Catane et Taormine

Catane ! La ville mal aimée fait éclater son nom, au pied d’une montagne explosive. Catane est la gouttière de l’Etna, Messine sa porte dérobée, Taormine son balcon. Car tous ces sites l’ont pour point commun, comme un bout d’horizon, cet œil qui rougeoie en saison, et qu’Ulysse et ses compagnons prirent pour un cyclope vorace.

Catane (Catania)

A 200 km à l’est de Palerme.
Des corsi riches qui se cisaillent à angle droit, des marchés criards où l’Afrique pactise avec les champs, des ruelles louches jalonnées d’échafaudages…
Plonger dans tout cela, c’est tempérer la mauvaise image de Catane, celle des voleurs de sacs et des escrocs des bas-fonds ; pour rencontrer des marchands de sirops qui déclinent tous les agrumes, des libraires experts qui bradent sur les trottoirs, des chats qui s’aiment dans les ruines grisonnantes et des gardiens de château qui tiennent à leur monument.
Fondée par les Sicules, elle devient la Katane des colons de Naxos. Son code de loi devient le modèle de toutes les cités grecques de Trinacrie. En 121 avant notre ère, elle est rasée par l’Etna, puis en 1169, puis en 1669 : 20 000 morts, et tout reconstruire, dans un baroque que viendront écorner les obus de la force alliée. Mais Catane croit en elle-même… et en sainte Agathe.

Porte Garibaldi (Porta Garibaldi)

A l’ouest de la ville.
Avec son aigle perché sur l’horloge et ses Victoires qui trompettent, cette arche rayée comme un zèbre ne célébrait pas le héros national italien, mais le mariage de Ferdinand III de Bourbon. Les autoroutes aidant, elle n’est plus le passage obligé du visiteur venant de Palerme.

Cathédrale (Duomo)

Piazza Duomo. Ouvert tlj de 8 h à 12 h et de 16 h à 19 h.
Plantée sur la place comme un défi sévère aux cafés d’en face, elle est d’un baroque un peu triste. La structure originale date du XIe-XIIe siècle. Les architectes qui la refirent au XVIIIe eurent le génie de réutiliser d’anciens éléments, comme un portail Renaissance et les colonnes.
Le sanctuaire est dédié à sainte Agathe, martyre aux seins tranchés et patronne de Catane. Derrière un pilier se cache l’élégant tombeau, de la gloire locale, le compositeur Bellini. Dans la sacristie, un artiste moins connu a peint l’éruption de 1669. Par une porte latérale, on peut accéder aux ruines romaines des thermes Achilliens.

L’éléphant de Catane By: Bertrand_LCC BY-NC-SA 2.0

Fontaine de l’Eléphant

Barrissant naïvement de sa trompe de lave – et peut-être sous le poids de l’obélisque, posé sur son dos, il semble tout de même content d’être le symbole de Catane, car il serait à l’origine du nom arabe de la ville : Madinat-al-Fil, « Cité de l’Eléphant ». Toute la vie de la deuxième ville de l’île gravite autour de lui, entre les restaurants chics, les amoureux à lunettes noires et les bradeurs de marionnettes.

Porte Uzeda (Porta Uzeda)

Cette belle arche baroque relie la piazza Duomo aux marchés populeux dont les senteurs de salsiccia rôtie montent, annonçant le port.

Castello Ursino

Piazza Federico di Svevia. Musée ouvert tlj sauf samedi après-midi de 9 h à 13 h et de 15 h à 22 h ; dimanche de 9 h à 12 h 30 et de 15 h à 18 h. Entrée libre.
Construit par l’inévitable Frédéric II, très austère avec son plan carré et ses tours à barreaux, il est le spectateur intransigeant d’interminables parties de football du quartier populeux aus alentours.
A l’intérieur, la cour expose quelques vestiges antiques, et les corps de bâtiments abritent le musée municipal, où l’on verra quelques marbres tirés du sol de la province, des tarots du XVe siècle, des tapisseries flamandes et un saint Christophe signé Pietro Novelli.

Via dei Crociferi

Cette artère rassemble l’essentiel des palais baroques de Catane et les églises des Jésuites (dei Gesuiti) et de Saint-Julien (San Giuliano). A son terme, la rue débouche sur une place au bout de laquelle se trouvent les restes d’un amphithéâtre romain, à peine moins vaste que le Colisée.

Théâtre Bellini (Teatro Bellini)

Ses contours rigides, très XIXe, ne peuvent contenir une exubérance toute italienne dans la décoration. Il faut dire que le théâtre est la combinaison de plusieurs projets proposés par des architectes concurrents.

Maison de Giovanni Verga

Via Santa Anna 4. Ouvert tlj sauf dimanche de 9 h à 13 h et de 15 h à 18 h.
On en admirera avant tout les six bibliothèques de noyer de l’auteur de Cavalleria rusticana, la nouvelle qui inspirerait l’opéra-spectacle de Pietro Mascagni.

Les théâtres romains et l’odéon

Ouverts de 8 h à 18 h. Entrée libre.
Contre toute attente, ces deux scènes antiques, situées dans la via del Teatro Greco, sont d’origine romaine. Leurs arches bichromées ont été restaurées. L’odéon était le théâtre de lectures poétiques et de concerts, et le théâtre préférait la comédie aux tragédies.
Les gradins, refuges des doux ébats des chats du quartier, mêlent artistement brique, calcaire et gros blocs de basalte en une symphonie de couleurs assez réussie.

Maison natale de Vicenzo Bellini

Piazza San Francesco, 3. Ouvert tlj sauf dimanche de 9 h à 13 h 30 (12 h 30 dimanche) et de 15 h à 18 h mardi et jeudi. Entrée payante.
C’est là que naît, en 1803, le musicien dandy, fils d’organiste. Après avoir signé neuf opéras en dix ans, dont Norma et Les Puritains, il meurt à Paris, à 34 ans.

Prison d’Agathe (Santo Carcere)

Piazza Santo Carcere.
C’est une authentique geôle romaine, inclue dans une église qui a volé son portail à la cathédrale après sa destruction, en 1669. C’est ici qu’aurait eu lieu le cruel martyre de la jeune et belle vierge : Agathe refuse de se plier aux avances du consul Quintianus, qui, déçu, l’envoie faire son éducation dans un bordel ; mais la mère maquerelle ne réussit pas à la dresser. Furieux, Quintianus lui fait arracher les seins avec des tenailles. La future sainte répond seulement : « Cruel, as-tu oublié ta mère et comment elle t’a nourri pour me mutiler de la sorte ? »
Dans son cachot, Agathe reçoit la visite de l’apôtre Pierre, qui la guérit. Fou de rage, le consul la fait coucher sur des charbons ardents : elle expire dans un cri de joie. Elle est devenue la protectrice de Catane… et des nourrices du monde entier !

Palais Biscari

Visite guidée uniquement et sur rendez-vous de 9 h 30 à 12 h 30 et de 16 h à 19 h. Fermé dimanche et en août.
Construit après le séisme de 1693, il déploie une opulente façade remaniée au XVIIIe siècle : angelots souriants et grassouillets s’accommodent de la présence de grotesques gargouilles, une décoration chargée que l’on retrouve dans la salle des fêtes.

Taormine

A 40 km au nord de Catane ; 35 km au sud de Messine.
Lancée par le photographe von Glöden, Taormine vit pousser comme d’illustres champignons des hôtels de grande classe, tel le légendaire Timeo ou les anciens couvents vite convertis au tourisme de luxe. Le regard pointilleux de la police municipale, les tenues de reporter d’Américains ravis, les rues étroites plantées de « sens interdits » et l’Etna qui disperse ses cendres sur les balcons d’hôtels, tel un fumeur indélicat, confèrent à Taormine un charmant désordre et l’air – un peu aseptisé – d’une ville de montagne.
Les portes médiévales délimitent le corso Umberto, véritable fil conducteur de toutes les merveilles monumentales. Toutes… ou presque, car le monument majeur de Taormine, c’est le théâtre.

Théâtre

Ouvert tlj de 9 h à 2 h avant le coucher du soleil. Entrée payante.
Il n’y a pas, dans le monde entier, de théâtre qui offre un point de vue aussi imparable. A travers les arches de pierre et de tuile du mur de scène refait par les Romains paraît l’une des plus belles baies de la mer Ionienne.
Le clou du spectacle, ce sont les nuits d’éruption, quand le cratère crache, comme des oiseaux morts et rougeoyants, des bombes volcaniques sur ses versants si proches. « La plus belle vue que j’aie vue en voyage », disait le Français Viollet-le-Duc. L’été, il est le lieu de concerts de bonne tenue.

La Naumachie

On atteint, par le corso Umberto, une vaste terrasse romaine et sa suite de logettes de maçonnerie : sans doute un établissement thermal, et non un bassin pour les mini-batailles navales, comme on l’a d’abord cru.

Palais Corvaia

Hébergeant l’office du tourisme, il affiche quelques éléments de l’époque arabe, notamment la base des murs et une porte. La façade donnant sur la rue principale est magnifique de sobriété avec sa corniche.

Fondation Mazzulo

Via del Ghetto. Ouvert de 8 h 30 à 12 h 30 et de 15 h 30 à 18 h.
Elle a pour écrin le palais Santo Stefano (XVe), construit pour une famille espagnole sur une ancienne bâtisse arabe. On remarquera sa frise bicolore de lave et de calcaire, et une très belle collection de sculptures de de Graniti. La fondation propose également des expositions temporaires.

Badia Vecchia

Appelée aussi Badazzia, cette abbaye fortifiée par les Normands a été très remaniée au XIVe. Une frise rappelle celle du palais Santo Stefano.

Cathédrale (Duomo)

Ouvert de 8 h à 12 h et de 15 h 30 à 18 h 30.
Elle fait sérieuse, la cathédrale, avec sa couronne crénelée ! Dédiée à saint Nicolas, elle date du XIIIe siècle. L’intérieur est à trois nefs et son maître-autel expose des polyptyques de peintres siciliens.

Château arabe (Castello Saraceno)

C’était depuis ce château que les Arabes assiégeaient celle qui était alors capitale byzantine. Il a été entièrement reconstruit au XIIIe siècle. A son pied, le sanctuaire de Notre-Dame-de-la-Roche (Madonna della Rocca) est un lieu de pèlerinage local. Du château, on peut gagner facilement Castel Mola, petite rivale de Taormine. Porte perdue au milieu des figuiers de Barbarie, elle s’atteint par un chemin pédestre.

Lire la suite du guide