Une île maintes fois baptisées
les Portugais, en route vers Cipango (Japon) et Cathay (Chine) baptisent cette île inhabitée, l’Île du Cygne, du nom d’un de leurs bateaux. Ils conçoivent l’île comme une halte sur la route de l’Orient et ne l’occupent pas. Pour assurer leurs futurs ravitaillements, ils y lâchent cochons, bœufs, chèvres et singes. Le navigateur Pedro Mascarenhas laisse son nom à l’archipel – les Mascareignes en français – qui comprend Maurice, la Réunion et Rodrigues. : les Hollandais, eux aussi lancés sur la route des Indes, y débarquent. Ils rebaptisent l’Île Mauritius, du nom de leur prince Maurice de Nassau. En 1615, l’amiral hollandais Pieter Both et toute son escadre y fait naufrage.
Depuis, le sommet de l’île porte le nom de ce navigateur. En 1638, les premiers colons débarquent : des forçats et des esclaves malgaches. En quelques années ils dévastent les forêts, et exterminent le dodo. Après de nombreux cyclones et des disettes, ils abandonnent l’île en 1658. D’autres tentatives se terminent de la même manière. En 1710, les derniers colons hollandais quittent définitivement Maurice pour Batavia.
L’Île leur doit l’introduction du cerf, du singe, du cocotier et surtout de la canne à sucre. Dufresne d’Arsel, originaire de Saint-Malo, commandant du Chasseur, navire de la Compagnie des Indes aborde à Maurice. Il en prend possession au nom du roi et la nomme : Île de France, nom qu’elle gardera jusqu’en 1810. Après son départ, l’Île demeure déserte. Mais en 1719, Philippe d’Orléans, alors régent de France en confirme la concession à la Compagnie des Indes.
Le développement de l’île sous impulsion française
les Français, à la recherche d’une escale dans l’océan Indien, décident de s’y établir. Seize hommes et quelques esclaves arrivent de l’Île Bourbon (la Réunion). Les années suivantes les sœurs de Charité, établies en France, envoient des orphelines pour les marier. Des centaines d’esclaves africains sont également débarqués. Malgré cet effort de peuplement, la situation reste catastrophique ; l’Île connaît une disette permanente.
L’arrivée de Mahé de La Bourdonnais, nommé Gouverneur des Îles Bourbon (La Réunion) et de France par Louis XV, au nom de la Compagnie des Indes, sonne le vrai départ de l’Île.
Cet homme efficace organise le développement de Maurice où vivent dorénavant trois mille colons. Il développe la colonisation et le peuplement de l’Île. Il organise la traite des noirs à partir du Mozambique pour fournir la main d ‘oeuvre des plantations et incite des Indiens de Pondichéry à s’établir sur place. Il instaure Port-Louis capitale et la dote d’une église, d’un hôpital et de fortifications. L’Île atteint rapidement près de dix huit mille habitants. Maurice, sous sa poigne, s’ouvre aux activités maritimes et devient une base navale pour des opérations commerciales et de guerre. Malgré ces succès, Mahé de La Bourdonnais, en rivalité avec Dupleix alors gouverneur de Pondichéry, est destitué. Dès lors les gouverneurs vont se succéder à un rythme plus accéléré.
Mahé de La Bourdonnais :
Le grand homme de l’île Maurice naît à Saint-Malo le 11 février 1699. Au service de la Compagnie des Indes, il bourlingue à maintes reprises dans l’Océan Indien. Il s’établit à son propre compte et fait rapidement fortune. Ses compétences lui valent d’être nommé Gouverneur général des îles en 1735. Il développe Maurice et lui donne sa vocation maritime. Il continue à faire des affaires, s’associant aux colons pour créer de nombreuses entreprises, dont la première sucrerie de l’île. En 1742, il envoie Lazare Picault explorer les Seychelles. Celui-ci découvre l’île principale qu’il nomme Mahé. En 1746, il arme une escadre qui obtient la capitulation de Madras, en Inde. Cette place forte anglaise verse une forte rançon mais ce succès causera sa perte. Dupleix, Gouverneur des établissements français en Inde, lui reproche de ne pas avoir anéanti la ville.
Accusé de trahison, il est emprisonné à la Bastille avant d’être acquitté en 1751. Il meurt deux ans après. Aujourd’hui, les Mauriciens reconnaissent en Mahé de La Bourdonnais le véritable fondateur de Maurice. la Compagnie des Indes, unique fournisseur et acheteur des colons, traverse une grave crise. Sa gestion des Îles s’avère désastreuse. En 1764, Louis XV décide de lui racheter l’île de France. La rivalité franco-britannique, exacerbée par la conquête des Indes, bat son plein et les batailles navales font rage, en particulier dans l’océan Indien. C’est l’heure de gloire des corsaires.
Combattants pour leur roi, ils arraisonnent et pillent les navires britanniques, contribuant à la richesse de l’île. Près de deux cents bateaux entrent chaque année à Port-Louis. L’île connaît une activité maritime comparable à celle de ports comme Batavia, Madras ou Bombay. Les richesses s’accumulent et tout le monde participe à la guerre de course. De son côté, Pierre Poivre officie comme intendant, de 1767 à 1772, Il essaye d’acclimater différentes épices avec des succès variables. Comme responsable des cultes, il autorise les hindous à bâtir leur premier temple en 1772. Cette liberté religieuse est confirmée en 1788 par Louis XVI qui autorise la pratique de tous les cultes. Enfin, en 1778 s’ouvre la première loge maçonnique. L’importance des francs maçons ne se démentira pas. Les corsaires : un rôle clé
L’histoire de Maurice, particulièrement au XVllle siècle et au début du XIXe siècle, est indissociable de celle des corsaires. Si les pirates, établis à Madagascar, fréquentèrent l’Île dès 1697, il ne faut pas les confondre avec les corsaires.
Les pirates agissent pour leur propre compte là où les corsaires agissent pour leur roi. Ils jouèrent un rôle militaire, en permettant de desserrer l’étau britannique, mais aussi un rôle économique vital. Leurs prises faisaient l’objet d’un fructueux négoce. Les commerçants affluaient, des Etats-Unis, du Danemark, à Port-Louis. Dans les années 1750, planteurs et négociants, dans l’espoir de s’enrichir rapidement, n’hésitaient pas à armer les corsaires. Si peu de gens se souviennent de Dutertre, tout le monde connaît Surcouf. Celui-ci multiplia les prises à bord de son vaisseau, le Revenant. A la fin du XVIIIe siècle, ces marins jouèrent un rôle vital lorsque Maurice, sans aucune communication avec la métropole, était entièrement encerclée par les Britanniques. C’est alors que Surcouf écrivit quelques unes de ses plus belles pages de gloire qui le firent surnommer le roi des corsaires Maurice accueille fort bien la nouvelle de la Révolution française qu’elle apprend le 29 janvier 1790.
Par contre, les colons s’opposent fermement à l’abolition de l’esclavage, proclamée en 1794. Ce système constitue la base même de l’économie des îles et sa suppression signifie la fin de leur prospérité. Les agents, envoyés par la Convention pour appliquer ces lois, sont ré-embarqués de force vers la France. Le général Decaen, envoyé par Napoléon, rassure les planteurs dès son arrivée en 1803. Moins connu que Mahé de la Bourdonnais, Decaen est le dernier gouverneur Français de l’île. Le piastre Decaen fut frappée en 1810. Cette pièce de monnaie est aujourd’hui très recherchée et sa valeur est considérable, car c’est la seule qui fût frappée sur l’île.
Decaen dirige l’île d’une main de fer. Il y réorganise les finances, développe l’éducation et adapte le Code civil, le Code du commerce et celui de la procédure civile qui inspire toujours largement le droit mauricien. Il y supprime également les libertés nées de la révolution, et, sous l’influence de Joséphine de Beauharnais originaire des Caraïbes et la pression des planteurs antillais, rétablit l’esclavage. La situation de l’île demeure pourtant précaire en raison du blocus mis en place par les Anglais qui se sont empare en 1794 des Seychelles. Les corsaires, Surcouf en tête, offrent alors à la France ses plus belles victoires navales contre les Britanniques. Les prises s’accumulent et font l’objet d’un fructueux commerce avec les Etats-Unis et d’autres pays comme le Danemark. En 1810, la marine anglaise est défaite à Grand Port. Le nom de cette bataille, et celle de son vainqueur le général Martin Vandermaësen, demeurent gravés sur l’Arc de Triomphe à Paris. Victoire sans lendemain car les Anglais, triomphants dans tout l’Océan Indien, ne peuvent laisser subsister cette présence française, menaçante pour leur suprématie.
De 1810 à 1968, l’île Maurice est britannique
après la prise de la Réunion, les Anglais regroupent leurs forces à Rodrigues. Près de seize mille soldats et marins venus de tout l’empire fondent sur l’île de France. Elle capitule presque immédiatement, faute de combattants, et aussi parce que les Anglais ont garanti aux colons que « leurs propriétés, lois, coutumes et cultes religieux » seraient intégralement respectés. Elle reprend le nom d’île Maurice et les traités de Paris et de Vienne, en 1815, confirment le contrôle britannique sur les Mascareignes et les Seychelles. Seule la Réunion reste française. La France a perdu la bataille militaire, elle va gagner en grande partie le combat culturel. Le gouverneur est anglais, mais le Code Napoléon y fait la loi et le créole demeure la langue maternelle des Mauriciens.
Peu d’Anglais s’installent sur l’île et il faut beaucoup de diplomatie au premier Gouverneur britannique, Robert Farquhar, pour être accepté par la population, largement francophone, qui n’envisage l’occupation anglaise que comme un intermède. Si beaucoup de Français restent, d’autres quittent Maurice pour la Réunion, Madagascar ou l’Afrique du Sud.
Du point de vue économique, les Anglais contribuent à développer la culture de la canne à sucre. Cultivée autrefois principalement pour l’arack, un rhum rustique apprécié des marins, elle est dorénavant plantée pour la production de sucre destinée à l’exportation. En 1825, elle bénéficie des mêmes avantages fiscaux que ceux consentis au sucre des Antilles. Dès lors la canne supplante les autres cultures et s’étend sur toute l’île qui perd peu à peu sa vocation maritime. Or, cette culture nécessite une main d’œuvre importante alors que les Anglais ont bien l’intention de faire la police des mers et d’abolir l’esclavage.
Dès 1834, des milliers de paysans indiens sont encouragés à venir travailler sur les plantations et une poignée d’immigrants chinois s’installent comme commerçants. En 1835 l’esclavage est officiellement aboli. La population compte alors 9 000 blancs, 18 000 affranchis et 70000 esclaves. Aussitôt, le gouverneur décrète que tous les esclaves qui viennent d’être affranchis doivent s’engager comme apprentis au service de leurs anciens propriétaires. Cette situation se prolonge jusqu’en 1839. Ensuite, si certains demeurent sur les domaines sucriers, les autres n’ont qu’une hâte : quitter ces plantations où ils ont connu tant de souffrance. Beaucoup s’installent dans les faubourgs des villes, comme manœuvres, ouvriers et dockers.
D’autres entretiennent des lopins de terre dont personne ne voulait. D’autres encore, surtout dans le sud, deviennent pêcheurs. La plupart des affranchis s’installent dans la misère et leur héros s’incarne dans le père Jacques Désiré Laval. Les planteurs, fort généreusement indemnisés par la couronne britannique, se tournent vers les Indes pour y chercher une main d’œuvre bon marché. En un demi-siècle, près de quatre cent cinquante mille coolies débarquent à Maurice. L’écrasante majorité y restera, déterminant jusqu’à ce jour l’équilibre ethnique de l’île. Maurice connaît alors une grande prospérité due au développement de la canne à sucre et à l’intensification de son commerce avec l’Inde. C’est l’âge d’or. Le percement du canal de Suez et la concurrence de la betterave sucrière en Europe auxquelles s’ajoutent des épidémies, choléra et paludisme, et des cyclones plongent l’île dans le marasme. Plus grave, Maurice souffre déjà de surpopulation.
En 1860, elle compte plus de 310 000 habitants. La première guerre mondiale l’isole, même si elle souffre peu du conflit. A la fin de la guerre, Maurice connaît un nouveau boom sucrier, ce qui accentue encore sa tendance à la monoculture. La crise de 1929 met fin brutalement à cette embellie. Les conflits sociaux prennent une importance inconnue jusqu’alors.
En 1936 est créé sur le modèle britannique, le Parti Travailliste, appelé à un grand avenir. Lors de la deuxième guerre mondiale, les Anglais font face à l’avancée allemande vers l’Egypte et à celle du Japon vers la Birmanie. Du coup, idéalement située dans l’océan Indien, Maurice acquiert une grande importance stratégique. Ils y construisent l’aéroport militaire de Plaisance, mais l’île une fois encore souffre peu du conflit. Elle fut toutefois le théâtre d’une triste histoire, parmi tant d’autres il est vrai à cette époque. Dans son bel et passionnant ouvrage Mémoires de Couleur, Claude Pavart raconte un épisode peu connu de l’exode de Juifs d’Europe centrale vers l’Île Maurice. En été 1940, 3600 juifs ayant fui l’Autriche, l’Allemagne, la Pologne et la Tchéquie embarquèrent à Bratislava à bord de quatre cargos grecs à destination de la Palestine. Mais à Haïfa les Anglais refusèrent le débarquement et les émigrants furent transférés sur deux navires hollandais à destination de Port-Louis ! Après une navigation longue et inconfortable 1600 personnes furent débarquées à Maurice pour être internées au camp de Beau-Bassin. Ils quittèrent l’Île en août 1945 pour Israël.
La dureté de leur détention fut adoucie par la gentillesse des Mauriciens. Cet épisode explique l’existence d’un cimetière israélite au lieu dit Saint-Martin, non loin de Beau-Bassin. Les descendants de ces immigrants temporaires et forcés ainsi que les enfants nés dans l’Île continuent d’entretenir soigneusement les 126 tombes qui perpétuent ce souvenir. Au lendemain de la guerre, la situation économique est catastrophique. Le redressement s’amorce néanmoins grâce à une politique volontariste de la Grande Bretagne et à des achats sucriers soutenus de sa part. En 1947, le droit de vote jusque là réservé à une minorité est élargi à toute personne sachant lire et écrire le créole. Les travaillistes remportent les élections.
L’heure de la décolonisation approche. Durant les années cinquante et soixante, les indépendantistes s’organisent au sein du Parti Travailliste. L’île connaît un foisonnement de partis politiques. L’Angleterre, désireuse de se séparer de sa colonie, met en place un schéma de décolonisation progressif pour parer à la détérioration de la situation. Après la conférence de Londres de 1965, les élections de 1967 s’annoncent décisives pour l’indépendance. La préparation de ces échéances a lieu dans un climat délétère. Des troubles éclatent entre les différentes communautés. Ils mettent aux prises Hindous et Créoles puis Créoles et Musulmans.
L’origine de ces troubles ne sera jamais clairement définie. Des milliers de Mauriciens, effrayés par cette agitation et surtout ne croyant absolument pas à l’indépendance de Maurice, émigrent vers l’Angleterre, l’Australie ou la France. En 1967, une alliance de trois partis, dont le Parti Travailliste sous la conduite de Seewosagur Ramgoolam, remporte de peu les élections. L’opposition menée par Gaëtan Duval prônait pour des raisons politiques une forme de rattachement à l’Angleterre. Son Parti Mauricien Social Démocrate obtient 44 % des voix à Maurice et 96% à Rodrigues. Il est le premier parti du pays mais il a perdu son pari. Malgré son score important, l’indépendance est accordée en 1968.
Seewoosagur Ramgoolam : le père de la Nation
Seewoosagur Ramgoolam est né en 1900 dans le village de BelleRive. Son père, originaire du Bihar, un état du nord de l’Inde, appartient à cette petite classe de contremaîtres qui se sont peu à peu élevés. Seewosagur poursuit ses études de médecine à Londres où il se passionne pour la littérature, en particulier pour T. S. Eliot. Il s’engage dans les mouvements étudiants et rencontre dans ce cadre les futurs leaders indiens et pakistanais, Patel, Nehru et Jinnah. A son retour à Maurice, il adhère au parti travailliste dont il prend la tête en 1952. Il est l’artisan de l’influence des indos-mauriciens sur la vie politique. La reine Elisabeth II l’élève au rang de Chevalier en 1965. Il meurt trois ans après sa défaite électorale, en 1985.
De l’indépendance à nos jours
Au lendemain de l’indépendance, les rapports entre les communautés ainsi que le climat économique et social demeurent mauvais. De nombreux Mauriciens continuent de quitter l’île. En 1969, Maurice connaît l’une de ses premières combinaisons politiques dont elle a le secret. Le Parti Travailliste de Ramgoolam et le Parti Mauricien Social Démocrate de Gaëtan Duval forment une coalition. Un nouveau parti, le Mouvement Mauricien Militant de Paul Bérenger, cristallise les mécontentements. Ramgoolam, dans ce climat exécrable, va selon les circonstances s’allier avec d’autres partis, ou décréter l’état d’urgence et gouverner de manière autoritaire. En 1982, une alliance entre le MMM et le parti dirigé par Anerood Jugnauth remporte une victoire écrasante par 60 sièges à 0. Ramgoolam perd le pouvoir et devient Gouverneur Général tandis qu’Anerood Jugnauth est nommé premier ministre. Sous sa conduite le pays connaît un véritable décollage économique. Le chômage qui touchait un tiers de la population se résorbe et la situation politique s’apaise. Sous son règne, jusqu’en 1995, les campagnes électorales engendrent successivement rapprochements et scissions. Gaétan Duval, Paul Bérenger et Anerood Jugnauth sont les principaux protagonistes de cette vie tumultueuse. En 1995, après treize ans de règne, Anerood Jugnauth perd les élections en grande partie à cause d’un affairisme débridé et d’un projet relatif à l’enseignement des langues, favorisant les Indiens, et juge discriminatoire. Il laisse la place à une coalition menée par Paul Bérenger et Navin Ramgoolan, le fils de Seewoosagur.
Les grands noms qui ont fait Maurice
Les familles
Terre d’immigrants venus d’Europe, d’Asie et d’Afrique, l’Île Maurice a inspiré à Claude Pavart un superbe ouvrage Mémoires de Couleurs, dans lequel il présente différentes familles représentatives de ce peuplement. Le 25 octobre 1992 plus de 800 descendants de la famille Koenig se réunissaient à Yemen, l’ancien domaine familial, pour fêter le deuxième centenaire de l’arrivée sur l’Île de leur ancêtre commun Jean-Antoine, originaire d’Allemagne, mais qui fut séduit par Maurice lors d’une escale sur la route des Indes. La présence des Maingard sur l’Île est attestée depuis 1747. Originaires de Saint-Malo, ces marins au long cours fondèrent une dynastie mauricienne, dont le membre le plus connu reste Amédée Maingard premier promoteur du tourisme et des communications aériennes internationales à Maurice.
C’est le même navire, l’Hindustan qui transporta de Calcutta, en Inde, jusqu’à Maurice, les ancêtres des deux premiers ministres d’origine indienne que connut l’île. Avocat, fondateur du MSM (Mouvement socialiste militant), premier ministre, sir Ancrood Jugnauth était le fils de modestes cultivateurs tandis que sir Seewosagur Ramgoolam, originaire du même milieu effectua des études de médecine avant de s’engager dans le parti travailliste.
L’immigration de la famille Tapesar dans l’Île a pour particularité d’être à l’origine une histoire d’amour. Les indiens qui venaient a Maurice étaient pousses par la famine et le manque de travail dans leur pays. Shivepuran Tapesar n’était pas dans ce cas, mais ayant eu le coup de foudre pour une jeune femme, alors qu’en Inde les mariages sont arrangés, une seule solution s’offrait aux amoureux, la fuite. C’est ainsi qu’ils s’embarquèrent pour Maurice. C’est encore la misère qui poussa nombre de Chinois à venir s’installer à Maurice, surtout dans le petit commerce. Ce sont eux qui .ont fait de Maurice « le petit dragon de l’Océan Indien », comme la famille Ah Chuen qui a fondé et détient la maison de commerce en alimentation ABC, ou les Lim Fat fondateurs de Suzy Toys et promoteurs de la zone franche à Maurice.
Français Leguat : naufragé de Dieu
François Leguat est né probablement vers 1638 en Bourgogne. De ses cinquante premières années on ne sait presque rien. En 1685, la révocation de l’édit de Nantes le ruine. Refusant de se convertir, il fuit en Hollande où il retrouve l’un de ses coreligionnaires, le marquis Duquesne, fils du célèbre amiral. Ce parpaillot l’aide à émigrer vers des contrées plus accueillantes. François Leguat décide de s’établir à la Réunion. Avec dix compagnons âgés d’une trentaine d’années ils arrivent en vue des côtes mais leur capitaine, pour d’obscures raisons, refuse de les y déposer. Bien malgré eux, ils se retrouvent le 1er mai 1691 sur Rodrigues, alors déserte. Ils débarquent avec « du biscuit, des fusils, de la poudre et du plomb, des outils pour l’agriculture et la construction de nos cabanes, en un mot de tout excepté des drogues pour des remèdes ». Aussitôt ils sèment des graines mais sans grand succès, excepté pour les melons. A l’époque, contrairement à aujourd’hui, l’île est couverte de « parfaitement beaux arbres, dont la verdure perpétuelle est tout à fait charmante.
Les vallons sont couverts de palmiers, de lataniers, d’ébéniers ». L’Île regorge de poissons, d’anguilles, mais aussi de solitaires et de tortues. « J’en ai vu qui pèsent autour de cent livres et qui ont assez de chair pour donner à manger à bon nombre de personnes. Cette chair est fort saine et d’un goût qui approche celui du mouton. Il y a dans cette Île une si grande abondance de ces tortues, que l’on en voit quelques fois des troupes de deux ou trois mille. Nous avions aussi des tortues de mer en grande abondance.
Leur chair a le goût du bœuf. Le lamantin se trouve aussi en grande abondance. Ils ne fuyaient point, tellement que nous pouvions choisir celui que nous voulions ». Aujourd’hui, solitaires, tortues de mer ou de terre et lamantins ont disparu. François Leguat et ses compagnons vivent comme des robinsons, parfaitement isolés du monde. En deux ans, ils ne recevront aucune visite. Aussi, au bout d’un an ils décident de construire un radeau pour rejoindre Maurice d’où l’on « peut s’embarquer pour aller où l’on veut ». Hélas, cette première tentative échoue. Il y en eut d’autres au cours desquelles l’un des compagnons mourut en mer.
Enfin, le 21 mai 1693, ils montent à bord de leur précaire embarcation et huit jours plus tard ils arrivent à Maurice. Ils n’étaient pas au bout de leurs peines car un des compagnons de Leguat ayant rapporté de l’ambre gris de Rodrigues, le gouverneur hollandais de Maurice les accusa de l’avoir volé et les exila sur l’Ile aux Fouquets. Ils n’étaient plus que quatre et ce n’est que le 16 décembre 1696 qu’ils eurent enfin le droit de quitter Maurice pour Batavia. Le 28 juin 1698 François Leguat arriva en Hollande où il allait publier le récit de ses aventures.
Le naufrage de Pieter Both
En 1615, l’amiral hollandais sombra corps et bien au large de Maurice. Quatre navires disparurent d’un seul coup. En 1980, deux plongeurs français retrouvèrent l’épave du Banda. Ils exhumèrent du vaisseau services à thé, coupes, assiettes, flacons à alcool. Ces merveilles avaient conservé leur fameux bleu cobalt. Une dernière surprise attendait les plongeurs : un rarissime astrolabe daté de 1518.
Jacques Désiré Laval : un saint vénéré
Rien n’appelait ce Normand à la sainteté. Né en 1803 à Croth, près d’Evreux, il devient d’abord médecin. Un accident de cheval et la rencontre avec un prêtre modifient son destin. A trente-sept ans il est ordonné prêtre. Quatre ans plus tard, en 1841, il débarque à Maurice. Il se voue aux pauvres, aux lépreux, et surtout aux esclaves qui viennent d’être émancipés. L’apôtre des noirs, comme le surnomment les Mauriciens, est réputé soigner tous les maux : physiques, de cœur ou d’argent. Il contribue très largement à christianiser la population créole. Cette vie exemplaire conduit Jean-Paul II à le béatifier en 1979. Chaque année, pour l’anniversaire de sa mort le 9 septembre 1864, des dizaines de milliers de pèlerins de toutes confessions convergent vers son tombeau situé à Sainte-Croix, près de Port-Louis.