Aaaahhh, mais que c’était bien cette parenthèse verte dans la forêt amazonienne…. On a un peu de mal à en revenir d’ailleurs…

Un récit de voyage au Brésil par Marion Kvaternik

Mais commençons par le commencement: l’agression armée. Oui, le Brésil dangereux, c’est pas un mythe, on s’en rend d’autant plus compte à Salvador. Donc ce jour là, à Manaus, nous avons décidé d’aller voir la mer, heu, le fleuve, le Rio Negro. Pour cela, ni une ni deux, nous avons simplement suivi sur la tablette le meilleur chemin pour y arriver. Entendre le chemin le plus court. Bien entendu, habitués que nous sommes à ne pas être dérangés, c’est tablette et appareils photos à la main que nous le faisons. Bon, OK, on est des glands. On l’a bien vu ce bonhomme qui louchait dessus, on a bien vu qu’on le revoyait souvent ensuite, on a bien vu qu’on était arrivé dans un quartier bien craignos au bord du fleuve.

Mais on a quand même réussi à être surpris quand il a déboulé sur Jerry (que j’avais laissé seul le temps d’une photo, l’erreur bête), en lui demandant tout son bordel. Le fait qu’il fasse 1m50 à rassuré Jerry, le copain qui débarque en sortant un truc (une arme?) de son sac, moins, c’est là qu’il a couru me rejoindre (en sécurité donc). Et un petit monsieur que j’ai regardé avec beaucoup d’insistance pendant cette agression a fait fuir les deux braqueurs, et nous a passé une petite gueulante. J’ai pas tout compris mais ça devait donné un truc du genre: “vous êtes débiles ou bien? Cassez vous d’ici et rangez vos affaires dans vos sacs”. Ce qu’on a fait, penauds.

Forêt amazonienne, Brésil

Forêt amazonienne, Brésil

Et ensuite à Manaus, nous avons rétréci notre champ de découverte à la place au dessus de l’hôtel, où nous avons découvert d’ailleurs l’attraction principale de la ville; le Teatro juarez…. Soit dit en passant, cette place, en plus d’être bien jolie la journée est très animée la nuit: restaurants en terrasses, petits concerts de rue, projections de film. Absolument énorme, et plongeant une fois encore dans une délicieuse ambiance que seul le Brésil sait offrir!

Le lendemain matin, nous arrivons tout naturellement en retard au rendez-vous pour le trek. Pas besoin d’entraînement, l’heure sud américaine, on maîtrise maintenant. A priori c’est vraiment partout pareil, la ponctualité, ça n’existe pas. Sauf  ce matin… Bon, ils nous ont attendus au moins. Et ainsi commence le trajet jusqu’au Logde, un coup de taxi jusqu’au port, un tour en bateau pour traverser le fleuve et voir “la rencontre des eaux”.

C’est l’endroit où deux fleuves se rencontrent, le rio negro et le Solimon; l’un calme et aux eaux noires, l’autre venant des montagnes, à l’eau claire et beaucoup de courant. Du coup, ils sont tellement différents qu’ils ne se mélangent pas facilement, ça prend des kilomètres pour que ce fleuve bien connu qu’est l’Amazone devienne uniforme. C’est assez intrigant comme vision. Nous débarquons, et attendons un bus qui nous fait traverser les terres jusqu’à un autre fleuve.

Lodge, Amazonie - Brésil

Lodge, Amazonie – Brésil

Un petit mot sur le chauffeur adorable qui m’offrira un fruit inconnu au bataillon, c’est pas tous les jours qu’on me fait des petits cadeaux j’en profite. Ce qui m’amène à parler des Brésilens et de leur rapport à la femme. Ici la femme me donne l’impression d’être considérée comme un trésor, ils en prennent grand soin, sont très attentionnés et relativement machos, ils préfèreront toujours parler à l’homme plutôt qu’à la femme qui les accompagne. Et c’est étrangement très agréable d’être vue et considérée comme ça, c’est très reposant en fait. Surtout qu’on a l’impression d’être entendue et écoutée quand on leur parle…. J’aime beaucoup ce pays. Et pour en revenir à nos moutons, le bus finit par s’arrêter (heureusement car au bout de la route il y a le fleuve) et on monte dans le bateau avec notre guide et le fils du gérant du lodge.

C’est parti pour un tour dans la forêt inondée. Le lodge se trouve du côté de la Juma River, c’est un coin très vert, où la plupart des arbres sont encore inondés, c’est à dire, que seulement leur cime sort de l’eau  parfois. Ca donne des paysages absolument merveilleux à toute heure de la journée. De temps à autre, le bateau passe devant une maison sur pilotis (rapport aux eaux qui montent et descendent selon la saison), et enfin, on se retrouve projeté dans un autre monde.

Le Lodge est simplement parfait, une chambre coquette et toutes les installations nécessaires pour un petit occidental. Le déjeuner est servi, nous sommes seuls dans ce lodge, avec un guide parlant français, c’est le paradis. Pour tout dire, c’est presque trop paradisiaque, c’est pas comme ça qu’on m’avait vendu la forêt, je suis assez surprise, mais bien contente. Heureusement, les moustiques sont au rendez-vous pour nous gâcher la vie, c’est pas compliqué, on a beau eu se tartiner en continu de produit anti-moustique, si on revient sans le palu, c’est un miracle!

Excursion en Amazonie - Brésil

Excursion en Amazonie – Brésil

Le rythme est très tranquille aussi. L’après-midi, les activités ne commencent pas avant 3h (avant, il fait trop chaud),  ce qui nous laisse deux heures à n’avoir pas grand chose d’autre à faire que la sieste en hamac ou un plongeon dans le fleuve…. Chacun son occupation.

L’après-midi, c’est “reconnaissance”, soit on prend le petit bateau pour aller découvrir les environs et voir quelles bestioles on va croiser. Alors attention, au début, ça ne fait pas rêver: l’animal qu’on voit le plus: la libellule, le son d’animal qu’on entend le plus: la cigale. On se croirait presque dans le marais poitevin….Merci pour le dépaysement. 

Mais en ouvrant plus grand les yeux et les oreilles, la forêt et ses habitants se dévoilent peu à peu: ici un faucon, là un toucan (je suis passée pro dans l’art d’imiter le cri du toucan, aptitude très utile que j’ajouterai d’ici peu sur mon CV), enfin un singe rieur. Et d’autres oiseaux encore (et donc un petit chéri constamment à l’affut… Ecureuil!). Mais le soir, échec à voir les dauphins et les caïmans… Tant pis, ce sera pour une autre fois!

Lever à 5h pour Jerry le lendemain, il verra donc les dauphins roses et gris d’Amazonie. Enfin leurs dos, attention, ils ne sont pas bien funs ces petits, pas de pirouettes au lever du soleil, pffff…. Je me joindrai à eux après un bon petit déjeuner pour une petite randonnée dans la forêt. Là, on a pu constater l’adresse de notre guide qui ne trouvait pas son chemin, mais qui savait bien nous l’expliquer (c’est parce que ça fait longtemps, avec le passage des eaux, le chemin a changé…); mais n’avait pas grand chose à dire sur la végétation environnante.

On a quand même vu des “nids” de cigales et de fourmis, des palmiers, des nids d’autres bêtes, on a pu goûter à la liane à eau, une bien belle création quand on voit à quelle vitesse la bouteille d’eau se vide… Mais pas de bêtes, non, non, non, nous n’avons beau être que quatre, nous faisons un tel boucan qu’il est évident qu’à 4km à la ronde les animaux sont partis… On dirait que Jerry choisit volontairement de marcher sur les branches qui vont craquer….

L’après-midi, après la sieste, c’est pêche aux piranhas!!!! Ca fait très attraction touristique, mais c’est mega fun! Les guides (oui, en fait, on en a toujours deux avec nous, un qui connaît la route, et l’autre qui parle français) nous emmènent d’abord dans un endroit, proche des terres, à l’ombre des arbres inondés. Mais ça ne mord pas. Pas le piranha en tout cas. Au bout de nos cannes faites maison, un appât original: des morceaux de poulet. Dont les piranhas raffolent. Mais pas que!

A un moment, je sens la canne qui tire, alors je tente de ferrer, je remonte, mais niet, c’est trop lourd et ça remonte vide. Puis on voit plein de bulles apparaître à la surface, les guides s’agitent et lancent: “anaconda, anaconda”. C’est probablement la plus belle approche qu’on en fera, mais quand même, se dire qu’on avait un anaconda au bout de la ligne, ça n’a rien de rassurant. Alors on change de lieu. On se retrouve en face du lodge, de l’autre côté du fleuve, devant la cime d’un arbre inondé. Et là, c’est la folie, à peine mis dans l’eau, les morceaux de poulet sont digérés.

La pêche commence… Et, une fois de plus, je ne voudrais pas me vanter (c’est tellement pas mon genre); mais devinez qui a eu sa pêche miraculeuse???? Ben oui, moi. Bon Ok, j’ai eu de la chance, le guide m’a très bien expliqué et j’ai pigé tout de suite, pas comme d’autres qui rentreront frustrés… Sur le chemin du retour, pour le coucher de soleil, les dauphins viendront nous saluer, plus ou moins loin, mais toujours sans folie… Et le soir, nous aurons presque attrapé un caïman, mais resterons seulement avec l’image de yeux qui brillent à la lueur des faisceaux la nuit.

Repas en campement - Amazonie, Brésil

Repas en campement – Amazonie, Brésil

Et le soir, c’est fête au lodge, c’est l’anniversaire d’un membre de la famille, donc toute la famille s’est déplacée de Manaus pour venir au Lodge. Ils ont donc ajouté une terrasse flottante, et nous sommes chaleureusement conviés à y prendre part. La famille est adorable, et la soirée fut très sympa même si, fidèles à leurs habitudes, ils nous avaient installés une table éloignée de la leur.

Enfin, le troisième jour, un de mes petits rêves va se réaliser. Nous repartons en reconnaissance. Et durant longtemps c’est l’ennui. On a beau être particulièrement discret, pas une bestiole ne se montre…. c’est frustrant, et donc ça devient chiant. On veut rentrer mais ils nous emmènent dans un dernier bras du fleuve. Et là, en passant sous un arbre….. Un paresseux!!!!! Fidèle à son image, il nous fuit tranquillement, si tranquillement que les guides, me voyant pétiller d’excitation face à cette bête tellement trop choupinette, décident d’aller l’attraper. La course poursuite dans les arbres, avec saut dans l’eau reste mémorable, surtout quand on les a laissés sur leurs arbres pour suivre le paresseux en bateau, et qu’on était trop occupé à prendre des photos pour revenir les chercher, toujours est-il qu’ils l’ont eu. Pauvre  bête, on avait honte…. Puis ils nous l’ont donné. Alors donc, c’est très tentant, mais le câlin, c’est exclus quand on voit les griffes de la bête. N’empêche, c’était génial. Le temps d’une séance photo et j’aurai le privilège de le relâcher dans les arbres. Bouh, cette rencontre fabuleuse, c’était magique!

Un dernier passage au lodge et nous repartons pour le moment fort de l’excursion: la nuit dans la jungle. Pour de vrai. Enfin en campement. Que nous partons rejoindre avec notre guide. Qui mettra deux bonnes heures à le trouver. A un moment, on a cru qu’on y était, on s’est approché du rivage, et on a entendu un bruit singulier: une bête se faisant bouffer par une autre… Plus de bruit, le guide attrape sa machette et on attend. Les bruits s’éloignent un peu et le guide dit “Félins”. Il se met à parler fort et nous donne les consignes en cas d’attaque de jaguar: le regarder dans les yeux, tenir la machette devant et ne pas avoir peur…

Oui non, sérieux, tu veux qu’on dorme là??? Nan parce que toute la forêt le sait là, Monsieur l’Ara est passé en braillant au dessus de nous…. Bon non, c’est pas là (ouf), on repart. La sentinelle rejoint sa maison, et tout va bien. Sauf qu’on entendra des jaguars jusqu’au campement… Campement sommaire, une vague cabane avec des hamacs. La préparation de la nuit commence, les hommes travaillent, je surveille la forêt. Oui parce que du coup, il fait nuit là, donc bon, les bruits, on les entend, mais on ne voit pas bien. Alors qu’on sait bien qu’on est vu, nous.

Tout en préparant le poulet et les légumes au feu de bois (là pour le coup, il nous a impressionné le guide), il nous explique que ces bruits de choses qui tombent c’est, au choix: des feuilles, des grosses araignées, ou des serpents… On est content d’avoir un toit sur la cabane. Puis vient l’heure d’aller se coucher. Je choisis mon hamac, m’installe et…. je vous ai parlé de ma nouvelle lubie de manger tout le temps, j’ai arrêté depuis…. la corde lâche, je me retrouve les 4 fers en l’air et surtout, je tombe directement sur le coccyx. Et là, c’est la panique. J’ai mal, j’ai très mal, et je me vois mal bloquée ici loin de tout… Bon, on se calme, on respire, et on essaye de se mettre debout. C’est douloureux, mais possible, tout n’est pas perdu.

On m’installe dans l’autre hamac. J’aurais bien refusé mais il n’y a pas d’autre endroit…. Et le hamac; c’est parfait quand tu as mal au coccyx, c’est pas là que ça fait mal…. Bref, la nuit fut d’autant plus dure. Donc la douleur, les moustiques, qui tournent autour de la moustiquaire et qui sont fous de ne pas réussir à nous atteindre, et tous les autres bruits de la forêt…. C’est incroyable. Et au réveil, mettre les bruits sur des images et voir passer les singes à quelques mètres, c’est dingue…. Et ce son avec lequel on se réveille: les singes hurleurs. Pas tout à fait les hurlements auxquels je m’attendais, c’est entre un bruit de fantômes et de vent dans les arbres, lugubre à souhait quand il fait encore nuit!

Mais c’est la fin, nous rentrons ce jour à Manaus, épuisés mais dans un autre monde. c’est étrange mais même mes rêves ont changé pendant cette excursion, ils étaient d’eau, il y avait de l’eau partout, c’était bizarre. Même à Salvador, c’est difficile d’oublier, l’autre nuit, je me suis réveillée, j’ai vu le sol de la chambre fait d’eau et je cherchais le passage en planches de bois pour aller aux toilettes. Ne trouvant pas, je me suis rendormie, mais c’est incroyable comme cette expérience nous a physiquement marqués. On a du mal à se réjouir de visiter une ville maintenant. Surtout Salvador.