La haute-Corse : Bastia, Cap Corse

 

Au-dessus d’une ligne imaginaire qui relie Galeria, côte ouest, à Solenzara, côte est, la Corse du Nord, ou Haute-Corse, occupe les anciens territoires qui composaient, sous les Génois, la Terra della Comune (terre du commun), appelée aussi En Deça-des-Monts.
De l’altière Corte à la plaine orientale, de la riante Balagne à la secrète Castagniccia, ses paysages composent un patchwork étonnant, alliant déserts de pierres et haute montagne alpine, vallées étroites et longues plaines, marines plaisantes et villages perchés.
Et, pointé comme un doigt vers le large, le cap Corse, seul endroit de l’île à avoir enfanté des marins. Une Corse mystérieuse qui se découvre en musardant d’une vallée à l’autre, entre tours génoises et églises baroques.

Bastia

A la porte de l’Italie, dont elle n’est distante que de 70 km, Bastia est plus que toute autre ville corse marquée par l’empreinte de Gênes, avec ses façades baroques, ses toits de lauze bleutée et ses majestueux clochers.
Affairée et grise vers le sud, où s’étagent les banlieues populaires de Lupino, elle devient résidentielle au nord, où les immeubles bourgeois débordent sur le cap Corse.
Au centre, la vieille ville, empreinte d’histoire, a conservé ses ruelles pavées, ses portes cochères, ses églises baroques, ses vieux immeubles aux façades lépreuses et aux persiennes déglinguées, ses cordes à linge tissées au travers des rues.
Très abîmé par les bombardements de la Seconde Guerre mondiale, le quartier du vieux port a été, en partie, reconstruit.
Véritable capitale économique et premier port de l’île, Bastia ne sait pourtant pas retenir les touristes.
Arrivés par bateau, nombreux sont ceux qui empruntent directement la voie express souterraine qui passe sous le vieux port pour filer vers une autre destination.

Petit rappel historique

L’histoire de la ville commence en 1380, lorsque le gouverneur génois Leonello Lomellini décide de quitter son château de Biguglia et d’installer une place forte, une bastiglia, sur un relief escarpé, au-dessus de Porto Cardo (l’actuel vieux port).
Au XVe siècle, une ville nouvelle s’installe sur les hauteurs, autour de cette citadelle.
On la baptise Terra Nova par opposition à la vieille agglomération, Terra Vecchia, en bord de mer. Bien que génoise, la ville neuve est ouverte aux Corses.
La cité s’urbanise, se dote de remparts, d’un palais des Gouverneurs, couvents et églises se multiplient, et la population grossit.
Bastia joue le rôle de capitale de l’île jusqu’en 1811, date à laquelle la création du département unique par Napoléon entraîne le transfert du chef-lieu à Ajaccio. Elle ne retrouvera sa préfecture qu’en 1974, lorsque la Corse sera scindée en deux départements.

Suivez le guide !

A l’heure de la sieste ou de l’apéritif, installez-vous à la terrasse d’un café de la place Saint-Nicolas pour admirer le ballet des ferries rentrant au port.

Terra Vecchia

La place Saint-Nicolas, largement ouverte sur la mer, est le centre névralgique de la ville, avec ses terrasses de cafés ombragées par les platanes, son kiosque à musique, son monument aux morts et l’imposante statue de marbre de Napoléon Ier.
Vers le sud, la rue Napoléon conduit à la chapelle Saint-Roch, un oratoire baroque, qui abrite un orgue daté de 1750 (fermée le dimanche après-midi).
En retrait, sur une petite place en mosaïque de galets, l’oratoire de l’Immaculée-Conception cache, derrière une façade modeste, un magnifique décor intérieur où cohabitent des draperies de velours de Gênes, des soieries damassées, des plafonds à fresques.
Dans la rue des Terrasses trônent encore deux maisons qui dateraient de l’origine de Porto Cardo, la maison Cardi et la maison Castagnolo, avec sa devise, « Col tempo » (avec le temps), et un ex-voto de pierre inscrits sur sa façade. Puis, on accède à l’église Saint-Jean-Baptiste.
Ses majestueux clochers baroques veillent sur le vieux port en forme de fer à cheval, où les voiliers se balancent doucement au soleil. En jusqu’au quai du Sud, on atteint un escalier conduit au jardin Romieu, où il est très agréable de musarder dans les fraîches allées.
Au milieu des palmiers, des lauriers, des pins et des fleurs, un sentier tortueux grimpe, ensuite, jusqu’à la citadelle, qui domine tout le quartier de Terra Vecchia. Le point de vue est sublime.

Eglise Saint-Jean-Baptiste

Construite en 1640, elle a été embellie au XVIIIe siècle et abrite une nef flanquée de six chapelles. A l’intérieur, au milieu d’un festival de stucs dorés et de marbres précieux, un retable à colonnes représentant la Vierge et un original buffet d’orgue, datant de 1742.

Terra Nova

Complètement enfermé dans l’enceinte fortifiée construite par les gouverneurs génois, le quartier de la citadelle n’est accessible que par quelques rares ouvertures. D’importants travaux sont en cours pour construire un parking et limitent actuellement l’accès depuis le cours Favale, par la porte principale, construite sous Louis XVI, qui mène place du Donjon. On peut normalement aussi y pénétrer par l’entrée qui se situe devant la cathédrale ou par un escalier sous voûte qui part du jardin Romieu.
A l’intérieur, au-delà de la place du Donjon, des ruelles étroites bien ordonnées et planes – au contraire des dédales pentus du port – conduisent jusqu’à l’ancienne cathédrale et aux remparts qui dominent la mer.

Palais des Gouverneurs

Un ensemble de bâtiments constitue ce qui était l’ancienne Bastiglia : à l’ouest, un bâtiment à arcades, le palais des Nobles-Douze, où siégeaient les gouverneurs des anciennes pieve génoises.
Au nord, le palais des Gouverneurs, surmonté d’un campanile et agrémenté d’un donjon, où s’est installé le musée d’Ethnographie corse.

Musée de Bastia

Place du Donjon, tél. : 04 95 31 09 12. Ouvert du mardi au dimanche de 10 h à 12 h et de 13 h à 18 h  (de 10 h à 19 h 30 du 1er juillet au 15 septembre). Entrée payante.

L’ancien Musée d’Ethnographie Corse installé au sein du Palais des gouverneurs génois s’intéressait plus particulièrement à l’ethnographie rurale, mais avait beaucoup vieilli. Il fallait le rénover et l’agrandir en reconstruisant les ailes nord et ouest du palais détruites lors de la dernière guerre. L’année 2004 voit la naissance d’un nouveau programme scientifique et culturel du musée, centré sur l’histoire de la ville avec une présentation thématique, orientée autour de l’urbanisme, le poids politique, social et économique de Bastia et sa richesse intellectuelle et artistique. Les travaux et la réorganisation des collections ont nécessité près de dix ans d’efforts. Le nouveau musée qui s’étend sur 8 213 m2 dont 1 345 m2 de construction neuve, a ouvert ses portes le 21 juin 2010. Il se compose de 18 salles qui présentent chacune une thématique relative à l’histoire de la ville.

Suivez le guide !

Dans Terra Nova, parcourez les vieilles ruelles Campanari et Sant’Angelo, avec leurs maisons bourgeoises, qui laissent apercevoir de magnifiques jardins reliés par des passerelles de pierre.

Eglise Sainte-Marie

Surmontée par son haut clocher carré, la cathédrale baroque de Bastia (fin du XVIIe siècle) abrite un maître-autel en marbre décoré d’angelots et une grande collection d’œuvres d’art consacrées à la Vierge, dont une imposante Assomption de la Vierge (1519), en argent massif, pesant près d’une tonne ! On peut admirer aussi une Cène du XVIe siècle et, dans les bas-côtés, les chapelles des Confréries avec leurs belles statues en bois polychrome.
Enfin, on ne manquera pas les orgues, remarquables.

Oratoire baroque Sainte-Croix

Derrière la cathédrale, une petite cour conduit à cette chapelle superbement décorée d’angelots et d’arabesques de stuc doré. A l’intérieur, le Christ noir (U Christu Neru), vénéré par les pêcheurs bastiais tous les 3 mai, depuis qu’il fut trouvé en mer, en 1428, flottant entre quatre feux.

Quartier Saint-Joseph

En sortant de la citadelle, la promenade conduit, à l’ouest, vers le faubourg populaire de Saint-Joseph, un des quartiers les plus pittoresques de la ville, avec ses façades lépreuses ornées de linge séchant au soleil et agrémentées de latrines qui normalement auraient dues être plus discrètes… En fait, les habitants de Saint-Joseph, respectueux de la loi, avaient édifié leurs cabinets côté cour, mais ils n’avaient pas pensé que les édiles modifieraient l’accès de la ville, qui se faisait autrefois par la rue des Capucins et la rue Saint-Joseph.

Aux environs de Bastia

Route de la Corniche

A la sortie nord de Bastia, elle longe le littoral jusqu’à Miomo, reconnaissable à sa tour génoise campée sur des rochers de schiste, au-dessus d’une plage de galets.
Puis, la route s’accroche à la montagne et grimpe jusqu’à deux villages perchés, Villede-Pietrabugno et San-Martino-di-Lota, d’où la vue est magnifique sur toute la baie de Bastia et, au loin, l’île d’Elbe.

Les orties de Sénèque

Accusé d’avoir été l’amant de la sœur de l’empereur Caligula, le philosophe fut exilé en Corse. Une légende prétend qu’il aurait reçu une volée peu banale. Le trouvant trop entreprenant, les femmes l’auraient flagellé avec des orties ! Dans le cap Corse, une variété d’orties porte le nom d’ortica di Seneca. Un bien pour un mal, en quelque sorte…

Cathédrale de la Canonica

A la sortie sud de Bastia, la route qui va de l’aéroport au cordon lagunaire conduit jusqu’à l’église Santa-Maria-Assunta, aussi appelée cathédrale de la Canonica, une des plus vieilles églises de Corse.
Ce petit chef-d’œuvre de l’art pisan, tout en harmonie et en simplicité, était l’ancienne cathédrale de l’évêché de Mariana. Elle a été réalisée au XIe siècle, en marbre polychrome extrait des carrières de Sisco et de Brando. Sa porte principale est ornée de sculptures d’animaux.

Cap Corse

Quarante kilomètres d’une bande étroite de terre battue par les vents qui attisent les incendies, le libeccio, qui souffle comme un fou de l’ouest, mais aussi le maestrale, le sirocco … Ce doigt pointé vers le golfe de Gênes a été baptisé par les Corses l’Isula di l’isula (l’île de l’île).
Traversé par une épine rocheuse qui plonge abruptement vers la mer, à l’ouest, plus doucement à l’est, c’est le pays de hardis marins, qui allaient volontiers faire fortune aux Amériques.
Les seuls parmi les Corses à ne pas craindre la mer…
Le littoral égrène des marines minuscules et un chapelet de tours génoises, à travers une succession de maquis, de forêts de chênes verts et de vignes. En effet, connus dès le Moyen Age, les muscats et les vins doux du cap trônaient déjà sur les tables des seigneurs de la Renaissance.

En route !

En quittant Bastia, la route du littoral suit la côte, rectiligne à l’est, pour épouser à l’ouest les contours sinueux de la falaise.
La tour génoise d’Erbalunga, berceau de la famille du poète Paul Valéry, veille sur la plage de galets et les maisons qui se baignent dans l’eau.
A Sisco, l’église Saint-Michel (1030) se cache sous les châtaigniers.
Ensuite, une route sinueuse conduit aux dix-sept hameaux qui composent le village de Luri, perdus dans le maquis. Plus loin, celui de Piazza mérite qu’on s’y attarde : un petit sentier abouti au col de Sainte-Lucie, où s’élève la tour de Sénèque(30 min de marche à pied), dans un site sauvage. La tour a été vraisemblablement édifiée au Moyen Age, mais la légende locale prend quelques libertés avec l’histoire en prétendant que le philosophe y vécut pendant son exil forcé de sept ans, en Corse.

Suivez le guide !

Depuis la marine de Luri, empruntez le sentier des douaniers jusqu’à la tour de Sénèque. Visitez le merveilleux petit hameau perdu de Cannelle, près de Centuri.

Maccinaggio

Jadis port de commerce et escale fréquentée par des visiteurs illustres (Pascal Paoli à son retour d’exil, Napoléon et plus tard l’impératrice Eugénie, de retour de Suez, en 1869), ce village s’est transformé en pimpant port de plaisance, où les bateaux font volontiers escale l’été. Ici, la route abandonne le bord de mer pour s’enfoncer dans les terres et grimpe vers Rogliano, fief des seigneurs Da Mare.
Ses maisons aux toits de lauze regroupées en sept hameaux perchés, ses vignobles, ses tours fortifiées, ses châteaux forts en ruine et ses mausolées perdus dans le maquis témoignent de son ancienne richesse. La route en lacet conduit ensuite à Centuri,premier port de pêche du cap.
Cette ancienne cité romaine mérite largement le titre de « plus jolie marine » qu’on lui décerne volontiers. Au milieu des oliviers, des orangers, des châtaigniers, Pino s’accroche à la montagne, autour de l’église Santa-Maria-Assunta.

Suivez le guide !

Empruntez le sentier des douaniers de Barcaggio jusqu’à Maccinaggio (4 heures), puis suivre celui qui conduit à la chapelle romane Santa-Maria di a Chiappa (3,5 km). Vue, au large, sur la réserve naturelle des îles Finocchiarola.

Au bout du doigt

Pour aller jusqu’à la pointe extrême de l’île, il faut emprunter l’embranchement et, à travers le maquis, pousser jusqu’à Barcaggio, un minuscule port de bout du monde, d’où l’on aperçoit, juste en face, l’îlot de la Giraglia.

Nonza

Après Canari et ses deux églises, romane et baroque, la surprise est totale lorsqu’on découvre la montagne éventrée par une ancienne mine d’amiante, exploitée jusqu’en 1966. A Nonza, les maisons aux toits de lauze s’accrochent à la falaise noire, pressées les unes contre les autres, bordant des ruelles escarpées et des escaliers de pierre.
Un chemin abrupt, taillé en escalier, descend vers la plage que surplombe une tour, en équilibre au bord de la falaise.
Edifiée en 1550 par les Paolistes, elle a été le théâtre des exploits de Jacques Castella, un partisan courageux de Pascal Paoli, qui tint seul tête à 1200 Français. Les pierres de schiste bleu-vert mêlées de lierre composent, avec les toits gris-bleu des maisons, les galets gris de la longue plage, le bleu intense de la mer, une palette de toute beauté.

Les tours sentinelles

Au XVIe siècle, le danger venait de la mer, en raison des razzias sarrasines.
La République de Gênes décida de construire quatre-vingt-onze tours défensives pour assurer la sécurité des côtes. Dès que les voiles sarrasines étaient en vue, des guetteurs allumaient un feu au sommet des tours, et, de tour en tour, l’alerte était rapidement donnée dans toute l’île.

 

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