Les plaines constituent, à la Réunion, le troisième niveau d’altitude de colonisation humaine après le littoral et les hauts. Elles s’étalent entre l’ancien massif du piton des Neiges, creusé de ses trois immenses cirques, et le massif plus récent du piton de la Fournaise où frémit le volcan.
Le Tampon
A 10 km au nord de Saint-Pierre.
La RN 1 qui arrive aux abords de Saint-Pierre sous la forme d’une quatre voies bifurque soudain en changeant de numéro à l’approche de la capitale du sud de la Réunion. La RN 3 se lance alors, telle une flèche d’asphalte, à l’assaut de la montagne, longue, rectiligne et étonnamment pentue pour une route de ce calibre. La RN 3 est tout simplement la seule route qui coupe l’île par son centre et la portion à quatre voies prend fin au Tampon.
Rappel historique
Cette vaste commune qui s’étage de 400 à 2 000 m d’altitude trouve son origine dans le développement d’un immense domaine agricole sous l’impulsion de la famille de Kerveguen qui y érigea, à partir de 1830, un véritable empire. Les de Kerveguen devinrent en peu de temps les plus gros propriétaires terriens de la Réunion et leur richesse était telle qu’ils firent frapper leur propre monnaie pour payer leurs ouvriers agricoles.
Mais en 1880, l’administration française interdit cette pratique et la famille de Kerveguen dut rembourser toutes les pièces en circulation, ce qui provoqua sa ruine. La ville doit son nom à une tradition maritime puisque les tampons qui servaient à colmater la coque des bateaux étaient fabriqués au débouché de la ravine éponyme. Une autre version affirme que Tampon serait le dérivé du mot malgache tampony qui signifie « petite colline ».
Aujourd’hui, le Tampon est une commune calme et étonnement fleurie, essentiellement réputée pour son air pur et le plus grand collège de France. Héritage des temps anciens, l’agriculture est consacrée, autour du Tampon, aux cultures maraîchères et fruitières. On y trouve aussi de nombreux champs de géraniums, ce qui a incité la cité à s’autoproclamer capitale mondiale du géranium, en grande rivalité avec Saint-Paul.
La ronde des plantes à parfum
Originaire d’Afrique du Sud, le géranium fut introduit vers 1870 et sa culture se développa en altitude, fournissant après distillation une essence d’une exceptionnelle qualité qui fut adoptée par les plus grands parfumeurs de la planète. Pourtant, son économie est en déclin et il n’est plus désormais cultivé que du côté de La Petite-France. Même destin pour le vétiver et le champac d’Inde et l’ilang-ilang d’Asie qui ont, comme le géranium, assuré la survie des campagnes éloignées pendant un demi-siècle.
Plaine des Cafres

La Réunion volcan – Paysage de la plaine des Cafres By: R E M I B R I D O T – CC BY-NC-SA 2.0
A 25 km au nord de Saint-Pierre.
La RN 3 se poursuit, au-delà du Tampon, en lacets serrés qui grimpent à l’assaut de la montagne. Le nom des villages disparaît au profit d’une appellation kilométrique (le douzième, le quatorzième, le dix-neuvième…) par rapport au littoral et l’ensemble du paysage est le plus souvent noyé dans une épaisse brume d’altitude qui rafraîchit encore un peu plus l’atmosphère ambiante.
La montée se fait dans les arums et les genêts qui rappellent étrangement la Bretagne. Au sommet, on débouche sur une plaine d’altitude aux vastes prairies, donnant à la région des allures de Normandie avec ses vaches et ses exploitations agricoles, ou des Vosges avec ses grandes forêts de sapins.
Pâturages
Délimitée par les deux immenses ravines de la rivière des Remparts à l’est et du bras de la Plaine au nord-ouest, la plaine des Cafres doit son nom aux esclaves noirs (cafre en malgache) marrons (fugitifs) qui fuyaient le joug des planteurs de la côte. Les immenses pâturages sont le siège d’une industrie laitière en pleine expansion et de nombreuses laiteries vous proposent des dégustations de fromages frais.
On y élève aussi des chevaux et notamment des mérens, une race ariégeoise. Face à l’église du vingt-troisième, dénomination kilométrique du village de la plaine des Cafres, une route se dirige vers Bois-Court et offre un point de vue splendide sur les gorges du bras de la Plaine et Grand-Bassin, un îlet perdu au milieu de ce paysage encaissé.
Grand-Bassin
A 22 km au nord de Saint-Pierre.
Un sentier de 2 km permet de rejoindre ce bourg isolé, blotti au pied d’une belle cascade, et son adorable petit bassin. Ce sentier est, depuis quelques années, doublé par un monte-charge, seul vrai moyen de communication pour les habitants de l’îlet, qui disparaît sous une végétation exubérante dominée par de grands arbres fruitiers. A l’opposé de l’église de la plaine des Cafres, la route rejoint le petit village de Notre-Dame-de-la-Paix, puis le rebord de l’à-pic vertigineux de la rivière des Remparts.
Un point de vue encore plus sublime que le précédent, mais malheureusement souvent gâché par les nuages qui remplissent la vallée et viennent lécher les rebords où se trouve une aire de pique-nique. Le promeneur se consolera alors en observant, en fin d’après-midi, son ombre grandissante, projetée sur les nuages par le soleil déclinant.
Suivez le guide !
Allez découvrir l’horloge à eau de la plaine des Cafres au bord du rempart de Grand-Bassin d’où l’on a une vue plongeante sur le précipice et, de l’autre côté, le Dimitile.
Bourg-Murat
A 28 km de Saint-Pierre.
A la sortie de la plaine des Cafres bourg, un petit autel rouge dressé au bord de la route est dédié à saint Expédit, dont la statue semble regarder au loin le sommet du piton des Neiges. La route continue jusqu’à son point le plus élevé (1 666 m) où se dresse Bourg-Murat, le village d’importance le plus haut de l’île. Souvent noyé dans les brumes, Bourg-Murat est le point de départ de la route qui mène au volcan.
Maison du volcan
RN 3, tél. : 0262 59 00 26. Actuellement fermé pour rénovation. Réouverture courant 2012.
Conçue par les regrettés Maurice et Katia Krafft, volcanologues français disparus dans une nuée ardente ayant dévalé les pentes du mont Unzen au Japon, en 1991, la Maison du volcan est le passage obligé pour ceux qui désirent tout savoir sur le volcanisme en général et sur celui de la Réunion en particulier. Educative et ludique, la visite aborde ce domaine de manière à la fois scientifique et artistique.
Films, maquettes, animations, panneaux et expositions photos sont complétés par un centre de documentation ouvert au public et dans lequel on peut consulter l’un des 2 000 ouvrages consacrés à la volcanologie ou visionner un film parmi la centaine disponible. L’un des plus spectaculaires et inédits, La Fournaise, un volcan dans la mer, montre de somptueuses images sous-marines de la lave progressant sur le fond de l’océan.
Plaine des Palmistes
A 42 km au nord-est de Saint-Pierre.
Après Bourg-Murat, la route redescend dans un paysage désolé de landes d’altitude jusqu’au col de Bellevue, à 1 606 m, où elle plonge en lacets serrés dans les pentes abruptes du rempart de la Grande Montée. La descente se fait dans une végétation de plus en plus luxuriante au fur et à mesure que l’on approche de la plaine des Songes, quelque 400 m plus bas, porte d’entrée de l’immense plaine des Palmistes.
Randonnées forestières
Au bas de la descente, une petite route s’échappe vers la gauche à travers la Petite Plaine. Elle rejoint le col de Bébour qui ouvre sur l’extraordinaire monde végétal de la forêt de Bébour-Bélouve s’étendant à perte de vue jusqu’aux contreforts du cirque de Salazie. Cette immense forêt humide de montagne est dominée par les fameux tamarins des hauts, une espèce endémique aux troncs tortueux, contrastant avec les formes élancées des bois de couleur eux aussi endémiques, les fougères arborescentes et les cryptomerias du Japon. De nombreux sentiers de grande randonnée sillonnent cette forêt où l’on trouve aussi un gîte, le gîte de Bélouve.
De savoureux produits laitiers
Généralement absents sous les tropiques, les produits laitiers sont, à la Réunion, presque une spécialité locale. En effet, grâce à sa morphologie montagneuse, l’île s’enorgueillit d’un élevage bovin de qualité dans certaines parties de la région des Hauts où la production de lait est en perpétuelle et constante augmentation. Les Réunionnais sont ainsi devenus de gros consommateurs de fromages frais produits dans des fromageries traditionnelles.
Ils achètent aussi en grande quantité des yaourts pays, introuvables hélas en France, et qui utilisent naturellement les fruits et arômes locaux : ananas, litchis, goyave, sans oublier l’incontournable vanille Bourbon. A ne pas manquer si l’on est amateur de yaourt.
Trou de Fer
Au sud-est de Salazie.
L’un de ces sentiers conduit au Trou de Fer, aux abords immédiats du cirque de Salazie. Ce site, l’un des plus célèbres de la Réunion, débute avec le point de vue sur le bras des Cavernes. Plus loin, on découvre la première cascade de l’impressionnant trou, sorte de puits infernal de plus de 950 m de profondeur et dans lequel on ne peut descendre qu’en rappel ou en… hélicoptère.
Sentiers botaniques
Les moins courageux pourront se contenter de parcourir le sentier botanique de la Petite Plaine qui permet de découvrir de nombreuses essences en seulement une heure. Ce sentier débute au milieu d’un gigantesque parterre d’arums, aujourd’hui protégés de la cueillette sauvage. Un autre sentier botanique à La Ravine Plate permet lui aussi de faire connaissance avec les espèces endémiques de la Réunion.
La plaine des Palmistes doit son nom aux milliers de petits palmiers qui y poussaient auparavant et qui ont été décimés pour la succulence de leur cœur. C’est en effet avec ce dernier, issu du bourgeon terminal de l’arbre, que l’on prépare la fameuse salade de palmistes aussi appelée « salade du millionnaire ». L’arbre mourant hélas après avoir été étêté, ils n’ont pas résisté à la frénésie mercantile et les derniers spécimens sont aujourd’hui protégés.
Les deux villages
La plaine des Palmistes possède deux villages aux noms relativement simples. A partir du Deuxième Village, en amont, la grotte de la caverne des Fées est assez difficile à trouver, perdue au milieu des pâturages. C’est du Premier Village, en aval, que part le sentier qui mène à l’impressionnante cascade Biberon, haute de 240 m et qui constitue un agréable lieu de baignade, notamment après une grande randonnée en montagne.
Très verte car très arrosée, recherchée par les habitants de la côte pour sa fraîcheur, la plaine des Palmistes dresse ici et là ses coquettes cases créoles aux jardins fleuris. C’est aussi le domaine des goyaviers. La confiture de goyave est réputée sur toute l’île et même bien au-delà. La fête des Goyaviers se déroule en juin.
Les pique-niques
Le dimanche est un jour sacré. Et les Réunionnais en profitent pour faire de nombreux pique-niques. A la plage, sous les filaos, ou bien en montagne, près des lacs et des cascades comme dans les forêts d’altitude où elles trouvent une fraîcheur bien agréable en saison chaude, les familles se retrouvent en cohortes pour déjeuner, discuter, jouer et se reposer en plein air autour de nombreuses infrastructures prévues à cet effet un peu partout dans l’île.
Suivez le guide !
Si l’on vous propose discrètement, aux abords de la plaine des Palmistes, des cœurs de palmistes, il y a fort à parier qu’ils sont le fruit de coupes sauvages. N’encouragez donc pas cette pratique et refusez de les acheter.
Domaine des Tourelles
260, rue de la République, plaine des Palmistes, tél. : 0262 51 47 59. Ouvert du lundi au vendredi de 8 h 30 à 17 h, le week-end de 10 h à 17 h. Visite sur rendez-vous.
Dans une maison historique, située à l’entrée du Premier Village, on peut découvrir l’archipel des métiers d’art, un regroupement d’artisans travaillant notamment les produits végétaux. On peut aussi s’y promener dans un jardin agro-touristique sur le thème du thé et du goyavier.
Grand Etang
A 15 km de la plaine des Palmistes.
La plaine des Palmistes se termine en redescendant sur Saint-Benoît à une vingtaine de kilomètres des deux villages. Dans la descente, il ne faut pas manquer de bifurquer sur la gauche pour aller se détendre vers le Grand Etang, un splendide plan d’eau entouré de paysages sauvages qui cachent des cascades mystérieuses dans une forêt dense.
Les nombreux parcours de randonnée qui font notamment le tour du site ne sont pas tous aisés, certains offrant même quelques passages en échelle à déconseiller aux personnes sujettes au vertige. Le site, néanmoins grandiose, vaut largement que l’on s’y arrête une bonne demi-journée.