Hors les remparts

Musée archéologique 
1, avenue Mouseiou. Ouvert du mardi au vendredi de 8 h à 16 h (17h le jeudi), le samedi de de 9h à 16h et le dimanche de 10 h à 13 h. Fermé le lundi. Entrée payante.
Dans ce musée, fondé en 1908 par les Anglais, on trouve la plus importante collection d’antiquités de Chypre, de l’époque néolithique à la période byzantine. Les collections, totalement méconnues, valent celles que l’on peut voir au musée d’Athènes, même si les salles trop petites de ce musée ne peuvent toutes montrer au grand jour le riche passé de l’île. De nombreuses pièces sont encore abritées dans ses réserves, et les autorités ont le projet de rénover et d’agrandir ce musée si riche. Les premières salles présentent le fond des âges de l’histoire chypriote. Admirables poteries dont les couleurs illuminent les vitrines qui les renferment. D’autres, importées de Grèce et de Syrie, témoignent des échanges qui avaient lieu au cours de la haute Antiquité dans cette partie de la Méditerranée orientale. Le sens artistique des sculpteurs de l’aube des temps est illustré par une petite idole cruciforme en stéatite gris vert, datant de près de 3 000 ans av. J.-C. et découverte dans la région de Pafos. Non loin, un petite terre cuite représente une énigmatique cérémonie sacrée, célébrée dans un enclos. Cette pièce étonnante qui date de l’âge du bronze ancien a été trouvée dans une tombe de la nécropole de Vouni.

La salle IV 
Elle possède une impressionnante vitrine guerrière : deux mille statuettes en terre cuite, du VIIe siècle avant notre ère et découvertes à Agia Irini. Une armée de soldats prêts à attaquer un ennemi, sorti, comme elle, de la nuit des temps.

Suivez le guide ! 
Au détour d’une salle, une statue en bronze représente un dieu à la tête ornée de cornes. Cette représentation rare est encore un mystère pour les archéologues.

La salle V 
Elle accueille le visiteur avec une série de statues dont la plus célèbre et la plus belle est le marbre d’Aphrodite. Trouvée à Soli, elle date du 1er siècle av. J.-C. Grâce à ses formes sensuelles et très proportionnées, elle figure sur toutes les publicités évoquant Chypre. A ses côtés, « un Eros endormi », qui s’est assoupi à Pafos, demeure une des pièces maîtresses du musée.

La salle VI 
Elle est réservée aux Romains et est dominée par l’immense statue (2,08 m) en bronze de l’empereur Septime Sévère, entièrement nu, et trouvé dans le village de Kythréa, près de Lefkosia.
Trois autres salles montrent le résultat des fouilles d’archéologues français à Engomi, aujourd’hui occupée par les Turcs. Le musée possède aussi de riches collections d’objets de la vie quotidienne, dont un vase à boire (le rhyton) trouvé à Larnaka et évoquant, sur un fond bleuté et or, une chasse au taureau, des bijoux et des pièces d’or, dont certaines appartenaient au roi Evagoras Ier, souverain de Salamine. La richesse antique de cette cité, occupée aujourd’hui par l’armée d’Ankara, éclate au grand jour, salle XI, où sont exposés des vestiges d’une tombe royale : magnifique chaudron en cuivre orné de griffons, trône incrusté d’argent et lit en ivoire. Enfin, juste avant de quitter le musée, dans l’ultime salle, fixée au mur, une splendide mosaïque, du IIIe siècle après J.-C., représentant Léda et le cygne.

Monastère Saint-Barnabé, Chypre occupé © George M. Groutas

Monastère Saint-Barnabé, Chypre occupé © George M. Groutas

Dans Lefkosia occupée 

Depuis 1974, date de l’invasion de Chypre par l’armée turque, la partie nord de l’île est occupée. Ainsi, Lefkosia est la dernière capitale au monde à être coupée en deux par un « mur ». Il est moins triste et moins agressif que ne l’était celui de Berlin, mais son efficacité est la même. Il interdit aux Chypriotes grecs de passer de « l’autre côté ». Avant d’entrer dans Lefkosia occupée, on se souviendra que deux mille Chypriotes grecs ont disparu lors de l’invasion turque, que deux cent mille d’entre eux (le tiers de la population d’alors) ont dû se réfugier dans la partie sud de l’île et que de nombreuses églises, mosaïques et icônes ont été dégradées, vendues à l’étranger ou brisées.

Lefkosia-Sud, c’est l’Occident, Lefkosia-Nord, c’est l’Orient. L’atmosphère du quartier turc est, en effet, totalement différente de celle de la partie grecque de la ville que l’on vient de quitter. Moins aisé et plus anarchique, le secteur a pour centre la place Kemal-Atatürk. Non loin de cette place se trouve la mosquée Selïmyie. C’est, en fait, l’ancienne cathédrale gothique Sainte-Sophie transformée en 1571 en lieu de culte musulman après la prise de Lefkosia par les Turcs.

La première pierre de cette cathédrale a été posée en 1209 par Alix de Champagne-Jérusalem, épouse du roi Hugues Ier Lusignan, et que, plus tard on appela « la Mezele » (la lépreuse). A l’heure où, en France, on élevait les cathédrales gothiques de Paris, d’Amiens et de Reims, les Lusignan, à Chypre, dressaient Sainte-Sophie à Lefkosia et Saint-Nicolas à Ammochostos.
Les spécialistes affirment que le dessin de Sainte-Sophie et son immense déambulatoire rappellent Notre-Dame de Paris. Il est possible que sa construction ait été menée à bien par un maître d’œuvre venu de France. Son porche à trois portes sculptées est splendide. Même si deux minarets remplacent les deux tours gothiques, même si les statues, les vitraux, le baptistère et le mobilier ont été détruits, même si le mihrabtourné vers La Mecque a chassé l’autel, la visite de Sainte-Sophie est émouvante. Car sous ses voûtes, les princes Lusignan, pendant près de trois siècles, ont été couronnés rois de Chypre. Et si un visiteur, un peu curieux, soulève, très discrètement, le tapis qui recouvre le sol de la mosquée Soleymanie, il découvrira, rongées par le temps, les pierres tombales des chevaliers et nobles français dont l’aventure est, aujourd’hui, bien oubliée.

Avec Sainte-Sophie et Saint-Nicolas, Chypre est le seul pays au monde à posséder des mosquées gothiques. A côté de la mosquée Soleymanie, on pourra également voir le Bedestan qui est l’ancienne église Saint-Nicolas-des-Anglais. Bâtie au XIIIe siècle, elle a été transformée en marché couvert où l’on vend des tissus. Très délabré, cet édifice possède encore sur son linteau des armoiries de la noblesse française de l’époque des Lusignan. Enfin, le quartier turc accueille, non loin de la place Kemal-Atatürk, une autre mosquée, Maydar Pacha, elle aussi ancienne église bâtie au XVe siècle et qui portait le nom de Sainte-Catherine.

Point de passage 
Comme hier à Berlin, il existe un point de passage entre Lefkosia-Sud, territoire de la république de Chypre, et Lefkosia-Nord, territoire occupé par l’armée turque. Ce point de passage se situe à la porte de Pafos, en prenant juste à droite à l’entrée du sens giratoire. C’est la rue Marcou Drakou. Tout au long de la rue déserte, ce ne sont que maisons éventrées, édifices dévastés et bâtiments abandonnés. Au milieu de l’artère se trouve l’ancien hôtel Ledra-Palace. Quelques mètres plus loin, on arrive au début de Lefkosia-Nord. Une guérite attend le visiteur, qui doit, pour aller de l’autre côté, présenter son passeport à un fonctionnaire turc. Une fois passé, une ribambelle de taxis va lui proposer une visite de la ville occupée. Attention : les prix de la course, pour une journée seulement, sont à discuter et il n’est pas possible d’aller partout, certaines zones étant réservées uniquement aux militaires. Le retour, le soir, à son point de départ est obligatoire.

Suivez le guide ! 
Face au musée, deux superbes alignements d’immenses palmiers attendent le visiteur, et l’on prendra, pour se reposer, un verre au café Garden, situé juste à côté.

Les environs de Lefkosia

Depuis 1974, le nord de l’île est occupé. Il n’est donc pas possible de vagabonder comme on le désire de ce côté de Chypre. A partir de Lefkosia, il faut donc prendre la direction du sud et de l’ouest, vers la côte ou les monts du Troodos. De nombreux sites et édifices remarquables jalonnent ces routes qui traversent la plaine agricole de la Mésorée, où les arbres fruitiers et les légumes abondent. En direction de Larnaka, dans les faubourgs de Lefkosia, à Aglantzia, on rencontre des chapelles du XVIIIe siècle comme celles de Panagia et Agios Georgios (la clé est à demander au café situé à côté de ces édifices).

Aglantzia 
Dans les faubourgs de Lefkosia.
Musée d’Histoire naturelle de Chypre 
Fondation Photos Photadies. Sur la place du village. Ouvert du lundi au vendredi de 8 h à 16 h. Entrée libre.
Y est rassemblée une importante collection d’oiseaux, reptiles, fossiles, roches et différentes espèces marines.

Latsia 
A 10 km de Lefkosia, en direction de Lemesos.
Les gorges de Kakaristra 
Latsia. Visites sur demande en appelant au 02 48 84 85
Une curiosité géologique, résultat d’une érosion millénaire !

 

Dali (Idalion) 
A 20 km de Lefkosia, en direction de Lemesos, sur l’autoroute, sortir à Nissou et continuer pendant 3 km sur la route qui mène à Lympia.
Le visiteur est accueilli par les citronniers et les orangers. Sur la colline qui domine Dali se dressent les vestiges de l’une des dix cités-royaumes de Chypre : Idalion. Les archéologues fouillent toujours le site, et seuls les restes d’une muraille qui ceinturait la ville ont pour l’heure été mis au jour. C’est tout ce qui reste de la riche Idalion, dont les beautés furent dispersées de par le monde. La mythologie raconte que c’est à Idalion qu’Adonis, blessé mortellement par un sanglier lâché par Arès jaloux, mourut dans les bras d’Aphrodite qui l’aimait passionnément. Le sang du jeune dieu se répandit dans un champ voisin et le couvrit de fleurs… Zeus, compatissant, autorisa Adonis à revoir, à chaque printemps, sa chère déesse. C’est pour cette raison qu’à cette courte saison, l’île est recouverte de coquelicots et de boutons d’or.

Pera Chorio 
Entre Nissou et Dali. Ce petit village mérite qu’on s’y arrête pour son église byzantine Agioi Apostoloi. Peu connue, elle offre néanmoins de très belles fresques datant du XIIe siècle (la clé est à demander au café ou au pope).

Potamia 
Sur la route de Lefkosia, prendre à Dali la direction de Pyrogi.
Ici se trouvent les ruines du palais d’été des rois Lusignan qui côtoient les vestiges d’une église gothique.

 

Lake near Tamassos Chypre

Lake near Tamassos Chypre By: Reinhold BehringerCC BY-NC-SA 2.0

Politiko (Tamassos) 
A 20 km au sud-ouest de Lefkosia, en direction de Lemesos. Tombes royales. Ouvert tlj de 8 h 30 à 16 h de novembre à mars, de 9h 30 à 17 h d’avril à octobre. Entrée payante.
En traversant le quartier de Strovolos et les villages de Lakatamia, Deftera et Episcopi, on arrive à Politiko. C’est un bourg traditionnel chypriote, avec son église, son café et ses petites maisons aux tuiles rouges et aux toits plats hérissés aux quatre coins de tiges de fer, prêtes à accueillir un étage supplémentaire. 

Le visiteur est au cœur de l’ancienne cité de Tamassos, dont la renommée s’était répandue, dans l’Antiquité, tout autour de la Méditerranée à cause de ses fonderies où l’on travaillait le cuivre et le bronze. La déesse Athéna affirme dans l’Odyssée : « J’ai mon navire et j’ai mon équipage, sur les vagues vineuses, je vais à Témésa (Tamassos) chez les gens d’autres langues, troquer mon fret de fer luisant contre du bronze. » Aujourd’hui, Tamassos, qui a honoré Apollon et Aphrodite, n’est qu’un champ de fouilles archéologiques.

Suivez le guide ! 
Le mystère entoure toujours les impressionnantes tombes royales de Tamassos, qui datent du VIe siècle av. J.-C. : nul ne sait qui a creusé et décoré cette nécropole.

Couvent d’Agios Irakleidios 
Politiko, à 500 m des tombes royales. Visites le lundi, mardi et jeudi de 9 h à 12 h.
Détruit et reconstruit à plusieurs reprises, ce monastère porte le nom du saint homme qui a accueilli à Tamassos saint Paul et saint Barnabé. Les religieux qui vivent dans ce couvent veillent jalousement sur leurs icônes et leurs mosaïques datant du premier âge du christianisme.

Monastère de Machairas 
A 40 km au sud de Lefkosia, en passant par les villages de Deftera et Pera. Visite : du lundi au vendredi de 8 h 30 à 17 h 30, en groupe le lundi, mardi et jeudi de 9 h à 12 h. Entrée payante. On peut également de Tamassos se rendre à Machairas à distance d’environ 10 km sur des routes secondaires.
Bâti au XIIe siècle et blotti dans un creux de montagne qui appelle au respect et au silence, Machairas est un des monastères les plus intéressants de l’île. La règle y est aussi stricte que les icônes gardées dans la chapelle sont brillantes. On peut voir dans la sacristie de vieux livres et les manuscrits du monastère. En visitant Machairas, on n’oubliera pas que celui-ci a été un haut lieu de la lutte pour l’indépendance. A quelques mètres du monastère apparaît, en effet, l’entrée de la grotte où, le 3 mars 1957, Grégoire Afxentiou, un des chefs du combat contre les Anglais, choisit de se laisser brûler vif plutôt que de se rendre aux soldats de Sa Majesté britannique. Une vitrine montre certains objets personnels du résistant qui, poursuivi par les troupes anglaises, avait trouvé refuge dans le monastère.

Fikardou 
A 1,5 km à l’est du village de Gourri, par la route qui va du monastère de Machairas à Lefkosia.
C’est un très beau village restauré, à l’architecture du XVIIIe siècle. Afin de sauvegarder le style et les boiseries des maisons rurales d’autrefois, le site a été déclaré « zone protégée ». A voir absolument, avec leur balcon et leurs pan de bois, les demeures de Katsinioros et d’Achilleas Dimitri construites, elles, au XVIe siècle. La restauration de l’ensemble du village a reçu le prix « Europa Nostra » 1987. Une belle balade dans la Chypre d’hier.

Eglise de Peristerona 
A 27 km de Lefkosia sur la route du Troodos. Ouvert tlj, horaires variables.
Bâtie au Xe siècle, cette église, située au bord d’un torrent, dédiée à saint Barnabé et à saint Hilarion, est l’une des plus anciennes de l’île. Cinq dômes disposés en forme de croix traduisent la vigueur de l’architecture byzantine. Des icônes du XVIe siècle et de belles portes sculptées attendent, à l’intérieur, le visiteur.

Souvenirs médiévaux 
Avant d’arriver à Peristerona, en venant de Lefkosia, le village d’Akaki possédait au XIVe siècle un rendez-vous de chasse construit par le roi Lusignan Henri II ; il fut, au siècle suivant, le fief et la propriété du Sicilien Nicolas Morabit, un fidèle de Catherine Cornaro, la dernière reine de Chypre. Au sud d’Akaki, la route butte sur un torrent et s’arrête au village de Minakon, ancien domaine du seigneur français Henri de Giblet. Ce vicomte de Lefkosia a été l’âme du complot qui, en 1369, provoqua l’assassinat du célèbre roi Lusignan Pierre Ier.