4 - Se déplacer de ville en ville


Les environs de Lemesos

Lady's Mile © Ivan C

L'histoire et les vieilles pierres, patinées par le soleil, donnent rendez-vous à ceux qui, entre deux baignades, veulent découvrir le passé de l'île. A deux pas des forêts de pins et des villages de montagne viticoles du Troodos.

Amathonte
A 11 km à l’est de Lemesos. Le site archéologique est ouvert tlj en été, de 9 h à 19 h 30 et en hiver de 9 h à 17 h.
A l’entrée de Lemesos, voici les vestiges de l’ancienne et riche cité-royaume, qui dominent la mer, d’Amathonte. Elle a accueilli Ariane enceinte, abandonnée par Thésée à la suite de sa bataille contre le Minotaure. La cité a été longtemps vouée au culte d’Aphrodite Astarté, mais aussi à ceux d’Adonis et d’Héraclès. De cette ville, qui joua un grand rôle dans l’histoire de l’île, il ne reste qu’un énorme pan de muraille léché par la mer. C’est tout ce qui subsiste de cette fameuse cité qui prit le parti d’Alexandre contre les Perses. Le port a été englouti par les eaux, puis la ville fut définitivement abandonnée au XIIe siècle. Les archéologues, qui travaillent toujours sur le site, ont mis au jour les vestiges de cinq basiliques du début de l’ère chrétienne, notamment de l’époque romaine, ainsi que certains vestiges de l’acropole et de l’agora.

L'agora
Au détour d'un petit sentier, on devine ce qu'était le site de l'agora. Bien conservé, il offre toujours aux regards son bassin circulaire et ses deux immenses citernes.

L'acropole
Après une montée d'une dizaine de minutes, on rejoint le site qui, d'après l'historien latin Tacite, était l'un des trois sanctuaires les plus vénérés de l'île. Dédié à la déesse Aphrodite, il a été victime de nombreux pillages au cours des siècles.

Couvent Agios Georgios Alamanos
Avant d'arriver à Amathonte, en provenance de Larnaka et de Lefkosia, à 19 km de Lemesos.
Non loin du bord de mer, ce couvent abrite des religieuses. En dehors des heures de prières, elles se consacrent à la peinture des icônes et à l'apiculture.
A voir et à goûter.

Cesnola le pilleur
Triste destin que celui d'Amathonte. Une des cités-royaumes les plus prospères de l'île et abandonnée au XIIe siècle. Le pillage peut commencer. Tout d'abord ses pierres servirent pour bâtir les villages environnants puis les belles demeures de Lemesos. Entre 1859 et 1869, les bateaux font des va-et-vient entre l'Egypte et Chypre pour transporter les dernières pierres d'Amathonte devant servir à la construction du canal de Suez. Le site est désormais dépouillé et totalement délaissé. Luigi di Cesnola, consul américain à Chypre, et aventurier avisé, fouille à la fin du XIXe siècle la ville désertée. Il découvre des sculptures et des sarcophages décorés de scènes de chasse et vend le tout au… Metropolitan Museum de New York qui présente toujours, aux visiteurs, les souvenirs d'Amathonte emportés par Cesnola.

Château de Kolossi
A 14 km de Lemesos en direction de Pafos.
Ouvert tlj de 8 h à 17 h de novembre à mars, de 8 h à 18 h en avril-mai, et de 8 h à 19 h 30 de juin à août. Entrée payante.
Cette grosse tour carrée, dont les imposantes pierres brillent sous le soleil, est un bel ensemble de l’architecture militaire française de la fin du Moyen Age. Ses lignes sont pures, ses arêtes franches, pas de scories pour charger la pierre de décoration futile. Construit au XIIIe siècle puis rénové au XVe siècle par Louis de Magnac, commandeur de l’Ordre des hospitaliers, Kolossi a été, un temps, possession des templiers. C’est un vestige de l’épopée française à Chypre. Cette tour massive, de 20 m de hauteur, possède, notamment, une superbe salle voûtée. A remarquer, au rez-de-chaussée, juste à droite après avoir franchi le pont-levis, une fresque très abîmée qui possède, en bas à gauche, une fleur de lys… A côté du château se trouvent les vestiges d’une fabrique de sucre datant du XIVe siècle. Les moines soldats de l’hôpital, en effet, cultivaient les oliviers, la vigne et la canne à sucre. Ce n’est qu’au XVIe siècle que le coton remplaça cette dernière. Les hospitaliers étendirent leur puissance sur les villages voisins et surent repousser les assauts des Génois et des Mamelouks.
En 1502, ils quittèrent l’île pour se replier à Rhodes, là où était installé le quartier général de l’Ordre.

Kourion
A 19 km à l’ouest de Lemesos, en direction de Pafos. Le site archéologique est ouvert tlj de 8 h à 17 h de novembre à mars, de 8 h à 18 h en avril-mai et septembre-octobre et de 8 h à 19 h 30 de juin à août. Entrée payante.
S’il ne fallait voir qu’un seul site archéologique à Chypre, ce serait Kourion. Un lieu spectaculaire, entre terre et mer, où les fouilles continuent.
Elles ont déjà mis au jour, sur un vaste espace, de superbes mosaïques et des vieilles pierres qui ont toutes une histoire à raconter. Il ne faut pas hésiter à flâner longuement dans cette ancienne cité-royaume. Un formidable rendez-vous avec le passé.
Depuis plus de cinquante ans, des archéologues fouillent Kourion, où sans cesse des vestiges de différentes époques sont découverts.
La cité a été fondée au XIIe siècle av. J.- C. à l’extrémité d’une falaise par des colons achéens. Au cours des siècles, la ville tombe sous la coupe des Egyptiens, des Assyriens, des Perses, et des Romains qui l’embellissent. En 342 et 352 apr. J.-C., Kourion est ruinée, brisée, désarticulée par deux tremblements de terre. C’en est fini de la magnificence de la ville, de sa richesse et de sa culture. Elle vivote, notamment, en étant élevée au rang d’évêché par la toute nouvelle religion chrétienne.
Mais elle sera définitivement mise à genoux et abandonnée au XVIIe siècle par les invasions arabes. Même l’évêché quitte la cité pour être transféré quelques kilomètres plus loin, dans l’un des villages d’Episkopi et l’on ne parla plus de Kourion… Jusqu’aux fouilles, en 1873, de Luigi di Cesnola qui, avide d’argent, « retourna le site » à la recherche de pièces uniques. L’intérêt pour Kourion et ses trésors était relancé pour les scientifiques.
On peut visiter Kourion en voiture, une route non asphaltée serpentant entre les premiers vestiges du site. Inutile de dire que l’on n’a, alors, aucune idée de l’ancienne citéroyaume. Il faut arpenter Kourion à pied, de préférence en début de matinée ou en fin de journée, et prendre son temps. Le site est parcouru par un chemin pierreux le long duquel sont disséminées d’émouvantes ruines, les dernières traces d’une ville qui a brillé durant toute l’Antiquité.

La presqu'île d'Akrotiri
Sur la route qui conduit à Pafos, juste après avoir quitté Lemesos et avant la tour de Kolossi, on peut faire un crochet par la presqu'île d'Akrotiri pour circuler autour d'un lac salé, où hivernent, d'octobre à mars, des flamants roses. Les ornithologues ou tout simplement les amoureux des oiseaux auront peut-être la chance, toute l'année, d'apercevoir les superbes et rares faucons d'Eléonore, qui survolent le cap Gata, la pointe extrême de la presqu'île. On retrouvera la direction de Pafos et de Kolossi en circulant sur une route ombragée par les cyprès et les eucalyptus.

Cesnola bis
Après avoir pillé Amathonte, Cesnola se dirige à grands pas vers Kourion, abandonnée à tous les vents et sans aucune protection. Le consul fouille, perce, brise, éventre, retourne la terre et déplace les pierres. Au hasard de sa quête furieuse, il découvre, près du sanctuaire d'Apollon, une ancienne nécropole. Véritable communicateur, Cesnola médiatise ses recherches et annonce au monde stupéfait qu'il a trouvé « le trésor de Kourion ». Et les Chypriotes, médusés et impuissants, assistent, une nouvelle fois, à la vente de pièces, de bijoux, de bracelets d'or et d'argent du fameux trésor au… Metropolitan Museum de New York. Mais aujourd'hui, les scientifiques sont dubitatifs à propos de l'origine de ces objets…

Maison d'Achille
Une mosaïque représentant le guerrier grec face à Ulysse a donné son nom à cet édifice dont une salle mitoyenne présente une autre mosaïque illustrant l'enlèvement de Ganymède par Zeus transformé en aigle (on retrouve le même motif sur une mosaïque de Pafos).

Maison des Gladiateurs
Abattue par un tremblement de terre, elle laisse échapper de ses ruines de très belles mosaïques représentant des combats entre de rudes belluaires. Les couleurs accentuent le fracas des armes. Selon les archéologues chypriotes : « Ces mosaïques sont uniques dans la région. Ce sont les seuls combats de gladiateurs ainsi représentés à avoir été découverts dans toute la Méditerranée orientale. »

L'agora
Datée du IIIe siècle avant J.-C., il n'en reste plus que des colonnes en marbre avec leurs chapiteaux corinthiens. Des salles, avec leur lourd appareil de pierre, ont été mises à jour le long de ce haut lieu de la vie publique grecque qui, sous les Romains, deviendra le forum.
Kourion était alimentée en eau par un imposant nymphée dont on découvre les restes avec ses arches, ses colonnes et ses grosses pierres qui gisent non loin de l'agora. On approche des « quartiers » d'habitation. Surgit alors une colonne, dressée face à la mer et qui rappelle que la cité a été chrétienne.

Basilique paléochrétienne
Avec ses statues de marbre et son sol recouvert de mosaïque, c'est probablement la cathédrale de Kourion, construite au Ve après J.-C. pour accueillir les fidèles. On a également mis à jour, attenant à la basilique, les restes d'un baptistère, d'une salle où les fidèles déposaient leurs offrandes (comme dans l'Antiquité pour le temple d'Apollon) et de la résidence des évêques. Cette cathédrale primitive et dépendances ont, vraisemblablement, été jetés bas par un tremblement de terre.

Théâtre gréco-romain semi-circulaire
Accroché à flanc de coteau, face à la mer, il fut construit au IIe siècle av. J.-C. et agrandi quatre cents ans plus tard pour accueillir 3 500 personnes. Endommagé par un séisme, abandonné, pillé au cours des siècles, ce théâtre a été entièrement restauré et propose, l'été, des représentations théâtrales et musicales. Dorées par le soleil, patinées par les vents, les pierres dégagent une certaine sérénité, accentuée par le coucher du soleil qui colore le théâtre de jaune fauve.

Maison d'Evstolios
On ignore tout de ce personnage passé à la postérité grâce à une mosaïque de la maison qui, sur un de ses côtés, porte le nom de cet homme. Une maison de plaisirs et de bains, sans doute, gardée et animée par Evstolios. Une inscription sur une mosaïque précise : « Entre et bonne chance dans la maison. » Il faut entrer. Et entre les petits murets qui séparent les bains, on découvre une des mosaïques les plus attachantes de Kourion : au centre de la composition très colorée apparaît le visage gracieux d'une femme. Elle mesure le temps. C'est Ktisis, la Création. Le sol des bains présente d'autres mosaïques où l'on aperçoit perdrix, paons, poissons et pies. On découvre des bassins, un frigidarium et un hypocauste pour chauffer l'eau. On dut prendre du bon temps dans « la maison d'Evstolios ».
Mais tout a une fin. Une mosaïque blanche porte une inscription en lettres rouges : « Fini, les grandes pierres, les fers solides, les beaux cuivres et les diamants purs. Cette maison est placée sous le signe du Christ. »

Stade
A 1 km de Kourion, à droite sur la route de Pafos.
En plein champ, on peut voir les ruines d'un stade en U, construit au IIe siècle. Peu fréquentés, ces vestiges d'un stade qui pouvait accueillir 6 000 personnes méritent pourtant une visite et confortent l'importance de Kourion dans la vie antique de l'île. A noter : les athlètes couraient nus et les compétitions étaient interdites aux femmes.

Sanctuaire d'Apollon Ylatis
A 3 km de Kourion en direction de Pafos. Ouvert tlj aux mêmes heures que le site archéologique de Kourion. Entrée payante.
Le sanctuaire d’Apollon Ylatis, dieu des Forêts et dieu protecteur de Kourion, était un des centres religieux les plus importants de l’île. Outre le temple du dieu partiellement restauré, on découvre, notamment, des salles d’accueil pour les pèlerins et un enclos sacré.

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