On l’appelle l’île de l’éternel printemps, ou encore le jardin de l’Atlantique. Depuis plus d’un siècle, Madère enchante les amoureux de nature tropicale, de paysages grandioses, de chaleur tempérée par le vent du large, et aussi de bon confort. Une destination rêvée pour oublier les turbulences du monde.
Adossée à un amphithéâtre de collines verdoyantes, la capitale de l’île garde intact son cachet de petite ville coloniale coquette et bien léchée.
Elle mêle avec bonheur immeubles d’aujourd’hui et nobles bâtiments d’autrefois, musées riches en œuvres d’art de toutes les époques et boutiques à la mode, hôtels de grand standing et ruelles animées tout au long du jour par une foule détendue.
Souvenirs d’un passé glorieux et plaisirs des vacances font ici un excellent ménage.

Le madère : du sec au doux

Les producteurs de madère se désolent que, pour nombre d’étrangers, leur vin ne serve qu’à parfumer les sauces.
Ce vin chaleureux titrant allègrement ses 18 degrés mérite en effet d’être mieux connu.
Il en existe quatre variétés dûment répertoriées, toutes obtenues après adjonction d’eau-de-vie et chauffage pendant quelques mois dans des étuves : le sercial, très sec, qu’il convient de boire vieux, à l’apéritif ; le verdelho, sec et demi-sec, très fruité, lui aussi recommandé à l’apéritif ; le bual, plus doux, assez corsé, idéal avec le fromage et le dessert ; enfin, le malmsey, ou malvazia, riche et sucré, que l’on boit après le café.
Chacune de ces catégories se décline en cinq, dix et quinze ans, leur prix variant évidemment selon l’âge.

Centre-ville

Depuis la zone des grands hôtels, entre l’Avenida Estrada Monumental et la mer, une jolie promenade mène au centre-ville en une trentaine de minutes à pied.
Plutôt que suivre directement l’Avenida do Infante, en bordure du Parque de Santa Catarina, les amateurs de belle nature préfèrent descendre la colline en zigzaguant à travers cet immense jardin dont les pelouses, les jets d’eau, les cafés en plein air et les terrasses fleuries dominant la baie cascadent vers le port. Les Madériens adorent venir y prendre le frais et les amoureux y chercher un coin tranquille.
On arrive bientôt au rond-point de la Praça do Infante, dominée par la statue de l’infant Henri le Navigateur.
C’est là que commence l’Avenida Arriaga, artère principale de la ville, plantée de jacarandas, bordée d’élégantes boutiques, de cafés et de deux organismes particulièrement appréciés des visiteurs, la Société des vins de Madère et l’office du tourisme.

Madeira Wine Company

Entrée Rua de São Francisco, 10 ; ou Avenida Arriaga, 28. Tél. : 291740110. Ouvert du lundi au vendredi de 9 h 30 à 18 h 30, le samedi de 10 h à 13 h. Fermé dimanche. Entrée payante.
Ce monastère du XVIIIe siècle, devenu plus tard hôpital et prison, abrite depuis 1913 la société anglaise Blandy’s, fondée un siècle plus tôt et première exportatrice de madère, notamment vers la Scandinavie, les Etats-Unis, le Japon et la Grande-Bretagne.
En une heure environ, des guides francophones font visiter par petits groupes l’ancienne salle des pressoirs, les chais, où certains vins dorment depuis 1908, le musée du Commerce du vin.
Pour finir, on déguste gratuitement des madères vieux de cinq ans et, moyennant quelques dizaines de cents de plus, des vins de plus de quinze ans.
Tout à côté, le Jardim São Francisco abrite une collection d’arbres somptueux.

Suivez le guide !

Vous aimez les azulejos ? Alors détaillez ceux qui décorent la façade de la boutique Toyota (à l’angle des Avenidas Arriaga et Zarco).
Ils décrivent la vie à Madère au siècle dernier. Ce sont des classiques du genre.

Palácio de São Lourenço

Ouvert tlj sauf dimanche de 10 h à 13 h 30. Entrée libre.
Juste en face du jardin municipal, entre l’Avenida Arriaga et le boulevard du bord de mer qui lui est parallèle, l’ancienne forteresse São Lourenço aligne ses murailles ocre clair et ses volets vert foncé encadrés de pierre de lave.
Occupée aujourd’hui par le gouverneur militaire et par le représentant du gouvernement de Lisbonne, elle ne laisse visiter que trois petites salles consacrées à l’histoire militaire de l’île.
Un peu plus loin, la statue de João Gonçalves Zarco, découvreur de Madère, trône au cœur de la partie la plus élégante de la ville.
Encore quelques dizaines de mètres, et on arrive devant la cathédrale, la fameuse Sé, au centre de la ville.

On aperçoit de loin son clocher au toit pyramidal décoré de carreaux de faïence étincelant au soleil. Commencée en 1485, c’est la première cathédrale construite par les Portugais hors d’Europe.
Sa façade blanche, sur laquelle se détache un simple portail gothique en pierre de lave, joue l’extrême austérité.
L’intérieur, au contraire, éclate d’exubérance, avec son plafond « artesonado » en bois de cèdre incrusté d’ivoire représentant le monde des Grandes Découvertes. La patine des siècles en a quelque peu obscurci les couleurs.
En revanche, le retable du maître-autel, les statues des stalles en bois doré et les ogives aux motifs floraux ont gardé toute la fraîcheur de leur jeunesse.
Les visites sont autorisées à condition de ne pas troubler les offices religieux. Or six messes sont dites ici le dimanche et cinq les jours de semaine. Et, à chaque fois, la cathédrale est comble.

Suivez le guide !

Les guides oublient souvent de le signaler : un très pittoresque marché aux fleurs avec marchandes en costume local se cache à l’ombre de la cathédrale (Rua do Aljube).

Rua José de Almeida

Démarrant au pied même de la cathédrale, elle descend en une centaine de mètres vers le front de mer.
Cette large voie au pavage géométrique noir et blanc est l’une des haltes favorites des étrangers comme des Madériens.
On reprend des forces dans l’un des trois cafés qui la bordent, on y consulte ses guides et ses plans, tandis que, indifférents au monde, des vieux assis sur des bancs à l’ombre se disent trois mots à l’heure et regardent sans probablement les voir les visiteurs qui déambulent sans fin.

Eblouissants « azulejos »

On en trouve partout : sur les façades ou à l’intérieur des immeubles officiels, des banques, des hôtels, des restaurants.
Comme au Portugal continental, ces céramiques monochromes ou très colorées, représentant des motifs géométriques, des fleurs, des scènes de la vie quotidienne d’autrefois, enjolivent et égaient les surfaces les plus mornes.
Leur origine remonte à l’occupation de la péninsule par les Maures. Depuis, elles ont fleuri sous toutes les formes et dans tous les styles. Les plus anciennes sont aujourd’hui dans les musées, mais on continue d’en produire de fort intéressantes. Aussi bien pour les amateurs locaux que pour les visiteurs.

Autour de la Rua João Tavira

La partie la plus animée de la ville, et la plus commerçante, se trouve cependant un peu plus haut, dans le quartier qui grimpe au-dessus de la cathédrale. Boutiques de mode et d’artisanat se tiennent au coude à coude dans cette rue et dans les petites ruelles qui la coupent à angles droits.
Quelques minutes de lèche-vitrines, et on débouche sur la plus belle place de la ville.

Praça do Município

Ses vastes proportions, ses vagues de pavés noirs et blancs, sa fontaine monumentale et surtout les bâtiments qui la bordent font de cette place la plus noble et la plus harmonieuse de Madère.
Elle s’étale au pied de l’Igreja do Colégio (église collégiale), édifice baroque construit au XVIIe siècle par les jésuites.
Derrière l’austère façade blanche aux fenêtres encadrées de basalte, on découvre de vertigineux plafonds peints et un chœur éblouissant d’or.
Sur une autre face, la Câmara Municipal (hôtel de ville) arbore de superbes balcons en fer forgé.
Plus loin, l’ancien évêché baroque étend sa longue façade sur tout un côté de la place. C’est aujourd’hui le musée d’Art sacré, le plus riche de Funchal. Mais, attention, l’entrée se trouve dans une petite rue de l’autre côté du bâtiment.

Museu de Arte Sacra

Rua do Bispo, 21. Ouvert du mardi au samedi de 10 h à 12 h 30 et de 14 h 30 à 18 h, le dimanche de 10 h à 13 h. Fermé lundi. Entrée payante.
Des morceaux de musique baroque résonnent dans les différentes salles de cet ancien évêché transformé en musée en 1955. C’est le plus riche en œuvres d’art de Madère.
Consacré essentiellement à l’art religieux, il présente de nombreux objets sacerdotaux, notamment une gigantesque croix de procession en argent doré du XVIe siècle ciselée comme un immense bijou et de superbes bois dorés du XVIIe siècle.
Parmi les sculptures, la plupart d’origine flamande, l’une des plus impressionnantes est un terrifiant Christ en croix en bois polychrome réalisé dans un atelier de Malines aux environs des années 1500.
Ce sont cependant les peintures qui ont ici la part la plus belle. Certaines, échangées contre des pains de sucre aux XVe et XVIe siècles, viennent des Flandres. Ainsi un triptyque originaire d’Anvers, représentant une pathétique Descente de croix, et une Adoration des Rois mages, également du XVIe siècle anversois.
En moins grand nombre, les peintres de Madère sont également représentés.
Ils témoignent généralement d’une moins grande habileté que leurs maîtres du Nord, mais leur fraîcheur est très touchante.

Des trésors venus des Flandres

On peut être surpris de découvrir, dans la lointaine Madère, tant d’œuvres originaires des Flandres.
C’est oublier qu’au XVIe siècle Philippe II d’Espagne, qui avait hérité l’actuelle Belgique de son père Charles Quint, était aussi devenu roi du Portugal et que d’étroits rapports commerciaux s’étaient noués entre les deux provinces, si dissemblables mais si complémentaires. Très vite, les producteurs de canne de Madère imaginèrent de se faire payer leurs précieux pains de sucre en œuvres d’art, dont l’île manquait cruellement.
Bientôt, chacun, ordres religieux comme riches particuliers, voulut posséder des œuvres dans le goût flamand. Il ne restait plus aux artistes locaux qu’à s’inspirer de la nouvelle mode. Ce qu’ils firent, comme on peut le voir au musée d’Art sacré.

Museu Henrique e Francisco Franco

Rua João de Deus, 13. Ouvert du lundi au vendredi de 10 h à 12 h 30 et de 14 h à 18 h. Entrée payante.
Caché dans une belle maison des années 1940, il est consacré à deux artistes ayant vécu et travaillé dans la première partie du XXe siècle.
Ils étaient deux frères Franco de Sousa, l’un peintre, l’autre sculpteur. Ils vécurent tous deux dans le milieu artistique du Paris des années 1920, devinrent amis avec Modigliani et Picasso, et connurent à Montparnasse une flatteuse renommée.
Rentrés ensuite au pays, Henrique réalisa des portraits très apaisés et Francisco des sculptures et des gravures nettement plus tourmentées. Ce musée rassemble quelques-unes de leurs œuvres les plus représentatives.

Instituto do Bordado

Rua Visconde do Anadia, 44. Ouvert du lundi au vendredi de 9 h 30 à 18 h. Entrée payante.
Dans un décor évoquant l’intérieur d’une maison madérienne de la fin du XIXe siècle, c’est toute l’histoire de la broderie que raconte ce charmant musée, trop souvent ignoré des visiteurs. On y découvre de petites merveilles, réalisées par les femmes de villages perdus.
On y suit l’évolution des différentes techniques. Au cœur de la fièvre d’une grande ville d’aujourd’hui, c’est un rafraîchissant retour dans la société rurale d’autrefois.

Mercado dos Lavradores

Rua Doutor Fernão Ornelas. Ouvert tlj sauf dimanche de 7 h à 17 h.
C’est le marché couvert, le seul de la ville. L’une des grandes vedettes de Funchal. Toute la ville, visiteurs compris, se retrouve chaque matin (le plus tôt est le mieux), surtout le samedi, dans cette grande bâtisse des années 1940 consacrée aux nourritures terrestres et marines.
On commence par flâner dans le marché aux fleurs, situé sous les arcades, juste à l’entrée, avec ses femmes obligatoirement vêtues à l’ancienne d’un corselet rouge brodé et d’une jupe aux rayures de couleurs vives.
Puis on s’aventure dans le patio central où s’alignent des monceaux de légumes verts et de fruits exotiques, bananes, mangues, avocats, oranges, citrons, fruits de la passion, tous originaires de l’île et soigneusement rangés à l’ombre de quelques arbres.
Sur l’un des côtés couverts, les bouchers jouent allègrement du tranchoir, tandis qu’à l’extrémité du bâtiment les poissonniers débitent avec force exclamations les thons et les espadas pêchés le matin même.
Dans les galeries du premier étage, on retrouve les mêmes alignements de fruits et légumes, avec, en guise de cadeau, une vue plongeante sur le patio aux étalages zébrés par le soleil. Un monde chaleureux, pittoresque, qui donne délicieusement faim.

Núcleo Museológico A Cidade do Açúcar (Musée municipal du Sucre)

Praça Colombo, 5. Ouvert du lundi au vendredi de 10 h à 12 h 30 et de 14 h à 18 h. Fermé samedi, dimanche et jours fériés. Entrée payante.
Tout ce qu’il faut savoir sur le sucre et son commerce, qui enrichit Madère aux XVe et XVIe siècles.
Belle collection de bijoux illustrant cette prospérité, de tableaux et d’objets décoratifs.

Suivez le guide !

Si vous avez loué une voiture, ne l’utilisez surtout pas dans le centre-ville : se garer y est impossible, et la police très vigilante. Les distances sont d’ailleurs très courtes. Tout peut se faire à pied.