Coimbra Old Town © Bernt Rostad

Coimbra Old Town © Bernt Rostad

Délimitées au nord par le Douro, au sud par le Tage, les Beiras – littéralement, « bords », « frontières » – présentent un visage différent, que l’on profite des immenses étendues sablonneuses du littoral, que l’on s’aventure sur les versants boisés de la serra da Estrela, plus haute montagne du Portugal, ou que l’on parcoure les plaines austères de la Beira Baixa, où couvents et châteaux se tiennent encore fièrement. Elles sont trois : l’Alta, la Litoral et la Baixa. La capitale régionale, Coimbra, rayonne encore jusqu’aux confins de l’Espagne grâce à sa prestigieuse université, inaugurée en 1308. Pourtant, les Beiras ont souffert au XXe siècle. C’est ici que la « désertification » – exode rural précédant une émigration massive – a pesé le plus douloureusement sur l’économie. Un isolement marqué, des rendements agricoles insuffisants et de rares industries ont appauvri cette région peu courue. Cependant, un certain dynamisme anime le littoral, qui profite des ressources maritimes et s’ouvre au tourisme. Figueira da Foz est même devenue l’une des stations balnéaires en vogue du pays. C’est sans doute la seule voie pour que cette région s’épanouisse enfin autant que les autres.

Le littoral

Les rivages qui bordent l’Atlantique tout au long de la Beira Litoral, sur une centaine de kilomètres, font alterner plages de sable fin et dunes ondoyantes. On les surnomme Costa de Prata, ou côte d’Argent. Figueira da Foz, cité la plus méridionale, brasse chaque année davantage de voyageurs, attirés par ses plages sublimes dites « de lumière », que le vent épargne. Plus au nord, c’est la jolie ville d’Aveiro qui double sa densité d’habitants chaque week-end et durant les vacances estivales. Entre ces deux agglomérations, des kilomètres de plages plus ou moins aménagées offrent de multiples occasions de goûter à la température saisissante de l’océan.

Sauvez le « bacalhau »…

Au pays, dit-on, des 365 recettes de morue, on se lamente de la progressive mais déjà avérée raréfaction de ce poisson à la chair riche et savoureuse. Le gouvernement a même tenté à plusieurs reprises de faire l’apologie d’autres espèces aquatiques, mais les traditions sont trop bien ancrées sur les tables du Portugal ! Le cabillaud, qui est une jeune morue, est victime du maillage trop étroit des filets tendus par les Norvégiens en mer du Nord, qui déciment des bancs entiers de poissons. La morue ne survivra pas des dizaines d’années à cette pêche industrielle et intensive et, déjà, le poisson de base de la gastronomie lusitanienne pâtit du prix de plus en plus élevé du kilo de bacalhau.

Costa de Prata

Figueira da Foz

A 43 km à l’ouest de Coimbra.
Bâtie sur l’embouchure de l’estuaire du fleuve Mondego, c’est une station balnéaire à la mode, offrant tous les loisirs inhérents à cet état de fait ! Marinas, plages aménagées, bases nautiques, animation pour tous âges, restaurants, bars, casino et discothèques en font une ville résolument tournée vers le tourisme et les loisirs. Cette villégiature de côte a développé une partie de ville moderne à l’ouest du grand jardin public et du marché, aux environs du casino.
Un « Sunset Boulevard », baptisé avenida do Brasil, longe l’océan sur plus de 3 km, vers le petit village de pêcheurs de Buarcos. Ceux qui estiment qu’une distance raisonnable entre chaque serviette d’estivant est nécessaire apprécieront les plages du village, plus calmes et moins fréquentées…

Vers l’intérieur
Vers l’intérieur des terres, la Serra da Boa Viagem(à 10 km au nord-est de Figueira da Foz), qui freine les vents qui devraient déferler sur la côte, est couverte de forêts de pins, eucalyptus, cèdres et acacias au milieu desquelles il est agréable de randonner. Les parfums qui s’en dégagent sont à eux seuls enivrants.

Aveiro
A 60 km au nord de Coimbra ; 70 km au sud de Porto.
En remontant vers le nord, s’aligne une succession de petits villages de pêcheurs et de plages qui mènent jusqu’à cette ravissante ville. Construite autour d’une lagune – ria en portugais -, c’est une cité striée de petits canaux, qui évoque Amsterdam ou Bruges et que sillonnent les moliceiros. Ces barques de couleurs vives aux proues en forme de col de cygne, sur lesquelles les propriétaires exercent leurs talents de peintres pour raconter quelque scène romantique, servent encore au transport du limon et des algues provenant de la lagune. On les aperçoit à l’œuvre dans la ria (faite de rizières et de marais salants), vaste de plus de 50 000 hectares.
Dès le XIXe siècle, Aveiro trace le cours actuel de ses canaux, et de très jolies maisons se construisent sur ce damier de mer. En bois et parfois en carreaux de faïence, elles s’ornent de bandes verticales de couleurs vives – rouge, vert, bleu, jaune, violet – et égaient considérablement les abords de la lagune.
Enrichie par les produits de l’océan – avec ses conserveries, ses industries alimentaires et l’exploitation de ses marais salants -, Aveiro est devenue le troisième centre industriel du Portugal. On y pêche anguilles, morues, sardines et calmars. Autant dire que les petits restaurants du bord de mer offrent un arrivage de poisson frais chaque jour de l’année. La plage de sable blanc et fin est somptueuse, et les petites gargotes du quartier des pêcheurs, à proximité du grand marché aux poissons, exquises.

Suivez le guide !
A Aveiro, testez l’Adega o Teheiro (Praça do Peixe, 20) : palourdes au vin blanc et calmars grillés (lulas grelhados) sont incomparables. Avec un petit vinho verde, on se régale…

Coimbra l’intellectuelle

A 122 km au sud de Porto ; 200 km au nord-est de Lisbonne.
Les maisons aux toits de tuiles rouges qui dévalent les pentes jusqu’aux rives du Mondego annoncent la proximité de Coimbra, certes baptisée à juste titre l’« intellectuelle », mais qui est aussi l’une des plus belles villes du pays, à michemin entre Lisbonne et Porto. La première capitale du Portugal est également l’une des plus anciennes villes universitaires d’Europe. Déplacée de Lisbonne à Coimbra en 1308, ce qui fut la seule université du pays durant plusieurs siècles occupe une place privilégiée dans la ville haute (a alta), dominant même la cathédrale, le palais épiscopal et le cœur de la vieille ville. Coimbra tout entière vit encore et toujours au rythme de l’année universitaire, désertée l’été par les jeunes gens qui font bouillonner la ville dès l’automne.
Les rites qui marquèrent des générations d’étudiants n’ont d’ailleurs toujours pas disparu. A partir du mois de mai, après la fin des examens, on voit défiler dans les ruelles pavées des cohortes de jeunes costumés selon leur cursus ou arborant fièrement la cape noire, signe d’appartenance à cette microsociété finalement plus conservatrice à bien des égards que ne le furent celles qui la précédèrent ! Seuls de rares tags discrets affichant une prise de position politique – notamment envers le problème du Timor-Oriental – ou un soutien à quelque club de football rappellent que les murs de l’université abritent aujourd’hui la future élite du XXIe siècle…
Tous ceux qui ne sont plus étudiants et qui demeurent cependant à Coimbra semblent s’y plaire ! La ville est assez dynamique, et de nombreuses industries ainsi que toutes sortes de commerces s’y sont implantés ces dernières décennies.

Le parc national de Buçaco
Il s’étend sur environ 100 hectares (à 30 km au nord de Coimbra), où s’épanouit une végétation infiniment variée. Plus de 700 espèces d’arbres y ont été plantées, et les différentes essences de fleurs se comptent par milliers. Une espèce de cèdre du Mexique, plantée par des moines, au XVIIe siècle, a même été rebaptisée depuis cèdre de Buçaco. Les fougères géantes, les rhododendrons et les hortensias tapissent une forêt très dense où toutes les sortes de chênes semblent se complaire. Au cœur de cette forêt inattendue, un palais de style manuélin, transformé en luxueux hôtel, marque le point de départ d’excursions pédestres très bien balisées.

Université
Fondée en 1290 par le roi Dinis Ier, installée au départ à Lisbonne, elle fut transférée à Coimbra dès 1308. Très vite, l’université accueillit de nombreux étudiants étrangers, qui lui conférèrent un statut de foyer intellectuel rayonnant dans toute l’Europe pendant la Renaissance, à l’instar des célèbres Bologne, Paris, Oxford ou Padoue.
Seule université du Portugal jusqu’en 1911, la Velha Universidade se visite tous les jours (de 9 h à 19 h d’avril à octobre, et de 10 h à 17 h d’e novembre à mars. Entrée payante ). Aux côtés des bâtisses d’époque, les bâtiments sans style qui accueillent les étudiants d’aujourd’hui ont piètre allure ! On pénètre en groupe avec un guide dans l’enceinte, où il faut jeter un coup d’œil à la bibliothèque, à la chapelle, au palais des Ecoles (Paçaos das Escolas), avec sa galerie couverte où l’on était tenu de s’exprimer en latin uniquement, flanqué d’une tour dite « de la chèvre » (a cabra), dont la cloche « bêle » les heures autant pour annoncer la fin des cours que la fermeture des magasins alentour ! Emprunter l’escalier menant au premier étage qui domine la salle des actes, qui sert parfois aujourd’hui encore à quelque soutenance de thèse, couverte d’un plafond à caissons sublimement peint. Le clou du spectacle demeure dans le baroque flamboyant de la bibliothèque Joanine : trompel’œil, ors, marbres et bois exotiques servent de décor à des livres dont le plus ancien date du XIIe siècle !

Le fado de Coimbra
Né bien avant celui de Lisbonne, le fado de Coimbra est aussi bien différent de celui que l’on a l’habitude d’entendre dans les tavernes de l’Alfama. Tout d’abord, différence principale, seuls les hommes, qui plus est dotés de voix aiguës, sont aptes à le chanter. Ce qu’ils exécutent parfois du reste a cappella ! Fondamentale aussi est la différence de tonalité, qui module la « teneur en saudade ». Parfois écrites et chantées par des étudiants de l’université, les ballades sont en effet souvent moins sombres et mélancoliques que celles qui font le fado traditionnel. Détail à connaître avant de s’élancer dans les tavernes à fado de Coimbra : ici, on n’applaudit pas les artistes, mais des raclements de gorge plus ou moins violents signifient le degré de contentement de l’auditoire !

Museu nacional Machado de Castro
Largo Doutor José Rodrigues. Ouvert tlj sauf lundi et jours fériés de 9 h 30 à 12 h 30 et de 14 h à 17 h 30. Entrée payante. En travaux actuellement, tél. : 00 351 239 823 727.
Installé à quelques mètres de l’université, le musée, qui porte le nom de l’un des grands sculpteurs portugais, abrite une étonnante collection d’œuvres romanes, gothiques, mais datant surtout de la Renaissance. Tous les plus célèbres représentants de l’école de Coimbra sont exposés en permanence dans les salles du rez-de-chaussée.
A voir encore, avant d’aller flâner dans les rues animées et commerçantes de la ville basse – le cœur vivant de la cité s’étend de la praça do Comércio jusqu’au fleuve -, les deux cathédrales, l’une dite nouvelle, où clinquent talhas douradas, azulejos et sculptures dans les chapelles attenantes au chœur, l’autre, construite au XIIe siècle et qui affiche des allures de forteresse, dont le cloître est d’une impressionnante sobriété.
Avant de quitter la ville, il faut s’offrir une halte-repos au jardin botanique(ouvert de 9 h à 18 h), situé dans la partie sud, qui recouvre de chlorophylle les flancs de la colline : les essences et bois tropicaux y sont légion et procurent un grand bol d’air pur toujours bienvenu !
Vers le nord, sur la praça 8 de Maio, toujours animée, le monastère Santa Cruz abrite un cloître manuélin et de belles œuvres d’art (gravures, sculptures, décorations, bois sculptés…).

Suivez le guide !
L’office du tourisme de Viseu (avenida Calouste Gulbenkian) distribue plans et itinéraires destinés aux marcheurs et à tous ceux qui souhaitent visiter la région.