9 - Villes

Les principales villes de la Tunisie

Sfax - Vue depuis la Kasbah

Sfax

Ce chef-lieu d'un gouvernorat, est la deuxième grande ville de Tunisie et le premier port du pays. La configuration de la ville est strictement fonctionnelle. Le port de haute mer est un centre de transit, d'importation et d'exportation de phosphates et de pétrole. S'ajoute à l'extraction des quatre grandes mines du pays, la transformation du minerai en super et hyper-phosphates. Les autres activités portuaires sont la cellulose et les produits de pêche : thon, poulpe, éponge dont l'extraction est effectuée en étroite collaboration avec les Kerkéniens insulaires et des pêcheurs grecs. Sur le plan agricole, l'arrière pays de Sfax est le principal producteur d'huile d'olive, grâce à une exploitation rationalisée, complétée par les plantations d'arbres fruitiers notamment les figuiers, caroubiers, pistachiers, et amandiers (ces derniers couvrent plus de 70 % des vergers), et l'alfa en produit semi-fini.

Dépourvue de plages et de la sempiternelle zone hôtelière qui canalise les flots d'estivants dans la plupart de villes tunisiennes, Sfax n'est pas une ville vouée au tourisme. Elle vit de sa vie propre et c'est sans doute ce qui fait tout l'intérêt d'une étape dans ses murs. L'occasion d'aller à la rencontre d'une Tunisie plus réelle, qui offre d'ailleurs à ses visiteurs une Médina très pittoresque, ceinte d'un rempart millénaire, une ville moderne et un petit musée. De plus, Sfax est le point de départ des excursions aux îles Kerkenah.

Une ville rebelle
Les Romains bâtirent à 2 km au nord-est de la Sfax d'aujourd'hui, la ville de Taparura. C'est avec les pierres de cette cité oubliée que Sfax fut construite au IXe siècle sous les Aghlabides. Elle gagna très vite une importance économique : huile d'olive, poissons séchés furent exportés dans les autres pays méditerranéens. De 1095 à 1099, Sfax fut la capitale d'un petit Emirat. De 1148 à 1159, elle appartint aux Normands établis en Sicile. Mais en 1159, elle fut rendue à l'Islam par l'Almohade Abd-el-Moumen. Elle n'accepta pas le Protectorat français en 1881 et il fallut un bombardement naval pour qu'elle se soumette. Pendant la Deuxième Guerre mondiale, Sfax, quartier général des forces Alliées en Tunisie, subit de lourds dommages : la ville coloniale établie par les Français, entre le port et la médina, fut presque entièrement détruite.

La ville nouvelle forme presque un rectangle, avec au centre deux grandes artères qui se croisent : l'avenue Habib Bourguiba qui va de la gare au marché et l'avenue Hédi-Chaker qui commence à la Porte de la Médina et va jusqu'au quai du Commerce qui dessert le port.

L'Hôtel de Ville se reconnaît à sa façade blanche d'où s'élève une jolie tour élancée. Au rez-de-chaussée à gauche, se trouve le Musée de Sfax, (ouvert tous les jours, entrée libre) de dimension modeste mais qui expose quelques belles pièces : des mosaïques romaines, trouvées à Thanae (12 km au sud-ouest de Sfax), avec entre autres, Daniel dans la fosse aux lions, Héro et Léandre, Arion sur un dauphin. Une salle est consacrée à l'art islamique avec quelques anciens manuscrits enluminés datant des IXe et XIIe siècles. De là, l'avenue Hedi Chaker conduit à Bab Diwan, la Porte du Conseil, principale entrée de la médina.

La Médina
Pour la première fois érigée en 1306, elle fut plusieurs fois reconstruite, notamment après le bombardement aérien de 1943. C'est ici que commence l'enceinte de la ville qui entoure la Médina sur une longueur de 2 km. Elle fut édifiée par les Aghlabides au IXe siècle, restaurée et consolidée au cours des siècles suivants. A intervalles réguliers, s'élèvent des tours qui donnent à cette enceinte un aspect inattendu et pleinde charme. La médina se caractérise par ses ruelles étroites et ses souks colorés où l'on est frappé par la beauté des portes et des porches.

Depuis Bab Diwan, tourner à gauche, pour aller à la Kasba située dans la partie sud-ouest de la Medina. La Grande Mosquée, en plein coeur de la vieille ville, fut fondée en 849, puis reconstruite en 981 et restaurée au XVIIIe siècle. Son minaret, à trois étages, bien qu'il rappelle celui de la Grande Mosquée de Kairouan, est plus élancé et plus richement décoré. Elle ne se visite pas mais sa trés belle façade mérite d'être admirée .

Dar Jallouli, dans la rue Sidi Ali Nouré, est un très bel exemple de maison aristocratique sfaxienne du XIXe siècle. Construite à l'origine aux XVIIe et XVIIIe siècles, cette ancienne demeure du Caïd-Gouverneur de Sfax abrite aujourd'hui un joli petit Musée des Arts et Traditions Populaires qui présente des bijoux, vêtements et objets typiques de la région. (Ouvert tous les jours sauf les lundis et les jours fériés, de 9 h à 12 h et de 15 h à 17 h 30.)

La demeure en elle-même est le plus bel attrait du musée, avec ses stucs finements travaillés, ses dentelles de boiseries et ses jolis carreaux de faïence qui agrémentent le rez-dechaussée. Les souks de Sfax sont trés intéressants, là pas de produits d'artisanat pour touristes mais des marchandises qui séduisent les Tunisiens. Laissez votre inspiration vous guider dans ce dédale de ruelles qui vous mèneront au souk el Djama et à leurs étals d'épices puis au souk el Attarine spécialisé dans les tissus et enfin au souk des forgerons avec leurs impressionnants soufflets à main.

Le tour complet de l'enceinte constitue une jolie promenade. Ce faisant, on passe au nord de la porte de la ville devant Bab Djebli qui ouvre sur un marché aux oiseaux, et au sud-est devant le petit Fort datant du XIIe siècle. Le port industriel et de commerce accueille des bateaux de fort tonnage, sa visite présente peu d'intérêt. Il est le point de départ des liaisons avec les îles Kerkenah.

La ville côtière de Bizerte - Port

Bizerte

Les Phéniciens fondèrent ici, au IIe siècle le comptoir d'Hippo Diarrythus et percèrent l'isthme entre la mer et le lac de Bizerte. Il ne reste aucune ruine romaine ou phénicienne. La ville fut conquise en 661 par les Arabes.

Au XIIIe siècle, les Hafsides y avaient établi leur résidence d'été. Aux XVe et XVIe siècles, des Maures, chassés d'Espagne se fixèrent dans un quartier nord de la vieille ville. En 1881, les Français commençaient l'élargissement du vieux canal et la construction d'un grand port de guerre dans le lac de Bizerte. Pendant la Seconde guerre mondiale, Bizerte subit en 173 jours, 250 bombardements aériens qui causèrent de lourdes destructions.

En juillet 1961, des manifestations opposèrent des Tunisiens aux Français, avec pour objectif la base navale de Bizerte, que la France devait évacuer en 1963.

On remarque les portraits d'Auguste et de Livie et des pavements de mosaïque relevés dans la maison de Scorpanius, au pied du Théâtre. La céramique, rassemble plusieurs vases de terre rouge, fruits des ateliers de l'Afrique romaine. Quelques pièces sont importées d'Arezzo et de la Gaule romaine. Des lampes à huile, carthaginoise et romaines sont en nombre, celles à bec orné de volutes sont de la première période, alors que celles à bec arrondi sont de la fin du Ier siècle.

La verrerie offre des objets d'une grande finesse comme les fioles à parfum, et des vases et urnes cinéraires. L'Afrique chrétienne se caractérise surtout par un changement dans l'imagerie mais servie par les techniques héritées des prédécesseurs. L'Ancien Testament ou l'enfance du Christ sont à la source des nouvelles inspirations des céramistes. Une collection épigraphique mérite l'attention et surtout les inscriptions, de facture byzantine, relatives à Perpétue et Félicité, saintes mortes en 203, que Tertullien aurait immortalisé par les Actes qu'il leur consacra.

Il faut traverser la ville moderne, conçue sous le protectorat, pour rejoindre le centre ancien. Le vieux port, protégé par la Kasba et le fort Sidi Henni est le lieu le plus charmant de Bizerte avec ses barques de pêche colorées qui se balancent doucement. A l'arrière du vieux port se trouve le marché couvert dominé par la Mosquée Rebaa, reconnaissable à son minaret carré. Derrière la Grande Mosquée au minaret octogonal s'étend le souk des forgerons. En longeant les quais on passe devant une belle fontaine (1642) sur laquelle une inscription en turc et en arabe prône la saveur et la douceur de l'eau. La Kasba des XIIIe/XVIIe siècle, entièrement habitée, se compose d'un lacis de ruelles étroites sur lesquelles ouvrent des maisons traditionnelles. La route de la Corniche mène au majestueux fort d'Espagne, construit en 1573 par les Turcs et transformé en théâtre de plein air.

Cette même route longe une longue plage jusqu'au Cap Bizerte d'où on a un très joli panorama, puis jusqu'au Cap Blanc, le plus septentrional d'Afrique, dominé par le Jebel Nador (261 m). Ces deux sites offrent des paysages sauvages gâchés par de nombreux détritus.

Sousse

Sousse

Située sur la pointe sud du golfe d'Hammamet, elle annonce la proximité du Sahel. L'exubérance des Soussiens, leur tempérament jovial et leur pragmatisme spontané, font de ces habitants des gens très liants.

Métropole d'équilibre et chef-lieu d'un gouvernorat, Sousse occupe le troisième rang après Tunis et Sfax. C'est une ville historique où plusieurs périodes se succèdent. Elle se compose d'une cité ancienne, antique et médiévale, romaine et arabe, d'une ville moderne, coloniale et nationale, et enfin d'un site touristique d'une capacité internationale. Le flux touristique et le trafic portuaire animent, tout au long de l'année, le rythme de cette ville qui ne connaît jamais de période creuse.

La ville fut fondée par des Phéniciens vers le IXe siècle av. J.-C. sous le nom d'Hadrumète. De cette époque il ne reste aucune trace affirmant la permanence d'une vie urbaine ; la ville se développe lorsqu'elle entre dans l'orbite de Carthage, ce qui l'entraîne à prendre partie dans les guerres puniques. Parce qu'elle soutient Rome lors du dernier conflit elle obtient le statut de ville libre, qu'elle perd un siècle plus tard en choisissant les alliés de Pompée contre ceux de César. Elle connaît son apogée sous l'Empire romain en devenant un important port de commerce.

Après avoir subit la présence vandale au Ve siècle, elle connaît un regain d'activité pendant la période byzantine. Elle est complètement mise à sac par les troupes arabes d'Oqba Ibn Nafi au VIIe siècle. Elle renaît peu à peu sous le nom de Sousse pour redevenir un port important sous la dynastie Aghlabides. La ville est impliquée dans tous les conflits qui agitent la Méditerranée : point de départ de la conquête musulmane de la Sicile, elle est ensuite brièvement occupée par les Normands au XIIe siècle. Au coeur des rivalités impériales, entre Ottomans et Espagnols au XVIe siècle puis Vénitiens et Français au XVIIIe siècle, elle est à plusieurs reprises assiégée, bombardée, occupée. Avec le Protectorat français Sousse retrouve son rôle marchand traditionnel mais les bombardements de la Deuxième Guerre mondiale l'endommagent sérieusement.

Malgré ces épreuves, Sousse su toujours trouver son salut dans la mer et dans son sens du commerce. L'envergure de cette ville est loin d'être négligeable. L'industrie emploie plus de 40 % de la population active, sans compter les saisonniers. Les secteurs de l'industrie alimentaire (produits dérivés de l'huile d'olive et les conserves) et du tourisme, sont prédominants. Outre cela, bien d'autres industries y fleurissent, celle du textile et de l'automobile notamment.

Les Soussiens ont su faire fructifier leurs plages, don de la nature, en développant l'industrie touristique. En haute saison, plus de 50 % des actifs y trouvent un emploi, Autrement dit, pendant près de 4 mois, le plein emploi est atteint. Un essor économique aussi régional donne à la Tunisie un profil semblable à la Grèce ou à l'Espagne où les métropoles rivalisent avec la capitale en la dépassant dans bien des domaines.

Visiter Sousse
Au centre de la ville, le square Farhad-Hached est le lieu de rencontre de la Médina, de la ville nouvelle et du port. De larges rues partent dans toutes les directions, dont l'avenue Habib Bourguiba vers la plage. Plusieurs fois par jour, des trains vont et viennent avec un sifflement bruyant, en plein coeur de la place. Sur le côté port de la place, se trouve l'arrêt d'autobus longues distances. Le long des murs fortifiés, des voitures de louage attendent les passagers et un parking y a été aménagé.

Là commence la médina, close de murs. Autrefois la mer battait contre la muraille et sur la place des Martyrs se dressait la porte de la Mer, Bab el Bahr qui permettait aux navires d'entrer dans le port intérieur. Toutes les ruelles montent vers la Kasba au sommet de la ville. On passe d'abord devant la grande Mosquée, à l'architecture basse et massive semblable à une forteresse aux tours rondes. Elle fut construite en 850 sous les Aghlabides.

Un peu plus loin à droite, s'élève le Ribat Ksar er-Ribat, la construction la plus importante, que les Arabes réalisèrent au cours de leur premier siècle de souveraineté, construite, selon le style byzantin, pour la protection du port. En 821, l'émir aghlabide Ziadat Allah, fit rajouter la tour de garde haute de 27 m. En 859, la construction des remparts transforma le Ribat en un monastère et une caserne : les membres de la garnison vivaient en cellules, dans une retraite monacale (c'est pour cette raison qu'on les appelait les moines-soldats). La tour fut transformée en minaret et la salle des prières en mosquée.

Grande mosquée de Sousse

L'entrée dans le Ribat se fait par une très belle porte fortifiée ornée de frises et de colonnes. A l'intérieur de la porte, trône en hauteur, un triple mâchicoulis, par lequel, au moyen d'huile ou d'eau bouillante, de pierres, etc., l'ennemi pouvait être neutralisé.

La grande cour intérieure presque carrée est entourée d'un corps de bâtiment à deux étages, avec des arcades desservant les cellules des moines-soldats. Au rez-de-chaussée, un hammam, des salles de ravitaillement et des écuries. Un escalier conduit au premier étage, où se trouve une mosquée soutenue par des piliers massifs. On prétend que la petite coupole au-dessus du Mihrab dans ce qui fut autrefois la salle de prière, est le premier modèle construit en Tunisie d'après le style oriental.

Au deuxième étage, on débouche sur le toit plat protégé par un mur à créneaux, qui constituait alors, en cas d'attaque, la seule place de défense. Dans un plus petit corps de bâtiment, l'entrée des mâchicoulis se trouve au-dessus de la porte principale.

Il est possible faire l'ascension de l'ancienne tour de garde qui offre une très belle vue sur la Médina, la ville nouvelle et la mer. Les Remparts entourent la ville sur une longueur de 2,5 km. Construits en 859, ils furent restaurés à deux reprises, en 874 et 1205. Des six portes d'origine, il n'en demeure que trois.

En sortant du Ribat, la rue Tazerka conduit à la Zaouïa Zakkak, au minaret octogonal. Nous traversons le Souk El Caïd, où se trouvent les ateliers des forgerons, et atteignons la Porte Bab el Gharbi pour arriver à la Kasba. La construction du fort remonte au IXe siècle, reconstruit par la suite : c'est maintenant une garnison et un admirable musée. Le Musée de Sousse mérite une visite pour la richesse de ses mosaïques romaines et la beauté de ses pièces de collection.

Kairouan

Capitale de la steppe tunisienne, Kairouan est une des villes les plus typiques de Tunisie et même d'Afrique du Nord, car elle a su préserver presque entièrement son caractère ancien, purement arabe. Plantée dans la steppe, entourée de hautes murailles ocres, elle se révèle au bout d'une route monotone « comme un mirage » selon l'expression de Henri de Montherlant. Son fondateur l'a voulue ainsi en défi à l'aridité environnante.

Associée aux grandes heures de l'histoire arabe, la cité de Kairouan est aussi une ville sainte de l'Islam, la quatrième après La Mecque, Médine et Jérusalem. La grande Mosquée, sanctuaire sacré, en est le coeur.

Kairouan est également le centre de l'artisanat tunisien, avec ses ateliers de tissage de tapis et ses potiers. Depuis sa création, la ville a développé une énergie commerçante qui ne s'est jamais démentie et les ruelles de ses souks débordent d'activité. Le charme d'une promenade dans le dédale de Kairouan s'associe au plaisir de goûter à la spécialité locale du makhroud, ce gâteau au miel fourré de dattes dont les Tunisiens sont si friands.

Fondée par défi, Kairouan, seule ville tunisienne d'origine arabe, n'a pas été construite sur les restes de fondations phéniciennes, byzantines ou romaines. En l'an 671, quarante ans après la mort du prophète Mohamed, une armée conquérante arabe se dirigeant vers l'ouest, traversa ici la steppe déserte. L'armée était conduite par l'émir Oqba Ibn Nafi, envoyé de Moawiya, calife des Omeyyades de Damas. Ce site retranché ne pouvait que susciter la curiosité.

On prétend qu'il arrêta soudain l'armée, descendit de cheval, enfonça sa lance sur le sol de la fontaine et dit « c'est ici que notre kairouan (qayrawan signifie bivouac, campement) doit être construit, il sera un bastion de l'Islam jusqu'à la fin des temps ».

Le choix du conquérant Oqba Ibn Nafî, au VIIe siècle, était des meilleurs. Il fit de ce camp retranché une base pour sa conquête de l'ensemble de l'Afrique du nord. L'endroit ainsi choisi surprend d'autant plus qu'il est au centre d'une zone caractérisée par la sècheresse. Seule la stratégie arabe pouvait lui donner un sens.

Au nord-ouest, les deux jebels Oueslat et Bou Dabbous, au pied desquels, une rivière prend sa source, constituent un rempart naturel pour la protection du camp et un pâturage de qualité pour le cheptel des pasteurs et les chevaux de bataille.

Rues de Kairouan - Tunisie

Entre les VIIe et Xe siècles, les grandes campagnes qui aboutirent à la conquête de l'Algérie, du Maroc, de l'Espagne, du Sud de la France, de la Sardaigne et de la Sicile, furent préparées depuis Kairouan. Au VIIIe siècle, Kairouan connut son apogée sous les Alghlabides. De nombreuses constructions remontent à cette époque. Au Xe siècle, sous la dynastie Fatimide, la ville perdit son rôle de capitale politique au profit de Mahdia en 909 et du Caire en 973. En 1057, Kairouan fut détruite par les Hilaliens venus d'Egypte.

A la suite de ces périodes troublées, le rôle politique de la ville régressa, mais Kairouan demeura cependant, à travers les siècles, le centre religieux du pays.

De la ville nouvelle, on entre dans la Médina entourée d'une enceinte (1706-1712) par la porte Bab-ech Chouhada (porte des tanneurs) qui fut reconstruite en 1772. De là, la rue Habib Bourguiba traverse toute la Médina. En empruntant la première rue à droite, on arrive à la Zaouïa de Sidi Abd-el-Ghariani, une sépulture dans une jolie cour, avec une voûte en forme de coupole et sa célèbre fontaine.

En revenant sur la rue Belhaouen, le puits de Bir-Barouta, une institution touristique de Kairouan, est situé au premier étage d'une maison particulière et actionné par un chameau. Une partie de cette fontaine date du XVIIe siècle ; son eau communiquerait avec celle, sacrée, de Zemzem à la Mecque.

En sortant de la médina par la porte Bab el-Tounès et en suivant la rue du Marché dont le marché couvert reste continuellement animé, vous arrivez, après avoir tourné à gauche, à la Mosquée des Sabres, Djamaâ Amor Abbada, de construction tardive (1860). Elle mérite toutefois une visite, ne serait-ce que pour ses cinq coupoles cannelées. Elle renferme aussi le tombeau d'un forgeron, dont l'activité était de travailler de nombreux sabres et objets en métal, et dont la marotte consistait à fabriquer des pipes géantes. Le lieu saint en est orné. Des sabres et des ancres gigantesques complètent le décor. Sidi Amor Abbada est honoré comme un saint.

L'avenue de la République rejoint la Mosquée du Barbier, souvent appelée Zaouïa de Sidi Sahab. Ce sanctuaire, dont l'aspect actuel est resté inchangé depuis le XVIIe siècle, abrite le tombeau de Abou-Zomdâ-el-Balaoui, barbier et compagnon de Mohamed, qui, dit-on, portait toujours sur lui trois poils de la barbe du Prophète. Une madrassa, école coranique, est accolée au sanctuaire. La première cour est particulièrement élégante dominée par un très beau minaret. La cour intérieure entourée d'arcades, permet d'accéder au tombeau par une série de salles successives dont la décoration de faïences et d'ouvrages en stuc est remarquable.

Les Bassins des Aghlabides :deux réservoirs circulaires, furent réalisés au IXe siècle. L'un, d'un diamètre de 128 m, contient 50 000 m3 d'eau ; le pilier central soutenait autrefois un petit pavillon, résidence préférée des princesses aghlabides. L'autre, plus petit, de 37 m de diamètre recevait l'eau d'un aqueduc long de 36 km. La forme originale de ces deux bassins, qui ont souvent été restaurés, a été conservée. De l'autre côté de la route, conduisant à Pont-du-Fahs, s'étend un immense cimetière musulman dont certaines tombes présentent un grand intérêt.

La Grande Mosquée, Djamaâ Sidi Oqba, est le principal monument de la ville. (Ouverte de 8h à 14h30 sauf le vendredi, tenue décente exigée, pantalon long pour les hommes et jupes pour les femmes ; on ne visite pas la salle de prière, ni le minaret.)

De la première mosquée bâtie en 671 par le fondateur de la ville Oqba Ibn Nafi, ne subsiste que le Mihrab (derrière l'actuelle niche des prières). C'est au IXe siècle que le bâtiment que l'on peut voir aujourd'hui fut édifié sous la dynastie des Aghlabides. Il forme un quadrilatère irrégulier de 135 m de long sur 80 m de large. La moitié de l'axe médian nord est occupée par le minaret, la salle des prières s'étend de l'autre côté, et entre les deux, une large cour couverte de marbre blanc.

Avant de pénétrer dans la mosquée, faîtes le toue jusqu'à la porte Lalla-Rihana (au sud-est) qui fut achevée en 1924. Le portique est composé de colonnes anciennes. Des sept portes de la mosquée, deux seulement sont utilisées. La première qui donne accès directement à la salle des prières est uniquement réservée aux musulmans. L'autre porte permet d'accéder à la cour entourée de doubles arcades de colonnes antiques. Au milieu se trouve un bassin alimenté par l'eau de pluie recueillie dans une citerne située en sous-sol.

Grande mosquée - Kairouan

Dix-sept portes en cèdre sculpté (restaurées au XIXe siècle) conduisent à autant de galeries, formant la salle de prière ; celle ci mesure 40 m de long sur 7 m de large. La galerie centrale, couverte d'une voûte et de deux belles coupoles à nervures a une surface double de celle des galeries latérales. Au centre se trouve le mihrab, niche des prières, seul vestige de la première mosquée, et tapissé de carreaux de faïence du IXe siècle.

A droite, près du mihrab, s'élève un minbar du IXe siècle orné de marqueteries, chaire pour la prédication du vendredi et pour les méditations quotidiennes de l'officiant. A droite du minbar fut incorporée, au XIe siècle, une maksoura, salle séparée du reste de la mosquée par un mur sculpté, dans laquelle le Maître et sa suite intime pouvaient prier à l'écart sans être dérangés par leurs sujets. Entre le minbar et la maksoura se tient une colonne faisceau, que les croyants, selon une tradition mahométane, doivent étreindre pour accéder au paradis.

Les 420 colonnes de la salle des prières et les arcades autour de la cour sont toutes d'origine romaine ou byzantine. Elles furent prises sur des monuments de Carthage lors de la construction de la mosquée. Nombre d'entre elles se distinguent par de très beaux chapiteaux. Sous la dernière arcade droite de la galerie centrale, on remarquera deux colonnes rouges en porphyre.

Le Minaret s'élève à 35 m de haut, et se compose de trois tours superposées. Il fut vraisemblablement construit au IXe siècle, c'est-à-dire à la même époque que la mosquée (seule la coupole a dû être ajoutée au XIIe siècle). Le minaret passe pour être le plus ancien d'Afrique du Nord ; l'utilisation des dalles mortuaires comme marches témoigne du triomphe de l'Islam sur le Christianisme. Il est dommage de ne plus pouvoir y accéder car la dernière plate-forme offre une vue incomparable sur la mosquée, la ville et ses environs.

La petite Mosquée des trois portes, Djamaâ Tlata Bibane, de l'autre côté de la médina, fut achevée en 866. Elle mérite d'être admirée avec ses très jolies façades décorées de motifs à fleurs et d'inscriptions arabes.


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