Les îles mineures de la Sicile
Elles dépendent administrativement de la Sicile, bien que certaines soient plus proches des côtes d’Afrique ! Des Eoliennes tonitruant de tous leurs volcans à la lointaine Lampedusa, en passant par Favignana et ses matadors de thon : la diversité d’une Sicile de l’extrême.
Les Eoliennes (isole Eolie, isole Lipari)
Elles sont dix-sept, mais on compte seulement celles qui sont habitées, soit sept îles. Reliées à Milazzo, Cefalù et Naples, elles seraient un petit monde laissé derrière eux par les Grecs, n’était cette obsédante activité volcanique. De bagne pour mafieux sous le fascisme, elles sont devenues balnéaires, vivant en parallèle au rythme de la pêche et des vignes.
Lipari
A 42 milles marins de la Sicile.
C’est la plus grande des Eoliennes, qui, de ce fait, prennent également le nom de Lipari. Ses gisements d’obsidienne – destinée aux pointes de flèches – y attirent des hommes préhistoriques entreprenants, qui l’exportent même en Provence et en actuelle Croatie. Si l’on en croit Homère, la pierre ponce formait déjà, de son temps, de curieux tapis sur la mer, qu’Horace mentionne également dans son poème Carpe diem.
Lipari accueille aujourd’hui les baigneurs de Spiaggia Bianca et les explorateurs du week-end. Au Castello de Lipari, ancienne acropole, ils trouveront les restes de cabanes préhistoriques.
On retiendra que la cathédrale recèle un tableau attribué au Caravage, et que c’est à San Calogero que l’on découvrira les restes d’un village mycénien, avec son étuve exploitant les vapeurs du sous-sol.
Sachant que Quattrocchi signifie « quatre-z’yeux », on comprendra que c’est le meilleur point de vue de l’île. Quant au mont Pelato, il est l’exacte traduction de notre « montagne Pelée », et c’est aussi un volcan !

Lipari By: Bertrand_L – CC BY-NC-SA 2.0
Le Musée éolien
Ouvert tlj sauf lundi de 9 h à 14 h. Entrée libre.
Le palais du XVIIIe siècle abrite ce musée. Au milieu des trésors remontés des épaves s’aligne une collection unique de 250 masques de théâtre en miniature : tous les personnages de la « nouvelle comédie athénienne », de « la fausse vierge » à « la parfaite prostituée » et au « préféré des esclaves ».
Vulcano
A 0,5 mille marine de Lipari.
Les genêts colonisent les flancs d’un gros dôme crevassé : le volcan. Habitée tardivement en raison de son activité presque permanente, l’île a gardé sauvages ses paysages, ponctués de solfatares, dont les blocs de soufre peuvent atteindre la taille d’une voiture.
Stromboli
A 22 milles marins de Lipari.
Des plages noires de cendres, une végétation dopée par les dépôts éruptifs, des maisons à toit plat en guise de strapontins ; car Stromboli, c’est le spectacle de sept bouches qui crachent une fois par quart d’heure.
On peut l’observer de la mer, si possible de nuit : avant l’invention du radar, le rougeoiement de la lave du Stromboli était un repère sûr pour la navigation nocturne. Il a été relayé par le phare du Strombolicchio, l’un des plus gros faraglioni (colonnes de basalte issues de l’activité du sous-sol) des Eoliennes.
Suivez le guide !
Sur le port de Marina Lunga, porte d’entrée de Lipari, louez des scooters : l’idéal pour faire en trois quarts d’heure le tour de l’île.
Salina
A 3 milles marins de Lipari.
Bordant une campagne verte, des petits ports blancs et leurs gozzi – les barques de pêche des Eoliennes, aux lignes multicolores. On y observera les modestes geysers des Sconcassi, près de Rinella.
Panarea
A 8 milles marins de Lipari.
Avec ses criques inaccessibles autrement que par la mer, c’est un peu la chasse gardée des riches propriétaires de yachts… lorsqu’ils n’y font pas construire des villas somptueuses, qui jalonnent un littoral en dents de scie.
Alicudi
A 26 milles marins de Lipari.
Est-elle la plus sauvage des Eoliennes ? C’est en tout cas la moins peuplée : 300 âmes seulement. Son nom antique, Ericusa, désigne les différentes espèces de bruyères qui y poussent toujours.
Filicudi
A 16 milles marins de Lipari.
Ses murets de pierre sont le seul témoignage de sa fertilité de naguère : de nombreux habitants sont partis… pour l’Australie ! C’est le paradis des plongeurs, et on pourra visiter, en bateau, quelques grottes marines.
Les Egades (isole Egadi)
En 241 avant notre ère, les Egades sont le théâtre de la bataille navale qui permet à Rome d’arracher la Sicile aux Carthaginois. Situées à l’ouest de Tràpani, elles sont trois, si l’on exclut Formica (« fourmi », en italien, c’est dire sa taille !) et Mozia, plus minuscule encore. Depuis 1992, l’archipel est devenu parc naturel, qui vit essentiellement de la pêche.
Favignana
A 10 milles marins de la Sicile. Une heure de bateau depuis Tràpani.
En forme de papillon, elle est surtout connue pour la pêche au thon rouge, selon la méthode, la tactique, devrait-on dire, de la tonnara (un réseau de filet comparable à la madrague provençale).

The harbour of Favignana By: Daniele Colombo – CC BY-NC-SA 2.0
Maréttimo
A 13 milles marins de Favignana.
Très montagneuse, l’île cache un relief sous-marin dangereux : de nombreux bateaux en furent victimes, avant l’ère du sonar. Ces tragiques épaves feront, à l’occasion, le bonheur des plongeurs. On y visitera des villas romaines et quelques grottes, en faisant appel aux services d’un pêcheur et de sa barque à haute proue, typique de l’île.
Corrida des flots
Elle se pratique de mai à juin, quand des bandes de milliers de thons mâles viennent féconder les œufs des femelles. Les opérations sont dirigées par un homme d’expérience, le rais (d’un mot arabe qui signifie « capitaine »). La phase finale porte le doux nom de mattanza, c’est-à-dire « tuerie » : une véritable corrida aquatique, dont les protagonistes sont des poissons de 25 à 50 kg et des hommes armés de tridents et de couteaux.
Elle s’accompagne des accents violents de mélopées, aux réminiscences mauresques. Cette vieille tradition est battue en brèche par les écologistes et les concurrences nippone et nord-africaine.
Suivez le guide !
S’approcher des cratères peut coûter la vie à cause des émanations toxiques et des chutes de bombes. Le meilleur moment pour observer les éruptions reste la nuit, quand les projectiles passent du gris au rouge, à la manière des mégots de cigarettes.
Levanzo
A 2 milles marins de Favignana ; 20 milles marins de Tràpani.
C’est la plus petite des Egades. Mal desservie, protégée de falaises sur tout son tour, Levanzo réserve sa nature sauvageonne et ses modestes champs aux visiteurs en quête de silence.
Mozia (San Pantaleo)
A 0,5 mille de la Sicile. Un quart d’heure de bateau depuis Salinas.
Entre Marsala et Tràpani, c’est l’ancienne base carthaginoise de Mothia, fondée au VIIIe siècle avant notre ère. Elle a été fouillée toute sa vie durant par l’Anglais Whitaker. Au centre dort l’ancienne demeure du mécène et le musée(ouvert tlj de 9 h à 13 h et de 15 h au coucher du soleil), qui rassemble, entre autres, quelques-unes des 1 300 stèles du tophet – l’aire où les Puniques faisaient leurs sacrifices, rappelés précisément par des inscriptions votives.
En sus des remparts, un tour de l’île en une heure permettra de voir une rare caserne carthaginoise, le tophet même et, surtout, le port : une entrée en biais, des quais, et un calme bassin enjolivé par le jeu des marées et des algues.
Pantelleria et les Pelagies (isole Pelagie)
Trois îles, dont la plus petite est l’îlot inhabité de Lampione, et la plus volcanique, Linosa. Au loin, Pantelleria joue les bêcheuses et n’appartient pas à l’archipel.
Lampedusa
A 100 milles marins de la Sicile. A 30 min d’avion depuis Palerme.
Longtemps célèbre pour son seigneur (de titre, seulement), Giuseppe Tomasi di Lampedusa, auteur du roman autobiographique Le Guépard, elle fait aujourd’hui la une des journaux pour son centre d’internement des 30 000 migrants venus d’Afrique clandestinement. Désert calcaire d’une sobre beauté, on y rencontrera, tous les trois ans, les tortues qui viennent pondre leurs œufs sur ses rivages paisibles.
Pantelleria
A 55 milles marins de la Sicile ; 46 milles marins de la Tunisie. A une heure d’avion depuis Palerme ou Tràpani.
Cette île noire, connue pour sa production de câpres et de raisins zibbibu, est devenue un lieu de villégiature élitiste, voire bobo, où l’on peut s’offrir, en se déplaçant en scooter, les joies de quelques brasses dans une crique, des bains de boue chaude dans le lac de Vénus (lago di Venere), ou des étuves naturelles qui se cachent dans les grottes, au pied des 836 m de Montagna Grande. L’habitat est caractérisé par les dammusi, rustiques maisons de basalte et les giardini panteschi, enclos circulaires fortifiés, protégeant les vergers.
Douce malvoisie…
Elle plaisait tellement au duc de Clarence que, lorsqu’on lui demande de choisir sa mort – il avait osé prendre parti contre son frère, le roi d’Angleterre – il demande à être noyé dans un tonneau de ce précieux vin. Le nom de malvoisie est une déformation de Monemvasia, ancienne possession franque du sud-est du Péloponnèse dont le vin doux était la spécialité.
Les raisins sont récoltés juste avant qu’ils ne se mettent à pourrir. On les met à sécher, puis on les presse pour en extraire un jus très sucré que l’on met à fermenter. Le parfum du vin est très prononcé, et son taux d’alcool, traître. Lointaine cousine du tokay hongrois et de notre sauternes, la malvasia des Eoliennes est aujourd’hui de plus en plus rare, remplacée qu’elle est par le zibibbu de Pantelleria.