Glaoui, a été laissée à l’abandon. A 34 km, un pont franchit l’oued Nfis, en aval du barrage de Lalla Takerkoust. A 54 km, apparaît Amizmiz, bâtie sur la pente du Jebel Erdouz et environnée d’oliveraies. Elle s’anime d’un important marché le mardi, où l’on peut acheter des poteries rustiques au décor sobre
3 – Rhmate (28 Km de Marrakech par la S513)
Dans ce petit village oublié au c’ur des plantations maraîchères et d’horticulture repose un prince sévillan Moatamid. Né en Andalousie en 1039, il appela à ses côtés Youssef ben Tachfine pour lutter contre le roi d’Espagne Alphonse VI. Après avoir repoussé les chrétiens Youssef établit son pouvoir en Andalousie et fit prisonnier Moatamid qu’il exila à Rhmate avec sa femme et son fils. Ils reposent tous les trois dans un mausolée dont le prince, qui était poète, avait demandé qu’il fut orné de ses vers et non de sourates du Coran. Le gardien les déchiffre obligeamment pour vous’
4 – Les vallées de l’Ourika et de l’Oukaïmeden (192 km au départ de Marrakech par une route goudronnée ; compter une journée)
Quitter Marrakech par la S 513 en direction de la formidable barrière montagneuse de l’Atlas. Après 33 km, la route pénètre dans la vallée encaissée de l’Ourika où, abordant les premiers contreforts du Haut-Atlas, elle s’élève lentement. Laisser la route à droite pour Oukaïmeden. D’abord large et coiffée de vergers, la vallée se rétrécit peu à peu, les villages s’accrochent aux parois rouges de la montagne et les champs en terrasses se multiplient. Eucalyptus, peupliers et saules pleureurs ombragent la route et des troupeaux de chèvres paissent l’herbe verte le long des rives du torrent. La route s’arrête à l’entrée du village de Setti Fatma. Cette bourgade de montagne nichée entre les châtaigniers et les noyers bénéficie d’un site impressionnant au pied d’une paroi rocheuse abrupte. Redescendre la vallée de l’Ourika jusqu’à Arhbalou et prendre à gauche la route d’Oukaïmeden. Elle s’élève rapidement dans une belle gorge d’abord plantée d’oliviers, de peupliers, de noyers, de frênes et de chênes verts. Mais le paysage devient de plus en plus désertique et austère à mesure que l’on s’élève, pour ne devenir bientôt que sauvagement minéral. Quelques échappées permettent d’admirer la vue sur les contreforts du Haut-Atlas et la plaine de Haouz. A l’entrée de la station d’Oukaïmeden, un parking permet de se garer. Oukaïmeden est une station de sports d’hiver à 2 600 m d’altitude au milieu d’un vaste alpage, dominé par une ceinture de sommets qu’escaladent plusieurs remontées mécaniques, et d’où l’on peut pratiquer aussi le ski de randonnée. Çà et là, plusieurs rochers dispersés entre les maisons portent des gravures rupestres ; le groupe le plus important se trouve à l’entrée de la station, près du refuge du Service de la Jeunesse et des Sports. En continuant tout droit, une petite route monte jusqu’au col du Tizrag (2 km) Depuis la table d’orientation, la vue est superbe sur toute la région et, par temps clair, jusqu’à Marrakech. Une autre route atteint un télésiège qui monte jusqu’à 3 300 m d’altitude.
Fès

Fes – Vieille ville, Medina © omar_chatriwala
Première capitale d’un royaume musulman au Maroc, fondée au VIIIe siècle, Fès a gardé un rayonnement inaltérable. Elle est restée une métropole religieuse, intellectuelle et artistique. Sa situation géographique, au carrefour des routes du sud, du passage avec le Rif, de la trouée de Taza vers l’est et jusqu’à l’Atlantique par la vallée du Sebou, est aussi privilégiée. Il faut traverser toute une agglomération moderne et anarchique avant d’atteindre la vieille ville, mais le charme opère toujours et l’on reste séduit par les ruelles animées de la médina, les mosquées innombrables, les ryads et les palais… Bien que touchée par la modernité, Fès a conservé sa magie.
Fès dans l’histoire
petite pioche avec laquelle tracer les limites de la ville. En réalité, dès la fin du VIIIe, siècle, une petite ville berbère s’élevait sur la rive droite de l’oued qui s’appelait Madinat Fas. Elle servit de base militaire pour le fondateur de la dynastie idrisside en campagne contre Taza et Tlemcen. En 809, Idriss II fondait de l’autre côté de la rivière, un quartier royal avec son palais, sa mosquée et ses murailles. Très vite, le rayonnement de Fès sur le monde musulman attira vers elle de nombreux immigrants apportant des connaissances et des techniques qui ont favorisé son développement. Dès 817, des familles musulmanes d’Espagne vinrent s’installer et fondèrent Adoua el Andalou, le quartier des Andalous. Ils furent suivis d’Arabes venus de Tunisie installés dans Adoua el Karaouyine, le quartier des Kairouanais. Une importante communauté juive s’installa également. A la fin du XIe siècle, le sultan almoravide Youssef ben Tachfine réunit les différents quartiers dans une même enceinte ce qui marqua la naissance de Fès el Bali, c’est-à-dire Fès l’ancienne. Aux XIIe et XIIIe siècles, sous les Almohades, la ville connaît un développement industriel avec la création de tanneries, de moulins, de teintureries, d’ateliers de cuivres le long de l’oued et un essor intellectuel avec l’enseignement dispensé à la mosquée Karaouyine. Elle atteint son apogée au XIVe siècle : elle compte alors 200 000 habitants et accueille de nombreux étudiants dans ses medersas réputées ainsi que des commerçants dans ses nombreux fondouks ou hôtels. Hors des murs, une véritable citadelle est érigée, Fès el Jdid (Fès la neuve) qui abrite un nouveau palais royal, des bâtiments administratifs et une garnison. Au XVIe siècle avec l’arrivée au pouvoir des Saadiens, Fès entame son déclin politique. La nouvelle dynastie lui préfère Marrakech et Fès ne retrouve son rang de capitale qu’avec la dynastie alaouite qui construit de nouveaux édifices et relève les anciens monuments. Jusqu’au XIXe siècle, elle conserve un prestige immense, l’université Karaouyine est un foyer de pensée islamique et les commerçants fassi voyagent de l’Afrique à l’Europe. Autour de la ville, se constituent de grandes propriétés agricoles. Mais à la fin du siècle, le Maroc est accablé de difficultés économiques et politiques, les sultans ne savent résister aux turbulences et en 1911 alors que Fès est investie par des tribus berbères, le Sultan fait appel aux troupes françaises croyant ainsi sauver son trône. L’année suivante, le traité de Fès est signé et après l’arrivée de Lyautey, le nouveau sultan Moulay Youssef est installé à Rabat. Fès perd son rôle de capitale du Maroc.
Le tour de Fès
Pour faire connaissance avec la ville, un très bel itinéraire de 16 Km permet de faire le tour de l’enceinte qui protège Fès el Bali et Fès el Jedid, d’admirer le jeu des lumières sur les remparts et les belles portes qui permettent d’entrer dans la ville. Depuis la ville nouvelle, suivez la majestueuse avenue Hassan II puis prenez à droite la route P 1 qui serpente parmi les oliviers. Après de très beaux points de vue sur la muraille, prenez à droite une route qui monte vers le bordj Sud. Ce fortin abandonné domine la vallée de Fès, fermée par le Jebel Zalagh. Redescendez vers la P 1 qui traverse le cimetière et passe devant la porte de Bab Ftouh. Laissez la P 1 à droite, continuez vers Taza et suivez les remparts. La route épouse les sinuosités des murailles et touche les remparts au niveau du palais Jamaï édifié par un puissant vizir au siècle dernier et aujourd’hui aménagé en hôtel. Au nord de la ville, sur une butte accessible par un sentier, s’élèvent les ruines des mausolées des derniers mérinides. De là, la vue d’ensemble est saisissante sur Fès. Un peu plus loin, une petite route permet d’accéder au bordj nord, une forteresse saadienne aménagée en musée d’armes. Au carrefour suivant, prenez à gauche le boulevard des Saadiens qui rejoint l’avenue Hassan II.
Fès el Bali

Medersa Sehrij – Fes el Bali © amerune
Pour ceux qui hésiteraient à s’aventurer seuls dans la médina, des guides officiels sont présents au syndicat d’initiative. Vous pourrez laisser votre voiture au parking devant Bab Bou Jelou qui permet d’entrer dans la ville. Cette porte flamboyante avec ses faïences bleues et vertes a été reconstruite en 1913. Prenez tout de suite à gauche puis à droite dans la rue Talaa Kebira, la rue principale de Fès el Bali. Bordée de boutiques, elle dessert de nombreux souks. Sur la droite s’ouvre l’entrée de la medersa Bou Inania. Construite au milieu du XIVe siècle sous la dynastie des Mérinides, elle est la plus belle et la plus vaste de Fès. Sa cour entièrement dallée de marbre et d’onyx est particulièrement somptueuse avec son décor de stuc, de zelliges et de bois sculpté. Les cellules des étudiants ainsi que deux salles de cours sont disposées autour de la cour au rez-de-chaussée et au 1er étage. La salle de prière fait face à l’entrée, elle est soutenue par des piliers d’onyx. En sortant de la medersa, le carillon de Bou Inania, un alignement de 13 timbres de bronze, orne la façade de l’autre côté de la rue. Reprenez à droite la rue Talaa Kebira, elle devient plus étroite et la foule y est souvent dense. Attention, priorité aux ânes qui tirent de petites charrettes souvent lourdement chargées ! Dans une recoin extérieur du mur de la mosquée Gazléane, une banquette est protégée par un auvent et fermée par une grille : Idriss II s’y serait reposé. Plus loin sur la gauche s’ouvre le fondouk des peaussiers où, sur deux étages, sont mises à sécher les peaux arrivées des abattoirs avant d’être envoyées au tannage. Ensuite se succèdent les souks des bijoutiers, nattiers, cordonniers, fabricants de soufflets… Le souk Attarine prolonge la rue Talaa Kebira, c’est le souk aux épices odorantes et multicolores. A son extrémité s’élève la medersa Attarine plus ancienne que celle de Bou Inania. Elle est particulièrement remarquable pour la richesse de sa décoration intérieure à l’apogée de l’art mérinide. En sortant, prendre immédiatement à gauche pour accéder à la mosquée Karaouyine. De la mosquée d’origine fondée au IXe siècle par une femme pieuse dans le quartier des Kairouanais, il ne reste rien. Seul le minaret surélevé en 956 se trouve à son emplacement d’origine. Ce sont les Almoravides qui agrandirent l’édifice à ses dimensions actuelles en faisant le plus grand lieu de prière d’Afrique du Nord pour l’époque pouvant accueillir 20 000 fidèles et abritant une prestigieuse université coranique. Interdite aux non musulmans, il est seulement possible de jeter un ‘il par une de ses nombreuses portes. Suivre la rue Bou Touil depuis la rue Sbalouïat qui passe sous des maisons à encorbellement venant presque toucher le mur de la mosquée. Sur la gauche, s’ouvre le fondouk Tsétaouine appelé ainsi parce qu’il accueillait les marchands venus de Tétouan. Les fondouks étaient des hôtelleries pour commerçants créées par les sultans. Le rez-de-chaussée abritait les entrepôts de marchandises et les écuries, aux étages se trouvaient les chambres desservies par des galeries. Aujourd’hui les fondouks font office d’entrepôts. Continuez la rue Sbalouïat qui débouche sur la place Seffarine, avec le souk des dinandiers qui martèlent plateaux et chaudrons, cisèlent des théières et aiguières ou soudent de fragiles lanternes. Le souk des teinturiers se trouve le long de l’oued Fès, de l’autre côté de la place. Prenez ensuite à droite, la rue Cherratine qui conduit à la medersa Cherratine. Ce bâtiment construit en 1670 est dû au sultan alaouite Moulay Rachid. Sa décoration, plus sobre que les précédentes medersas, alterne le stuc blanc et le cèdre brun sculpté. Un peu plus loin à droite sur la place Chemaïne se tient le marché aux fruits secs et des échoppes de broderies et passementeries. Revenez à la rue Cherratine et tournez à droite dans la Kissaria, c’est un marché couvert, exclusivement consacré à la passementerie et à la broderie : tissus soyeux et chatoyants, voiles légers, fils d’or et d’argent ou multicolores, babouches brodées emplissent les minuscules boutiques. Regagnez la rue Cherratine pour atteindre la Zaouïa de Moulay Idriss qui abrite le tombeau d’Idriss II. A droite sous un auvent se trouve une jolie fontaine décorée de plâtre ciselé et peint. Dans le mur, le tronc aux offrandes est un beau moucharabieh de cèdre avec en son centre, une plaque de cuivre percée d’une fente dans laquelle le fidèle glisse de l’argent avant de baiser le mur. De nombreux mendiants hantent ce passage espérant bénéficier de la générosité des pèlerins. L’entrée de la zaouïa est en bois sculpté et peint ; par la porte ouverte, on aperçoit la salle de prière, sa curieuse collection d’horloges et au fond le tombeau de Moulay Idriss. Face à l’entrée, une ruelle bordée de boutiques d’objets de piété conduit à la place Nejjarine. C’est une très jolie place aux proportions harmonieuses avec le superbe fondouk Nejjarine et la fontaine du même nom au beau décor de zelliges. Sur la droite s’ouvre le souk Nejjarine aux menuisiers qui embaume le bois de cèdre. Les maisons aveugles qui bordent les rues recèlent des jardins intérieurs invisibles aux passants. La porte Bab Ftouh permet d’accéder à la mosquée des Andalous fondée peu après la Karaouyine et elle aussi embellie par les Almohades au XIIIe siècle. Elle s’ouvre par une grande porte monumentale décorée de zelliges et surmontée d’un auvent en cèdre sculpté. Non loin se trouve le quartier des potiers où sont façonnés et peints les objets et plats en céramique qui ont fait la renommée de Fès. Derrière la mosquée, la rue Seffeh conduit au quartier des tanneurs en bordure de l’oued Fès. Leur odeur est tenace mais leurs grandes cuves de couleur dans lesquels travaillent les hommes offrent un spectacle impressionnant.
Fès el Jdid
Fès la Neuve abrite le palais royal dont l’entrée principale, place des Alaouites, se compose de trois portes monumentales en bronze doré et protégées par un auvent de tuiles vertes. Elles ne s’ouvrent que lors de cérémonies exceptionnelles. La rue Bou-Ksissat sépare le Mellah, ou quartier juif, de l’enceinte du palais. Melh est le sel en arabe et la première communauté juive de Fès était installée près du marché au sel, depuis le Mellah caractérise le quartier juif de toutes les villes marocaines. Comme ailleurs au Maroc, la communauté juive a considérablement diminué et des musulmans ont investi le quartier aux maisons à loggias de bois. Cependant, la Grande Rue des Mérinides reste vouée aux bijoutiers et orfèvres qui cisèlent l’or et l’argent. Elle reste l’artère la plus animée de ce quartier, bordée de boutiques. Le Dar Batha, place de l’Istiqlal, est un palais construit par les Alaouites à la fin du XIXe siècle et transformé en musée des Arts et Traditions Populaires. Bien que récent, il offre un bel exemple d’architecture hispano-mauresque avec son jardin andalou aménagé entre les deux ailes. Poteries, tapis, bijoux, bois sculptés, passementeries… les différentes techniques artisanales de la région de Fès sont représentées par des objets admirables.
Tanger

Tanger – ville portuaire © omar_chatriwala
Grand carrefour maritime où se rencontrent la Méditerranée et l’Atlantique, où se croisent l’Europe et l’Afrique, Tanger étage ses maisons blanches autour d’une magnifique baie. Elle a gardé de son passé interlope un charme nostalgique et la douceur de son climat comme le pittoresque de ses ruelles ou l’animation de ses boulevards continuent d’en faire une ville attrayante.
Tanger dans l’Histoire
La ville était déjà connue dans l’Antiquité grecque. Selon la mythologie, elle aurait été fondée par le géant Antée, fils de Poséidon dieu de la mer et de Gaia déesse de la terre, qui lui donna le nom de sa femme, Tingis. En réalité, ce nom serait d’origine berbère. La ville devint un prospère comptoir phénicien dont s’emparèrent les Romains après la chute de Carthage (en 146 av. J.-C.). Au IIIe siècle, l’empereur romain Claudius en fit la capitale de la Maurétanie Tingitane. Conquise par les Arabes au VIIIe siècle, elle représente un enjeu entre les musulmans d’Espagne et du Maroc. En 1471, elle fut prise par les Portugais et elle devint anglaise au XVIIe siècle à la suite du mariage entre l’infante Catherine de Bragance et Charles II d’Angleterre. En 1681, assiégée par Moulay Ismaïl, elle repassa aux mains des Alaouites. Aux XVIIIe et XIXe siècles, la plupart des commerçants et des représentants diplomatiques résidaient à Tanger, il était alors difficile de pénétrer plus avant dans l’intérieur du Maroc. La ville commençait à attirer les peintres. En 1905, l’empereur d’Allemagne Guillaume II se rendit à Tanger et prononça un discours dénonçant les agissements de la France et de l’Espagne qui provoqua la conférence d’Algésiras. En 1923, la ville fut déclarée concession internationale et port franc, cette période marqua l’âge d’or de Tanger. Là se côtoyait une société cosmopolite d’hommes d’affaires, de trafiquants et d’artistes. En 1947, c’est à Tanger que le sultan Mohamed V posa le problème de l’avenir du Maroc amorçant l’évolution qui allait conduire le pays à l’indépendance. Avec l’indépendance du Maroc, la ville perdit son statut international et en 1960, les avantages fiscaux furent abolis.
Visiter Tanger
La Médina, cernée de murailles est la ville ancienne qui domine le port. Sillonnée de ruelles, elle se visite à pied. On y entre par le Grand Socco, une immense place où se tient un marché permanent et animé, approvisionné par les paysannes rifaines drapées dans leur fouta, un tissu blanc rayé de rouge et coiffées d’un chapeau à larges bords orné de pompons. Le marché se tient le matin, il est plus important les jeudi et dimanche. Le Socco signifie souk en espagnol mais la place a officiellement été baptisée place du 9-avril-1947 en souvenir du discours de Mohamed V. Le texte en a été gravé sur un monument commémoratif dressé dans le jardin de la Mendoubia, qui entoure le tribunal, autrefois résidence du Mendoub, le représentant du sultan. L’ensemble est dominé par le minaret de la mosquée Sid Bou Abid, construite en 1917. La médina s’ouvre sur le Grand Socco par Bab Fahs prolongée par la rue des Siaghines qui passe devant une église espagnole et rejoint le Petit Socco, appelé aussi souk Dakhil, une minuscule place bordée de cafés. La rue de la Marine conduit à la Grande Mosquée, construite à la fin du XVIIe siècle par Moulay Ismaïl pour célébrer le départ des Anglais. C’est une rue très vivante le long de laquelle s’alignent des échoppes de couturiers et de menuisiers. Elle débouche sur la place de la Marine dont la terrasse offre une belle vue sur le port. La rue Ben Raisul monte à travers la médina jusqu’à la Kasba. Cette ancienne forteresse offre un superbe panorama sur la ville, le port et le détroit de Gibraltar. Par temps clair, il est possible de voir le Rocher de Gibraltar. Le grand méchouar est un vaste emplacement à ciel ouvert où les sultans recevaient autrefois les doléances. Il est dominé par la mosquée de la Kasba au minaret octogonal revêtu de faïences polychromes et donne accès au Dar el Makhzen, un palais construit sous le règne de Moulay Ismaïl et transformé en musée. Le palais s’ordonne autour d’un patio qu’entourent des arcs décorés de faïence émaillée, portés par des colonnes de marbre. Des céramiques de Tétouan ornent la cour et le bassin central. On visite les appartements royaux avec la salle du trône et la salle d’apparat richement ornées. Les autres pièces abritent le musée des arts marocains tandis que l’ancienne cuisine a été transformée en musée archéologique. Il faut prendre le temps de flâner dans les jardins du Sultan de style andalou sur lesquels donnent un centre artisanal et un restaurant. La rue Riad Sultan permet de rejoindre la place du Tabor et de sortir de la vieille ville par la rue de la Kasba en partie couverte. Le Musée Forbes, rue Shakespeare, dans le quartier Marshan au nord de la ville, avait été aménagé dans la maison du milliardaire américain pour rassembler une extraordinaire collection de soldats de plomb présentés sous forme de tableaux historiques. Faute de crédits pour son entretien il a été fermé et la collection dispersée. La Légation Américaine se trouve à l’intérieur des remparts sud de la médina ; ouverte tous les matins, elle abrite un petit musée où sont exposées des gravures de Tanger, des tableaux de Delacroix ainsi que des oeuvres de peintres contemporains.