Le compositeur Manuel De Novas, l’un des chantres de la morna, affirme dans un vers : « Celui qui ne connaît pas Mindelo, ne connaît pas le Cap-Vert. » On acquiescera car même si l’île de São Vicente, plutôt plate et aride, n’offre aucun paysage typique – ni villages accrochés à la montagne, ni pitons déchiquetés, ni plages idylliques -, sa capitale Mindelo, cosmopolite, draine une vie culturelle, artistique et festive dont la réputation est désormais internationale grâce à sa citoyenne d’honneur : Cesaria Evora. Très actif au XIXe siècle, le port a perdu de son importance mais constitue un excellent mouillage qui attire les plaisanciers, lesquels contribuent ainsi à pérenniser l’image d’une enclave ludique et permissive. Une escale incontournable. Deux moments forts ponctuent la vie culturelle : le carnaval de la mi-carême et le festival estival de Baia das Gatas. L’île compte par ailleurs plusieurs sites intéressants qui permettront aux noctambules de se ressourcer.

Mindelo, la capitale culturelle

Découvrir Mindelo par la mer, si possible au soleil couchant, laisse un souvenir impérissable. Posée au pied de monts rougeoyants, la ville haute formée par un empilage de cubes multicolores vibre. Les derniers rayons incendient les coques des navires mouillant dans l’une des 100 plus belles baies répertoriées au monde. 

Le passé florissant de Mindelo 
L’installation d’un dépôt de charbon par une firme anglaise en 1838 a été à l’origine de la création et du développement du port de la ville de Mindelo. Les steamers pouvant s’y ravitailler trouvèrent ici une escale idéale sur la route du Brésil. A la fin du XIXe siècle, 1 500 navires y mouillaient chaque année, occasionnant un grand brassage de population. Mindelo, résolument cosmopolite, jouit alors d’un commerce florissant qui encouragea l’établissement d’un foyer d’artistes. Le rayonnement de la ville se poursuivit et occasionna une compétition entre Mindelo et Praia. C’est finalement Praia qui fut choisie comme capitale administrative du Cap-Vert. Mindelo y perdit des débouchés économiques mais cultiva sa fibre artistique, un tremplin pour le tourisme.

Le Cap-Vert s’ouvre au cosmopolitisme 
En 1810, l’accord entre le Portugal et l’Angleterre permet au Cap-Vert de s’ouvrir au monde. Le port de Mindelo devient actif, attire les étrangers et fournit du travail aux insulaires. Les Anglais choisissent Mindelo pour établir le centre télégraphique entre l’Europe et le Brésil. L’impulsion est donnée. Et malgré les vicissitudes, notamment l’ouverture du canal de Suez en 1869, Mindelo parvient à maintenir une activité florissante. La ville qui reçoit les marins en escale acquiert une réputation internationale, vaguement licencieuse, sûrement festive. Cette effervescence favorisera l’art et la culture et donnera une image plus ludique d’un pays aride et pauvre. Mindelo conserve une griffe « british » avec un terrain de golf peu habituel : un green uniquement constitué de terre.

La ville la plus représentative du Cap-Vert 
Le charme de Mindelo repose en partie sur sa topographie. Praia est une ville un peu éclatée, difficile à cerner, alors que Mindelo, enchâssée dans une baie, est structurée par des places spacieuses, de larges boulevards et une succession de quartiers vivants et animés. Ses bâtiments coloniaux préservés lui donnent une petite touche britannique, ponctuée d’édifices plus modestes de style portugais (les sobrados).

Suivez le guide ! 
Au bout de l’esplanade longeant le port, s’élève une réplique de la Tour de Bélem de Lisbonne. Tout juste rénovée, elle accueille souvent des expositions gratuites.

Palais du Gouverneur 
Régulièrement repeint, ce charmant édifice rose et jaune est le symbole du centre-ville.

La Praçinha de Igreja 
La « petite place de l’église » est la plus ancienne place de la ville. Mindelo s’est agrandi à partir de ce centre historique.

La rue de Lisboa 
Chantée par tous les musiciens capverdiens, elle est très animée et abrite de nombreux bars et restaurants fréquentés par les artistes et les « bobos » de Mindelo (oui, il y en a même ici !).

Place Amilcar Cabral 
Le kiosque rouge à l’entrée de la place Amilcar Cabral est « le » lieu de rendez-vous de Mindelo. C’est ici que s’organisent les parcours noctambules des nightclubbers. Cette place est le vrai centre névralgique de la ville qui résonne d’une fiévreuse activité lors du carnaval.

Les marchés de Mindelo 
Typiques, pittoresques, ce sont des lieux chaleureux.

Marché aux poissons 
C’est le marché le plus pittoresque. Dans un sympathique tohu-bohu, on y observe d’impressionnants spécimens de thons, une grande variété de poissons ainsi que des faciès pour le moins typés : visages marqués et burinés, regards intenses, voix rocailleuses. C’est encore plus frappant chez les femmes, coiffées de foulards aux couleurs vives et souvent affublées d’une pipe. De belles peintures murales dépeignent la vie quotidienne des Capverdiens.

Marché aux légumes 
Situé dans un bâtiment élevé à la belle architecture, ce petit marché peut être observé en vue plongeante des deux étages occupés par une galerie marchande. On y détaillera à loisir les rapports amicaux qui président au commerce des ménagères et des producteurs, en famille.

Marché de la praça Estrela 
La vaste « place de l’Etoile » locale accueille un marché-bazar pittoresque. On y observera d’intéressants azulejos, les célèbres tableaux portugais en céramique bleue. Certains évoquent l’histoire de Mindelo.

Olaf, marin retraité, citoyen du monde 
Olaf, dit « Spaghetti », une personnalité de Mindelo, aime rencontrer les visiteurs. Le visage du grand gaillard, sec comme une trique, s’éclaire lorsqu’il raconte sa vie aventureuse : fuyant la misère, il quitte son île et, durant 30 ans, sillonne les mers. Sur la table, un roman écrit en suédois. Olaf parle l’anglais, l’espagnol, l’allemand, le néerlandais et possède des rudiments de français et d’hébreu. Un mariage avec une Suédoise lui a donné deux fils blonds comme les blés. Il termine son café et file inspecter sa boîte aux lettres car il attend sa pension suédoise. Bientôt, il recevra sa pension hollandaise puis à la fin du mois, sa pension allemande. Son départ s’accompagne d’un éclat de rire général. Une voix s’élève : « ll y a bien longtemps qu’on avait vu Olaf boire un café ! Lui, c’est plutôt le rhum ! »

Petit circuit artistique dans Mindelo 
Mindelo est le centre artistique du Cap-Vert mais ce petit pays a peu de moyens et ne peut rivaliser en la matière avec des villes plus riches. Ainsi la vie culturelle à Mindelo est-elle axée sur la musique. La présence de peintres talentueux n’est pas garante pour autant de l’existence de galeries d’art. Ici, celui-ci se conjugue dans la simplicité et l’authenticité, loin de la « branchitude ».

Centre national d’artisanat 
Derrière la place Amilcar Cabral, le petit Centre national d’artisanat donne l’occasion à des artistes d’exposer des créations de tissage, notamment du batik, de la vannerie, des peintures, des maquettes de bateaux et des reproductions d’art brut : des véhicules fabriqués avec des boîtes de conserve, dans l’esprit des créations africaines. Un métier à tisser fonctionne sans arrêt.

Galerie-atelier Figueira 
Sur le boulevard qui longe la mer, la galerie Figueira expose au rez-de-chaussée le travail de Tchalé, « la » star locale qui signe des œuvres remarquables assimilables au style dit de la « nouvelle figuration ». Cette école occidentale qui a permis à des artistes de devenir très riches ayant été fortement inspirée par l’art populaire africain ou sud-américain, on ne reprochera pas à Tchalé, un personnage sympathique, de pratiquer des tarifs élevés. Le premier étage est dévolu à sa compagne, Luisa Queiros, qui produit des œuvres symboliques et poétiques.

Peintures murales de Mindelo 
Disséminées dans la ville, les peintures murales de Mindelo, d’excellente facture, dépeignent la vie traditionnelle.

Suivez le guide ! 
La peinture murale vantant le port des préservatifs, située au bout de l’avenue Ferreira-Fortes, reste un petit trésor d’art naïf.

Le sud de l’île

Le sud de São Vicente est encadré par deux routes carrossables. L’une mène uniquement à São Pedro à l’ouest et l’autre, reliant Mindelo à Calhau vers l’est, permet de rejoindre des pistes praticables qui, à travers de beaux paysages dépouillés, mènent à des plages très peu fréquentées. 

São Pedro 
Les visiteurs découvrant l’île de São Vicente lors d’un atterrissage qui peut s’avérer mouvementé – le lieu est très venté – distinguent le long cordon sableux de la plage de São Pedro. Une belle image que ce ruban désert car, ici, la mer très agitée est battue par les vents. Des planchistes aventureux ont tenté de profiter de ces conditions exceptionnelles pour établir des records de vitesse. En vain… On se consolera en foulant ce bel espace qui s’étire sur un bon kilomètre jusqu’au village de pêcheurs de São Pedro, adossé à flanc de montagne. Le lieu est prenant et les villageois sont chaleureux. A l’opposé, une randonnée jusqu’au phare (30 min) constituera une agréable promenade dans les rochers.

La route de Calhau 
De Mindelo, par la route qui mène au village de Calhau, distant de 25 km, on peut rejoindre plusieurs plages en empruntant une piste plate. Celle de Calheta Grande commence à être fort courue par les citadins qui y construisent leurs résidences secondaires. Les plages de Palha Carga et de Saragaça sont moins fréquentées et les paysages alentour, hérissés de monts ocre, sont superbes.

Le nord de l’île

Bien desservi par des routes carrossables, le nord offre deux excursions intéressantes, la Baia das Gatas et le Monte Verde. 

Baia das Gatas 
Le site est très fréquenté par les Midelenses. Pendant le week-end, il se transforme en aire de pique-nique et prend des allures de station balnéaire familiale. Le cadre en est plaisant mais n’est pas idéal pour la baignade, excepté pour les enfants car l’eau est peu profonde. En face, praia do Norte, semble beaucoup plus séduisante. C’est vrai, mais il convient d’être particulièrement prudent car ici les courants sont très forts.

Monte Verde 
Dans un environnement plat et aride, le Monte Verde, qui culmine à 774 m, offre une fraîcheur salutaire. Une route conduit jusqu’au sommet hérissé d’une batterie d’antennes. On pourra préférer effectuer la balade à pied sur les pentes verdoyantes où poussent des agaves et des sisals dont la fibre sert à fabriquer des paniers. Au fur et à mesure de la montée, des nappes de brouillard transforment le paysage qui prend des airs fantomatiques. Mais un vent violent dissipe régulièrement ces nappes et le sommet révèle de beaux panoramas, notamment sur la Baia das Gatas, ourlée et dentelée d’écume.

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