A l'intérieur de la Cathedrale d'Uspenski © Guillaume Baviere

A l’intérieur de la Cathedrale d’Uspenski © Guillaume Baviere

Suédoise pendant sept siècles, russe pendant plus de cent ans, la Finlande indépendante a moins d’un siècle d’existence. Entre Europe de l’Est et Europe de l’Ouest, les Finlandais ont longtemps cherché leur identité. Une des raisons peut-être pour laquelle le drapeau national est omniprésent.

Premiers habitants : les Lapons (10000-3000 av. J.-C.) 
Avec la fin de la période glaciaire, il y a dix mille ans, quelques groupes de chasseurs de phoques gagnent progressivement les rives du golfe de Finlande. Ces Sami, ou Lapons, viennent semble-t-il de l’est.

Immigration finnoise (3000-1000 av. J.-C.) 
Une nouvelle émigration atteint les côtes baltiques vers 3000 av. J.-C. Des tribus nomades, dites finno-ougriennes, provenant de la grande plaine russe située entre l’Oural et la rivière Volga, font cap à l’ouest. Certains peupleront la Hongrie (Magyars), d’autres l’Estonie (les Estes), tandis que les Caréliens et les Finnois repoussent les premiers occupants sami vers le Nord arctique.

L’abécédaire du finnois 
De tradition orale, la langue finnoise fut transcrite pour la première fois, grâce à Mikael Agricola, évêque d’Åbo (Turku). S’inspirant de l’alphabet suédois, il traduit et publie le Nouveau Testament en finnois en 1548. La Réforme luthérienne l’utilise ainsi comme un outil d’évangélisation. Le finnois écrit est longtemps limité aux ouvrages religieux, la haute société finlandaise conservant le suédois et les érudits le latin. Considéré avec mépris comme « langue des paysans », le finnois n’accède à un statut officiel qu’en 1860.

Guerres internes et présence viking (Ier siècle ap. J.-C.-1155) 
Entre Finnois à l’ouest et Caréliens à l’est, la cohabitation est difficile, la guerre permanente. Chacun cherche à renforcer son camp avec des alliances. Les Finnois font commerce de la fourrure avec les Vikings suédois, tandis que les Caréliens tissent des liens avec les Estes et les Russes de la principauté de Novgorod. Mais, dès le IXe siècle, le littoral finlandais se peuple de Suédois. Ces derniers s’établissent même complètement sur l’île de Mariehamn.

Dominations suédoise et russe (1157-1527) 
Pour les Suédois catholiques, superpuissance de l’époque, la Finlande est sur la route qui mène aux riches plaines russes et à la mer Noire. Elle doit donc être conquise. Une « première croisade » soumet le sudouest du pays en 1155, puis une seconde en 1238 permet aux Suédois de contrôler le centre. Inquiets, les Russes orthodoxes s’avancent en Carélie. Avec la troisième croisade de 1293, les Suédois atteignent Vyborg (aujourd’hui en Russie). Il faut attendre 1323 pour qu’une première frontière soit tracée lors du traité de Nöteborg (Pähkinäsaari en finnois). Seule la Carélie reste sous domination russe. Devenue partie intégrante du royaume suédois, la Finlande devient une terre d’immigration pour les Suédois, auxquels on offre de grands lopins de terre et des baisses d’impôts.

La Réforme (1527-1574) 
A la fin du Moyen Age, les 350 000 habitants de Finlande sont principalement des paysans. Le centre politique du pays est en Suède, même si Turku, siège épiscopal, a une certaine importance. En 1527, le roi Gustave Vasa de Suède adopte la confession luthérienne. Il confisque les propriétés ecclésiastiques et fonde Helsinki en 1550. La Réforme s’étend en Finlande grâce à Mikael Agricola, élève de Martin Luther, qui le premier va traduire le Nouveau Testament en finnois.

Les incursions (1574-1581) 
Avec comme seule recommandation de « transpirer et souffrir », le roi de Suède demande alors à ses sujets finlandais de s’aventurer en territoire russe, bien au-delà des frontières déterminées par les traités. Les Russes essaient de repousser l’envahisseur, ce qui donne lieu à de sanglantes batailles. Pendant dix ans, la guerre de Kainuu fait rage et détruit tout sur son passage, mais les Finlandais progressent. Signe de l’importance de la région, en 1581, Jean III, fils du grand Gustave Vasa, reçoit le duché de Finlande en héritage et décide d’en faire un grand-duché.

La Suède s’agrandit (1581-1697) 
Le XVIIe siècle est l’âge d’or de la Suède, qui contrôle la Finlande, l’Estonie, ainsi qu’une partie de la Lettonie, du Danemark, de l’Allemagne et de la Russie. Sous le règne de Gustave II Adolphe (1611-1632), les Suédois repoussent les Russes et annexent la Carélie orientale en 1617. La religion orthodoxe apparaît alors dans la très luthérienne Finlande. De 1644 à 1654, la Suède est dirigée par l’excentrique reine Christine qui se convertit au catholicisme. Son règne marque la fin de la dynastie Vasa. La famille royale allemande de Pfalz-Zweibrücken prend la relève. Mais, pour la Finlande, rien ne change. Elle est considérée comme partie intégrante de la Suède, et sa langue officielle est le suédois. Tous ses riches propriétaires habitent Stockholm tandis que, loin de la cour, les cultivateurs finlandais vivent dans des conditions extrêmement rudes. En 1696 et 1697, la famine et les maladies déciment un tiers de la population.

La Grande Colère (1697-1721) 
La grande compétition entre Suédois et Russes pour l’hégémonie de la Baltique se poursuit au prix de terribles souffrances pour les Finlandais qui ne sont plus qu’à peine 300 000. Pendant la période d’occupation, connue sous le nom de « Grande Colère », les paysans se réfugient dans les forêts. Les Russes, qui viennent de fonder Saint-Pétersbourg et ont réduit les pays baltes, occupent le pays. Les destructions ruinent notamment l’ouest de la Finlande et l’île d’Åland. En 1721, les Suédois, dont la puissance est déclinante, perdent la guerre. Par le traité de Nystad, les Russes obtiennent un vaste territoire comprenant le sud-est de la Carélie et la région de Vyborg.

La domination russe (1721-1853) 
En 1743, la Russie étend encore sa domination grâce au traité de Turku. Après sept siècles d’hégémonie suédoise, la Finlande est finalement annexée à l’Empire russe en 1809. Les Russes toutefois s’engagent à respecter les institutions traditionnelles du pays, érigé en grand-duché. L’Eglise luthérienne garde sa prééminence et le suédois demeure la langue officielle de ses 900 000 habitants. Mieux, la Diète, ou assemblée finlandaise, est maintenue et le gouvernement local, aux mains de Finnois, directement rattaché au tsar. Seule nouveauté, les Russes déplacent en 1812 la capitale de Turku, trop proche de la Suède, vers Helsinki. Les Finlandais développent alors un fort sentiment culturel national. Ainsi, l’écrivain Lönnrot publie en 1835 le Kalevala, vaste épopée littéraire au grand succès populaire.

Le temps des réformes (1853-1899) 
Fidèle à la Russie, la Finlande prend part en 1853 à la guerre de Crimée. Les fortifications de Loviisa, Helsinki et Bomarsund sont détruites. Malgré cette guerre, les Finlandais poursuivent leurs réformes. En 1855, le finnois devient langue nationale au même titre que le suédois. L’année suivante, le grand-duché imprime son premier timbre-poste. Quatre ans plus tard, l’empereur de Russie Alexandre II lui accorde le droit d’avoir une monnaie : le mark finlandais. En 1878, il est autorisé à posséder une armée nationale. Le pays se développe, les lignes de chemins de fer se multiplient tandis que des canaux et des écluses relient les grands lacs à la mer Baltique.

Entre oppression et démocratie (1899-1917) 
En 1899, Nicolas II lance une politique brutale de russification. Mais la guerre russo-japonaise et la révolution de 1905 obligent le tsar à reculer et à rétablir les libertés finlandaises. Le 20 juillet 1906, le grand-duché de Finlande se dote même du régime le plus démocratique d’Europe. La vieille assemblée traditionnelle est transformée en Chambre des députés élus au suffrage universel masculin et féminin des plus de vingt-quatre ans. Les Finlandaises sont ainsi les premières femmes du monde à obtenir le droit de vote.

Enfin indépendante (1917-1918) 
La révolution d’octobre 1917 qui entraîne la chute du tsar permet aux Finlandais de proclamer leur indépendance le 6 décembre 1917. Bien qu’officiellement reconnue par les révolutionnaires russes, l’indépendance finlandaise est fragile, d’autant que des troupes russes stationnent toujours en Finlande. En janvier 1918, la garde civile finlandaise se divise en deux clans. D’un côté, les Rouges soutenus par Moscou ; de l’autre, les Blancs commandés par Mannerheim, un ancien aide de camp de Nicolas II, et soutenus par l’Allemagne qui envoie même un corps expéditionnaire. Au bout de 108 jours de combat, on compte 30 000 morts. Les Blancs reprennent Helsinki le 13 avril et chassent définitivement les gardes rouges le 30 avril, par la victoire de Vyborg. Les Allemands cherchent alors à installer Frederich Karl, prince de Hesse, comme roi de Finlande. Mais la chute du Reich en novembre 1918 met un terme au projet.

Lotta-Svärd 
Lotta, jeune Finlandaise, suit son mari lors de la guerre de 1808 contre les Russes et s’engage en tant que volontaire. A la mort de celui-ci, elle décide de continuer de se battre comme cuisinière et aide-infirmière, et devient héroïne de guerre. Elle est bientôt rejointe par des centaines de femmes qui se regrouperont dès 1918 dans l’association Lotta-Svärd. Employées principalement dans les services de ravitaillement et de santé, celles qu’on appelle les sœurs Lotta reçoivent un véritable entraînement militaire et sont affectées à la défense antiaérienne. Elles se distinguent contre les bolcheviks durant les combats de 1918 et 1919, et surtout pendant la guerre de 1939-1945, et inspirent la création d’organisations féminines analogues dans les pays occidentaux.

Vive la république (1918-1939) ! 
En décembre 1918, Mannerheim devient régent en attendant la Constitution du 17 juillet 1919 (toujours en vigueur) qui établit la république. Un traité de paix est signé en octobre 1920 avec le gouvernement soviétique, tandis que la SDN attribue à la Finlande la souveraineté sur les îles Åland en juin 1921. De 1920 à 1940, les ministères se succèdent : à l’agitation communiste succède celle du Mouvement agrarien de droite (Lapua) puis celle du Mouvement patriotique populaire de tendance fasciste. A cette période, plusieurs réformes agraires morcellent la terre et permettent à 90 % des fermiers de devenir des petits propriétaires.

La Seconde Guerre mondiale (1939-1945) 
La Finlande affirme sa neutralité au début de la Seconde Guerre mondiale. Mais, dès octobre 1939, l’URSS fait pression sur elle pour obtenir la cession de bases stratégiques. Le gouvernement d’Helsinki refuse de céder. Le 30 novembre 1939, les forces soviétiques bombardent et envahissent le pays, sans déclaration de guerre. A la surprise de toute l’Europe, les Finlandais résistent, en plein hiver, pendant trois mois et demi. La guerre finnosoviétique se termine par le traité de Moscou en mars 1940 qui prive la Finlande du sud-est de la Carélie, d’une partie de la Laponie et de la base de Hanko, sur le golfe de Finlande. Espérant reconquérir ces territoires, les Finlandais se joignent, dès le 25 juin 1941, à l’attaque allemande contre l’URSS dans ce qu’ils appellent la « guerre de continuation ». Mais la contre-offensive soviétique les oblige à demander l’armistice le 19 septembre 1944.

La Finlande aux Finlandais ! 
« Suédois nous ne le sommes pas, russes nous ne le serons jamais, donc laissez-nous être finlandais. »C’est autour de 1820 que certains Finlandais comme Al Arwidsson, auteur de cette phrase désormais célèbre, commencent à penser à une éventuelle indépendance de la Finlande. Mais son opinion demeure isolée, et ce dernier est poussé à l’exil en Suède en 1823. Il faudra encore près de cent ans pour que l’idée visionnaire devienne réalité. Depuis 1917, date à laquelle la Finlande proclame son indépendance, le sentiment nationaliste ne fait que se renforcer. Aujourd’hui, le champion de formule 1, Mika Häkkinen, et celui de ski de fond, Mika Myllylä, font partie des personnalités qui défendent haut les couleurs de ce pays de 5 millions d’habitants.

Le maintien de l’indépendance nationale (1945-1947) 
Grâce à l’appui des puissances occidentales, Mannerheim puis Paasikivi réussissent à sauvegarder l’indépendance nationale. Au traité de Paris, le 10 février 1947, la Finlande abandonne aux Soviétiques, en plus des territoires perdus en 1940, le port septentrional de Petsamo, sur la mer de Barents. 420 000 réfugiés affluent en Finlande. Le pays conserve Hanko, mais cède à bail la péninsule de Porkkala, près d’Helsinki, qui ne sera restituée par les Soviétiques qu’en 1955.

Dettes de guerre (1948-1961) 
Contrainte de payer à l’URSS une lourde dette de guerre de 300 millions de dollars, la Finlande se lance dans une politique d’industrialisation. Le dernier train de marchandises vers l’URSS traverse la frontière en 1952. Liée depuis avril 1948 à l’URSS par un traité d’« assistance, d’amitié et de collaboration », elle doit, pour sauvegarder son indépendance, donner des gages de bonne volonté à Moscou. Son président de la République, qui possède des pouvoirs très étendus en politique étrangère, doit être un interlocuteur agréé par les Soviétiques, de même que tous les autres responsables politiques et syndicaux importants. A ce prix, la Finlande reste, à partir de 1948, une démocratie de type occidental.

Tournant économique (1961-1977) 
Malgré la « tutelle » soviétique, l’économie finlandaise s’oriente de plus en plus vers l’Ouest. Associée en 1961 à l’Association européenne de libre-échange (AELE), la Finlande signe en 1973 un accord de libre-échange avec la CEE (Europe des Neuf). Pour maintenir l’équilibre, elle doit conclure également un accord de coopération avec le Comecon. A mi-chemin entre les deux blocs, Helsinki est choisie comme siège de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe. En juillet 1975 y est signé un traité consacrant la politique de détente. Sur le plan intérieur, les communistes participent en 1977 au gouvernement d’union. La forte poussée des conservateurs aux élections de mars 1979 n’empêche pas qu’un social-démocrate très modéré, Mauno Koïvisto, docker devenu agrégé de sociologie, prenne la tête du gouvernement.

Gouvernement de coalition (1982-1995) 
En 1982, Mauno Koivisto remplace Urho Kekkonen à la présidence de la République. Kalevi Sorsa devient alors Premier ministre à la tête d’un gouvernement de coalition socialedémocrate, communiste, centriste et libérale. Le parti communiste quitte le gouvernement à la fin de 1982, mais n’obtient que 14 % des suffrages aux élections de mars 1983, et les conservateurs 22 %. Kalevi Sorsa constitue une coalition de centre gauche sans les uns ni les autres.

Avenir européen 
En 1995, la Finlande entre dans l’Union européenne. Considérée comme une bonne élève, elle applique les recommandations en temps et en heure. Son entrée dans la communauté économique et monétaire renforce la stabilité de son économie et la position du pays au niveau international. En 1999, la Finlande préside l’Union européenne. En 2000, Tarja Halonen est la première femme élue présidente de la République. En 2006, cette sociale-démocrate est reconduite à la présidence jusqu’en 2012, avec 51,8 % des voix. Juriste de formation et issue d’un milieu modeste, celle qui se proclame « présidente de tous les Finlandais » est appréciée pour sa simplicité. Tarja Halonen a assuré la présidence européenne pour la Finlande durant le deuxième semestre 2006.

 

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