Capitale de 165 000 habitants, Lefkosia connaît aujourd’hui un formidable développement économique. La ville sait mêler l’animation d’une cité moderne et son riche passé historique pour offrir aux visiteurs le plaisir de découvrir une capitale cosmopolite où se mélangent l’innovation et la tradition. A la fameuse rue Ledra, artère principale de la vieille ville le long de laquelle s’élèvent des maisons anciennes, répond l’avenue Makarios dominée par des buildings conquérants. Tout en veillant sur son passé, Lefkosia, qui possède d’excellents hôtels et d’agréables tavernes à des prix raisonnables, tente d’épouser son siècle. Qui lui en voudrait ? Sa région est riche en sites archéologiques, monastères et églises. Elle mérite une visite, notamment à Tamassos, avec ses tombes royales, ou à Potamia, près de Dali. Une escapade au monastère de Machairas s’impose : niché dans la montagne, il attend les visiteurs désireux de découvrir les beautés du monde orthodoxe.

Lefkosia (Nicosie)

200709_Cyprus_18 © Franco Pecchio

200709_Cyprus_18 © Franco Pecchio

Rappel historique 
Ce sont les Français, les Lusignan, qui au XIIe siècle, ont donné le nom de Nicosie à cette ville, posée au cœur de la plaine fertile de la Mésorée, et que les Grecs appellent Lefkosia et les Turcs Lefkosha. Son origine est très ancienne. Lefkosia serait, en effet, construite sur le site de l’antique cité de Ledra fondée par Lefkon, un fils du souverain égyptien Ptolémée Ier. Son histoire est marquée par les tremblements de terre, les invasions, les épidémies, les incendies et les affrontements. Mais aussi par les Lusignan, qui firent de cette ville une des capitales les plus connues du monde médiéval pour ses richesses. Achéens, Byzantins, Français, Vénitiens et Ottomans s’y sont succédé : ces épisodes, tragiques ou heureux, appartiennent aujourd’hui à l’histoire, mais s’expliquent par la situation géographique de l’île, aux confins de l’Occident et aux portes de l’Orient. Au début du troisième millénaire, Lefkosia, depuis l’invasion de l’île en 1974 par l’armée turque, est toujours coupée en deux. Parpaings, sacs de sable et sentinelles indiquent, au milieu d’une rue, les limites à ne pas franchir. Près de la ligne de démarcation, quelques courageux tiennent table ouverte dans de petites tavernes. Les soirées y sont étonnantes. Sous un ciel étoilé et doux, la cuisine est grecque alors que s’élève, de l’autre côté du mur, l’âcre mélopée d’un muezzin. Les traces des combats de 1974 sont encore visibles, avec ce panneau routier, criblé de balles, indiquant la direction de Kyrenia et d’Ammochostos, aujourd’hui sous occupation turque. Toujours côté grec, Lefkosia est le siège du gouvernement légal de l’île, celui de la république de Chypre. Dans cette partie de la ville, il existe deux Lefkosia, la cité qui s’étend hors des remparts, et celle, enfermée dedans. La première, toujours en construction, témoigne d’un important dynamisme économique, avec son béton, ses hôtels internationaux et ses artères rectilignes. Les édifices anciens, les ruelles et les tavernes de la seconde placent cette dernière sous le signe du culturel et du spirituel. Le visiteur aura vite fait son choix.

Vieille ville 
Pour découvrir la vieille ville, des visites sont organisées gratuitement par le bureau de l’office de tourisme de Chypre, situé 11, rue Aristokyprou dans le quartier de Laïki Yitonia, à l’est de la place Eleftherias. Départ du bureau de l’office le lundi et le jeudi à 10 h.
Tout l’intérêt de Lefkosia se situe à l’intérieur de ses énormes remparts qui datent du XVIe siècle. Dominé par la place Eleftherias (place de la Liberté) où se trouve l’hôtel de ville, le vieux Lefkosia est traversé par d’innombrables ruelles où l’on voit parfois cuire, à même le trottoir, des brochettes. Les magasins regorgent de tissus multicolores, d’appareils ménagers et de vêtements. Les petits marteaux des ciseleurs d’orfèvrerie résonnent aux coins des rues. Une atmosphère d’autrefois. C’est dans ce quartier animé, peuplé d’églises anciennes et de vieilles demeures, que se trouvent notamment le musée d’Art byzantin et la cathédrale Saint-Jean.

Les remparts et la porte d’Ammochostos (Famagouste) 
Porte d’Ammochostos, rue Leoforos Athinon. Ouvert du lundi au vendredi de 10 h à 13 h et de 16 h à 19 h. De juin à août de 17 h à 20 h. Entrée payante.
C’est à partir des remparts que l’on pénètre dans la vieille ville, le cœur de Lefkosia. Cette imposante muraille, élevée par les Vénitiens pour se protéger des invasions arabes, a été érigée avec les pierres des édifices bâtis par les rois Lusignan. Longues de 4,5 km, les fortifications sont percées par onze bastions qui portent chacun le nom d’une famille de la cité des doges qui a financé leur construction. Trois portes permettaient d’entrer dans la ville. Au nord, se trouve la porte de Kyrenia, à l’ouest la porte de Pafos et à l’est celle d’Ammochostos. La première est en secteur turc, la seconde sur la ligne de démarcation, juste à côté de la seule église catholique de Lefkosia. Le secteur a toujours un triste aspect avec ses maisons éventrées. La troisième porte est celle de Ammochostos qui abrite le centre culturel municipal. Des armoiries vénitiennes ornent la façade.

Les icônes 
Pour bien comprendre une icône, il faut savoir que, dans l’esprit de son auteur, c’est une prière et non une peinture. Dans le monde orthodoxe, l’icône n’est pas une œuvre artistique mais une œuvre religieuse. Elle se veut le reflet du royaume de Dieu. C’est donc une expression liturgique lumineuse beaucoup plus qu’une démarche picturale. Il y a dans l’œuvre offerte à celui qui la contemple une vision du royaume de l’Eternel. C’est-à-dire que « ce n’est pas nous qui regardons l’icône, c’est l’icône qui nous regarde ». Avant de commencer son travail, l’auteur, bien souvent un moine, jeûne et prie. Il colle ensuite sur un morceau de bois une toile recouverte de peinture blanche. Les images sont peintes à la détrempe : les couleurs sont délayées dans de l’eau mélangée avec du jaune d’œuf, jamais à l’huile. Une fois son labeur achevé, le moine enduit son œuvre d’huile de lin pour renforcer sa résistance.

Suivez le guide ! 
Au 13 de la rue Aristokypou, une librairie désuète offre des livres anciens et neufs, certains écrits en français, sur l’histoire et l’art de Chypre.

Musée d’Art byzantin 
Place Archiepiskopou Kyprianou. Ouvert du lundi au vendredi de 9 h à 16 h 30 et le samedi de 9 h à 13 h. Entrée payante.
S’il n’y avait qu’une seule bonne raison de faire un voyage à Chypre, ce serait pour visiter ce musée. Ici, l’icône déploie ses fastes et ses couleurs. L’Entrée de Jésus à Jérusalem,La Descente de la croix et La Résurrection du Christ sont parmi les peintures sur bois les plus attachantes de cette collection, allant du IXe au XVIIIe siècle. Une icône de la fin du XIVe siècle montre, au bas de l’œuvre, les commanditaires habillés à l’européenne : chapeaux à larges bords et manteaux pour les hommes, cheveux tressés et ornés pour les femmes. Pas de doute, c’est bien l’époque des Lusignan.

Cathédrale Agios Ioannis 
Place Archiepiskopou Kyprianou. Ouverte du lundi au vendredi de 8 h à 12 h et de 14 h à 16 h. Le samedi de 8 h à 12 h. Entrée libre.
A côté du musée des Icônes, la cathédrale Saint-Jean a été construite en 1662. De très belles fresques illustrent des scènes de la Bible. Pour qui aime l’authenticité orthodoxe, les couleurs, les iconostases et l’encens, elle est un lieu de visite obligatoire. L’aigle orthodoxe domine la nef et ses visiteurs. Le monde hellène trouve ici toute sa signification.

Musée ethnographique de Chypre 
Place Archiepiskopou Kyprianou, à deux pas du musée des Icônes. Ouvert du lundi au vendredi de 9 h à 16 h. Entrée payante.
Consacré à l’art populaire de l’île, ce musée possède une belle collection couvrant le XIXe siècle et le début du XXe. Il présente des objets en bois sculpté, des tapisseries, de la broderie, des tissus traditionnels et des costumes folkloriques.

Eglise de la Panayia Chrysaliniotissa 
A partir de la place Archiepiskopou Kyprioanou, en passant par les rues Pentakilos, Theseus, Hector Eminos. Ouvert tlj de 8 h à 12 h et de 14 h à 18 h ainsi que pendant les offices. Entrée libre.
Selon la tradition, cette église, « Notre-Dame du Lin d’Or », aurait été construite par la reine Hélène Paléologue au XVe siècle. C’est la plus ancienne église byzantine de Lefkosia. Elle possède de précieuses icônes, dont certaines ont été peintes en 1740 et 1760.

Musée de la Lutte nationale 
A deux pas de la place Archiepiskopou Kyprioanou. Ouvert du lundi au vendredi de 8 h à 14 h et de 15 h à 18 h, fermé le jeudi après-midi en juillet et août. Entrée payante.
Ce musée présente des documents, des photos et des témoignages sur la lutte menée de 1955 à 1959 par les Chypriotes pour obtenir leur indépendance contre l’occupant anglais. L’extérieur du musée est particulièrement réaliste. Il représente, en effet, des hommes et des femmes sortant des geôles britanniques.

Une île grecque 
Chypre est une île de culture grecque. Ne dit-on pas que les Chypriotes parlent un grec qui s’apparente à la langue d’Homère ? Plus concrètement, l’hellénisation de l’île commence avec l’arrivée des Mycéniens et des Achéens. Des poteries trouvées à Engomi attestent la présence grecque à Chypre et une inscription figurant sur un bronze du XIe siècle av. J.-C. évoque le langage achéen. Tout au long de son histoire « agitée », l’île restera fidèle à l’hellénisme et à l’orthodoxie. Y compris pendant les trois cents ans d’occupation turque (1571-1871).

Quartier de Laïki Yitonia 
Situé entre la rue Ledra et la place Eleftherias, ce quartier du vieux Lefkosia est réservé aux piétons.Restaurées, rénovées, envahies par les tavernes, les boutiques et les touristes, ces « fausses » vieilles ruelles serpentent entre des maisons rappelant l’architecture d’une époque révolue. A voir, sans y rester trop longtemps, car les rues sont très bruyantes !

Maison de Hadjigeorgakis Kornessios 
20, rue Patriarchou Grigoriou. Ouverte du mardi au vendredi de 8 h à 15 h (17 h le jeudi) et le samedi de 9 h 30 à 15 h 30, fermée dimanche et lundi. Entrée payante.
Le bâtiment vénitien, reconstruit au XVIIIe siècle, était la demeure du drogman chargé des relations entre l’occupant turc et la population grecque. L’homme était riche et considéré. Dans cette maison, il faut notamment voir la salle de repos (et de loisirs) avec ses profondes banquettes recouvertes de tissu rouge et jaune et de gros coussins. Les meubles sont d’époque et traduisent l’opulence dans laquelle vivait Hadjigeorgakis. Aujourd’hui, la maison abrite un petit musée ethnologique.

Musée Leventis 
17, rue Ippokratous, près de Laïus Yitonia. Ouvert du mardi au dimanche de 10 h à 16 h 30. Entrée libre.
Ce nouveau musée, installé sur deux étages dans une maison restaurée, est dédié à la vie quotidienne de Lefkosia Lefkosia des temps anciens jusqu’à nos jours. Cartes, manuscrits, armes et mannequins de cire ressuscitent l’histoire de la capitale de Chypre. Ce musée, dont la conservatrice parle français, présente au fil de l’année des expositions temporaires qui sont bien souvent passionnantes ; la littérature, l’architecture, l’urbanisme et le vin ont ainsi été récemment des thèmes de manifestations particulièrement intéressantes.

Le drogman 
Le drogman était un Chypriote qui, à l’époque de l’occupation ottomane (1571-1878), servait d’intermédiaire entre les Turcs et la population locale. Il était chargé de collecter l’impôt. La position de ce notable, qui jouait habilement sur les deux tableaux, n’était cependant pas toujours aisée, même si sa fortune était considérable. Car si le drogman avait la vie facile, ses compatriotes croulaient sous l’impôt. Le mécontentement grondait quotidiennement et les révoltes locales furent nombreuses. Mais l’Ottoman veillait. Les questions administratives étaient, elles aussi, réglées entre les Turcs et les drogmans qui parlaient alors au nom de la population. Hadjigeorgakis Kornessios eut une triste fin. A la suite d’un conflit mal élucidé il se rendit à Constantinople où en 1809 la hache du bourreau lui trancha la tête.

Musée de l’Orfèvrerie chypriote 
7-9, rue Praxippou. Ouvert du lundi au vendredi de 10 h à 16 h 30. Entrée payante.
Le lieu incontournable pour découvrir l’orfèvrerie traditionnelle chypriote de la fin du XIXe siècle et du XXe siècle. Objets d’art sacré, bijoux, vaisselle d’argent et anciens outils des orfèvres y sont présentés.

Eglise de Trypiotis 
47-49, rue Solonos, près de Laïki Yitonia. Ouvert tlj de 8 h à 12 h et de 14 h à 18 h, ainsi que pendant les offices. Entrée libre.
Construit en 1695 par l’archevêque Germanos II, l’édifice possède une vaste iconostase supportant des icônes recouvertes d’or et d’argent. Cette richesse s’explique par la fréquentation de cette église, au début du XIXe et au XXe siècle, par les notables de Lefkosia.

Eglise d’Agia Faneromeni 
Rue Onasagorou. Ouvert tlj. Entrée libre.
Elevée en 1821, c’est la plus vaste église de Lefkosia ! Elle est chère au cœur des Chypriotes, car s’élève dans sa cour un mausolée de marbre sous lequel reposent les évêques et les prêtres exécutés en 1821 par les Turcs.

Mosquée Omériyé 
A l’angle de la rue Trikoupi et de la place Tillirias. Ouverte tlj en dehors des heures de prière. Entrée libre.
L’ancienne église augustinienne de Sainte-Marie bâtie au XIVe siècle a été convertie en mosquée en 1571, par Mustafa Pacha. Tout simplement parce qu’il croyait que le prophète Omer s’était reposé à cet endroit lorsqu’il visita Lefkosia. Il ne reste plus que des vestiges de cette ancienne église détruite par l’artillerie ottomane lors du siège de la ville. Sa visite est surtout intéressante pour découvrir son sol, dont le revêtement est formé par des pierres tombales de l’époque des Lusignan.

Centre d’artisanat de Lefkosia 
186, rue Leoforos Athalalus. Ouvert du lundi au samedi de 8 h à 13 h et de 14 h 30 à 17 h 30, d’octobre à avril et de 16 h à 19 h de mai à septembre. Fermé les mercredi et samedi après-midi.
C’est l’endroit idéal pour acheter des souvenirs : poterie, tissage et bijoux.